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Vie politique - Il existe une autre voie que la corruption et beaucoup de bonnes volontés dans le pays Lahoud : Il ne faut pas bloquer les rouages de l’État en attendant l’échéance présidentielle(photo)

L’étape a beau être cruciale sur le plan régional, et sans doute aussi interne, le président de la République reste serein, confiant dans l’avenir du pays et dans l’action qu’il mène. Selon lui, l’alliance stratégique avec la Syrie a donné au Liban la stabilité, lui permettant de déjouer toutes les tentatives de dissensions internes, mais il faut encore gagner la confiance du peuple. Selon ses visiteurs, le chef de l’État ne partage pas la théorie qui veut que tout le pays est paralysé. « Au contraire, rapportent ceux qui l’ont rencontré, le Conseil des ministres n’a jamais aussi bien fonctionné et le président souhaite coopérer avec tous dans l’intérêt du pays. Mais il n’est pas question qu’il se laisse entraîner dans des « deals » ou des compromis. En tout cas, il trouve injuste pour les Libanais de tout bloquer sous prétexte qu’il y a une échéance présidentielle dans un an. » D’autant que le facteur interne n’a jamais été déterminant dans ce genre d’échéance.
Toute la journée de dimanche au palais de Baabda a été consacrée à l’agression israélienne contre la Syrie et au survol par les avions israéliens de l’espace aérien libanais. Mais, selon ses visiteurs, le chef de l’État n’a montré aucune inquiétude. Il aurait pourtant insisté sur le fait que si les Libanais ne comprennent pas bien la situation régionale, ils risquent de perdre leurs acquis, à savoir la stabilité de leur pays, que leur envient bon nombre d’Arabes. Le chef de l’État considérerait ainsi que la « feuille de route » est dans l’impasse. Les Israéliens souhaiteraient donc éloigner d’eux la boule de feu et la rejeter sur le Liban et la Syrie. Mais ces deux pays sont forts parce que la légalité internationale est de leur côté. Même si la plainte présentée par le Liban n’aboutit pas à une condamnation officielle de l’État hébreu, le message a été quand même envoyé. Et Israël doit comprendre que s’ils sont agressés, le Liban et la Syrie resteront unis et ne se laisseront pas faire.

Un président proche
des citoyens
Toujours selon ses visiteurs, le président Émile Lahoud serait plus inquiet pour la situation interne et la campagne destinée à démobiliser les Libanais et à leur faire croire que tout va mal et qu’il n’y a aucun moyen de sortir de la crise. Avec ses proches, il aurait ainsi parlé du projet de loi sur le budget préparé par le ministre des Finances, estimant qu’il faudra le retravailler, de manière à favoriser les prestations sociales. « Dans ce domaine, aurait-il dit, de petites sommes permettent de grandes réalisations. Et c’est à cela que nous devons nous atteler. »
Selon ses proches, le chef de l’État donne l’image d’un homme à l’écoute des citoyens. « Si je ne peux pas résoudre tous leurs problèmes, aurait-il déclaré, je peux leur montrer que je sens avec eux et que je partage leurs soucis. En tout cas, que je fais de mon mieux pour que les choses avancent. » Ce serait d’ailleurs là la principale raison de ses tournées d’inspection sur le terrain, qui, selon ces mêmes sources, auraient déjà porté des fruits, certains contrats ayant été améliorés et les fonctionnaires accomplissant plus sérieusement leurs tâches.
Le chef de l’État serait toutefois assez inquiet de la situation économique du pays. Selon ses visiteurs, il aurait précisé que les 80 % de Libanais qui formaient la classe moyenne sont désormais tout près du seuil de pauvreté. Si l’on ne fait rien, leur situation pourra empirer et leur nombre augmenter.
Certes, au Liban, les commissions perçues et autres détournements de fonds font partie des traditions de la classe politique. Mais autrefois, cela passait plus ou moins inaperçu parce que le pays était prospère. Aujourd’hui, non seulement les caisses sont vides, mais l’État s’endette pour que certains puissent se remplir les poches. On pourrait citer des dizaines d’exemples. Comme les 50 milliards de LL de l’EDL, réunis après les bombardements israéliens et qui se sont envolés sans que, malgré les demandes répétées du chef de l’État, on fournisse des justificatifs.
C’est pourquoi, d’ailleurs, lorsque le prince al-Walid ben Talal lui a proposé dix milliards de LL, après les inondations de l’hiver dernier, le président Lahoud a, selon ses proches, tout bonnement refusé la somme, car il n’était pas sûr de pouvoir présenter des justificatifs des dépenses.
Pourtant, des rumeurs circulent sur ses proches qui seraient, dit-on, impliqués dans l’affaire de la banque al-Madina. Les visiteurs du président rapportent à ce sujet l’étonnement de ce dernier à l’évocation d’un tel sujet. Il faudrait se rappeler que c’est bien lui qui a demandé la poursuite de l’enquête sur cette affaire, alors que les autorités concernées avaient affirmé qu’al-Madina était en train de rembourser toutes ses dettes. Le problème, c’est qu’au Liban, les rumeurs tiennent lieu de faits. Si celles-ci étaient vraies, les multiples détracteurs du président, au sein de la classe politique, n’auraient pas manqué d’en parler, inondant la presse de détails sur le sujet. Par contre, il y aurait beaucoup de questions à poser au sujet des sommes payées à certains établissements bancaires en difficulté. Le sujet devrait d’ailleurs bientôt être à l’ordre du jour, non pas dans une volonté du président d’intervenir dans les questions bancaires, mais pour établir les critères qui dictent les fusions entre les divers établissements et pour demander des comptes à ceux qui détournent des fonds.

