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Les professionnels craignent que le temple ne s’écroule sur la tête de tous

Usant d’une parabole nomade, Hussein Husseini compare le Liban à une tente dont la tempête défait les liens. Que des sauveteurs doivent se hâter de renouer, pour que la toile en folie ne finisse pas par emporter le pilier central. Pour retomber sur la tête de tous.
Ce tableau alarmant est partagé par la plupart des politiciens locaux. Les mois à venir, indiquent-ils, vont être déterminants tant dans le domaine économique qu’en politique ou au niveau sécuritaire même. En fait, la solution est dans les mains des dirigeants. Dont seule l’entente peut consolider la stabilité du pays sur tous les fronts, pour qu’il puisse résister aux épreuves qu’il subit déjà. Et qu’illustre la crise à suspense de l’électricité. Dont l’extinction définitive plongerait le pays dans le noir. Et justifierait, sans doute, la mise en place d’un gouvernement d’urgence ou d’exception.
Au stade actuel, les cercles cités relèvent qu’en laissant s’accumuler, pendant des années, les problèmes de l’EDL on en a rendu le traitement bien plus compliqué. Ils rappellent qu’il y a quelques années déjà, une liste de prévaricateurs ou de transgresseurs avait été établie, et même rendue publique. Sans que des mesures soient vraiment prises à leur encontre, pour qu’ils remboursent ce qu’ils devaient, en arriérés de quittances notamment. Ce placard comprenait nombre de services publics, d’officiels et de personnalités connues. Il y avait eu, parallèlement, une tentative pratiquement mort-née, de démanteler les réseaux de branchements illicites et d’installer des compteurs. Mais les poursuites judiciaires, en application de la loi, avaient été rares. Et les milliards que l’EDL aurait pu récupérer lui sont passés sous le nez. L’office n’a pas pu amortir son déficit, qui a continué à se creuser. Le fait qu’en trois petits jours, l’EDL ait pu recouvrer maintenant trois bons milliards prouve que lorsque l’État y met du sien, il obtient des résultats. Car lorsqu’ils réalisent que la loi est effectivement appliquée à tous sans discrimination ni favoritisme, les Libanais s’y soumettent de bonne grâce. Inversement, quand on ferme les yeux sur des contrevenants, leur nombre se démultiplie automatiquement. La fraude devient alors une sorte de sport d’adresse dans lequel beaucoup prennent plaisir à rivaliser. En pathologie, il faut prendre le mal à ses débuts, sinon il se répand irrémédiablement dans le corps. Or le pouvoir a laissé le patient sans soins pendant plus de dix ans. Cela pour l’électricité, pour les carrières, pour le mazout, pour les fonds de la Sécu et pour bien d’autres problèmes sectoriels affectant l’économie nationale.
Aujourd’hui on promet, tout à la fois, de traiter la crise électrique et d’engager la lutte contre la corruption, en vue d’une réforme politico-administrative. Mais, question élémentaire, la population se demande si, pour commencer, les dirigeants vont consentir à s’entendre. Sur le traitement des dossiers et sur les mécanismes à installer à cet effet. Or jusqu’à présent c’est manifestement la méfiance qui règne entre eux. Ils se font des procès d’intention, notamment au sujet des mobiles véritables sous-tendant à terme le projet de réforme. Ainsi, les vues des présidents Lahoud, Hariri et Berry s’avèrent par trop différentes dans leur contenu de fond et leurs perspectives.
Le chef de l’État, notamment dans ses confidences à la presse représentée par Melhem Karam, insiste sur sa détermination à mener à bien toutes les réformes, en punissant les coupables, pour récupérer les biens détournés de l’État. Il affirme refuser que le Liban perde dans le domaine économique ce qu’il a pu gagner sur le plan de la politique et de la sécurité. Il annonce que le Conseil des ministres va prendre des décisions majeures au sujet de dossiers délicats. Dans le cadre de la campagne, prioritaire à ses yeux, qu’il lance pour la réforme et l’éradication de la corruption.
Le président du Conseil rappelle pour sa part, à l’issue de sa dernière entrevue avec le président Chirac, que la priorité reste centrée à ses yeux sur Paris II. En soulignant que le projet d’un Paris III est évidemment conditionné par la réalisation des engagements que le Liban a pris. Ce qui confirme, si besoin était, que le gouvernement n’a toujours pas été en mesure d’appliquer les plans économiques et financiers en base desquels il avait obtenu les promesses d’aide de Paris II. On sait, en effet, que les privatisations mais aussi la réduction effective du déficit budgétaire et la relance de la croissance sont restées lettre morte. Le président Hariri a indiqué, il y a près d’un mois, que le gouvernement ne saurait assumer seul la responsabilité de ces défaillances.
Quant au chef du Législatif, il a relevé, après une rencontre avec le chef de l’État, que la réforme est un processus constant, continu. Dont l’analyse, au niveau des résultats, requiert du temps. Il a conclu, en pastichant Clemenceau, que l’opération de réhabilitation est trop importante pour être confiée aux politiques.
Il faudra donc voir, à travers les prochains Conseils des ministres, si l’harmonie peut être réalisée entre les dirigeants. S’ils peuvent accorder leurs violons, parler d’une seule voix et s’entendre sur les priorités. En mettant au point, le cas échéant, les mécanismes de la réforme.

Émile KHOURY
Usant d’une parabole nomade, Hussein Husseini compare le Liban à une tente dont la tempête défait les liens. Que des sauveteurs doivent se hâter de renouer, pour que la toile en folie ne finisse pas par emporter le pilier central. Pour retomber sur la tête de tous.Ce tableau alarmant est partagé par la plupart des politiciens locaux. Les mois à venir, indiquent-ils, vont être...