Pas de compromis aux
dépens des intérêts du peuple
Selon ses visiteurs, le président Émile Lahoud rejetterait catégoriquement la théorie selon laquelle le pays est paralysé. Ses proches citent point par point les décisions importantes prises par le Conseil des ministres au cours des derniers mois : l’EDL qui poursuit sa réforme, les 160 jugements déjà émis, ce qui est une première au Liban, le CDR, qui, trois ans après l’adoption de la loi, est désormais doté d’un décret d’application qui régit son organigramme, le contrat de Sukleen qui a été rompu et les appels d’offres en train d’être préparés, le dossier des téléphones cellulaires qui avance. C’est vrai qu’il y a du retard, reconnaissent ces proches, mais les choses évoluent. Désormais, lorsqu’il y a un sujet qui risque de devenir conflictuel, les « Bernadotte » ne prennent plus la peine d’intervenir pour des médiations, se contentant de demander des informations. En fait, tout le monde a compris que le chef de l’État ne compte faire aucun compromis sur les intérêts du citoyen. Selon ces mêmes sources, il aurait même déclaré à ceux qui le sollicitaient : « Si vous avez raison, je ne peux que m’incliner. Mais si ce n’est pas le cas, rien ne pourra me convaincre d’accepter une proposition non conforme à la loi. »
Pourtant, une véritable campagne est menée actuellement contre lui, l’accusant de vouloir proroger son mandat.
Mais selon ses proches, le président Lahoud travaille comme s’il quittait son poste à la fin de son mandat actuel. Rien n’est plus éloigné de lui que les combines et autres manigances pour proroger son mandat. Tout au long de sa carrière, il n’a jamais rien demandé et ce n’est pas maintenant qu’il va commencer à le faire. De toute façon, tout le monde sait que l’échéance présidentielle se joue bien plus sur les plans régional et international qu’interne. Ce n’est donc pas la peine de perdre son temps et de paralyser le pays sous prétexte d’écarter toutes les chances de prorogation du mandat Lahoud. Ce dernier veut coopérer avec toutes les parties, y compris le président du Conseil, pour servir les intérêts des citoyens et dans le cadre du respect de la loi. Il souhaite aussi montrer aux Libanais qu’il ne faut pas désespérer et se dire qu’on ne peut pas lutter contre la corruption, ni réussir en restant honnête. Selon ses proches, le président est convaincu qu’il y a beaucoup de bonnes volontés un peu partout et particulièrement au sein de la nouvelle génération. Il veut donc leur montrer qu’il existe une autre voie et qu’elle peut réussir. S’il ne peut éradiquer totalement la corruption, il souhaite au moins mettre le processus sur les rails.

Le patriarche, le général...
et la justice
Reste le problème de la justice. Selon le chef de l’État, il ne suffit pas d’engager des poursuites, il faut aussi émettre des jugements. Et cela relève du juge et de lui seul. Car, conséquent avec lui-même, il n’intervient pas dans l’appareil judiciaire. C’est ainsi que, selon ses proches, il ne serait pas favorable aux poursuites engagées contre le général Michel Aoun. Les deux hommes auraient d’ailleurs grandi ensemble, mais chacun d’eux a pris une voie différente. Le président Lahoud a choisi le chemin de l’alliance stratégique avec la Syrie. Ce qui n’est pas l’avis du général Aoun. Ce n’est toutefois pas, aux yeux du président Lahoud, une raison pour engager des poursuites contre lui. Mais cela n’est pas de son ressort.
Le chef de l’État respecte donc l’indépendance de la justice. Et si les juges ne parviennent pas à mener jusqu’au bout l’examen des dossiers, c’est que, souvent, ils ne trouvent pas des témoins ou des éléments concrets. Ce qu’il faudrait, rapportent les proches du président, c’est un peu comme ce qui s’est passé en Italie, avec un Andreotti qui procéderait à un grand déballage. Toutefois, avec la formation de la Haute Cour chargée de juger les présidents et les ministres, composée en partie de députés, les débats seraient à huis clos et les décideurs à la fois juges et parties.
Selon ses proches, le président répond à toutes les questions. Au sujet des positions du patriarche maronite à Paris, le président Lahoud n’y aurait, selon ses visiteurs, rien vu de nouveau et il aurait ainsi réaffirmé toute l’estime qu’il porte au patriarche Sfeir, « ce visionnaire au sens national très développé ». Le président estimerait ainsi que le seul souci du patriarche maronite est de préserver le Liban. Au fil des rencontres, les deux hommes ont appris à se connaître. Mais la presse cherche toujours à trouver des signes de discorde. À ce sujet, le président reconnaîtrait, selon ses visiteurs, qu’il a longtemps omis de s’adresser aux médias, convaincu que, comme à l’armée, le travail honnête finit toujours par être reconnu. Mais aujourd’hui, il pense que les citoyens ont le droit de tout savoir.

Scarlett HADDAD
L’étape a beau être cruciale sur le plan régional, et sans doute aussi interne, le président de la République reste serein, confiant dans l’avenir du pays et dans l’action qu’il mène. Selon lui, l’alliance stratégique avec la Syrie a donné au Liban la stabilité, lui permettant de déjouer toutes les tentatives de dissensions internes, mais il faut encore gagner la...