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La réforme prônée par le régime peut-elle englober le budget ?

Les chiffres annoncés par Siniora, avant la transmission de son projet de budget au Conseil des ministres, n’ont surpris personne. On savait en effet depuis longtemps que le ministre, à son corps défendant et sous la pression de Hariri, avait renoncé à l’idée d’augmenter les taxes et les impôts. Il se trouve techniquement obligé, dès lors, de prévoir un déficit maintenu au même niveau que la présente année. C’est-à-dire devant se situer entre 27 et 31 % (selon que l’on aura pu, ou non, effectuer des privatisations). Ce qui signifie que le plan de rééquilibrage progressif, avec déficit zéro en l’an 2006, tombe à l’eau. Siniora, qui se rend donc compte que le redressement s’apparente désormais à un mirage, assume courageusement ses responsabilités. Il proclame en effet qu’il est le seul maître d’œuvre du budget 2004. En précisant que même Hariri n’y a pas mis la main. Il ajoute que toutes les directives viennent de lui, de lui seul, qu’il répond seul des estimations, du montant du déficit, de son taux. Qui d’ailleurs, avoue-t-il, peut encore s’élever s’il se présente de nouvelles dépenses. Cette année 2003, faut-il le rappeler, a vu ainsi le déficit, prévu à 25 %, dépasser les 38 %. Les rentrées ont été moins bonnes qu’on ne l’espérait. Et les dépenses bien plus élevées, à cause des querelles politiques ! Pour Siniora, qui arrondit les angles autant qu’il le peut, le budget 2004 est tout ce que l’on pouvait faire, bien que cela soit moins que le nécessaire. Le texte est exempt de nouvelles taxes ou d’impôts supplémentaires.
Mais encore faudra-t-il en observer les ordonnances. En effet, Siniora se plaint que personne ne se conforme aux chiffres approuvés. Les dirigeants de l’Exécutif et du Législatif, qui avaient promis pour l’année en cours de comprimer les dépenses, ont en fait ouvert les robinets en grand. Siniora déclare dès lors que si l’on tient vraiment à réduire le déficit, il faudra que le Conseil des ministres, la Chambre et les pôles politiques conjuguent leurs efforts dans ce sens, et non plus dans le sens contraire. Il précise que des mesures radicales doivent être prises pour stopper l’hémorragie financière, le gaspillage et la gabegie. Surtout que la population, exsangue, n’en peut plus.
De leur côté, des sources politiques se demandent pourquoi le système ne se serre pas la ceinture, mais se livre au contraire à des dépenses somptuaires effrénées. De même, des pôles du monde des affaires se posent des questions quant au maintien d’organismes parasitaires comme le Conseil du Sud ou le Conseil des Déplacés. Dont les budgets sont purement politiciens. Dans le même ordre d’idées, ces techniciens relèvent que les 85 % des dépenses vont à des fonctionnaires dont bon nombre sont de vrais fantômes, qui ne se pointent au travail que pour toucher leurs émoluments. Cela sans compter les primes fastueuses, les conseillers personnels, les contrats mirobolants, les indemnités de fin de service, la facture anarchique de la santé. En fait, selon les estimations de ces professionnels, on peut, pour un même rendement, couper sans mal 20 % des budgets des différents départements étatiques. Tout comme on ne devrait plus laisser le Parlement sans contrôle comptable, mais le soumettre à son tour au regard scrutateur de la Cour des comptes. Il faut rappeler à ce propos la proposition, déjà ancienne, des députés Farid Makari et Abbas Hachem, visant à cesser de payer des mensualités aux anciens parlementaires. Ce qui est une trouvaille que l’on ne trouve justement nulle part ailleurs. Surtout pas dans les pays qui crient famine, financièrement. Cela sans compter qu’à chaque incidence, climatique ou autre, l’on exige des indemnités de l’État-providence, pour ruiné qu’il soit. Les milieux économiques concernés élèvent donc la voix pour que l’on mette fin au gaspillage. En rappelant que la dette publique, qui ne cesse d’augmenter malgré Paris II, va mener le pays à la faillite. D’autant plus vite que, de temps à autre, certains secouent le cocotier, en s’attaquant à la Banque centrale elle-même, comme cela s’est vu récemment lors de la campagne contre Salamé.
L’important aujourd’hui reste de savoir si le président Lahoud va émettre des réserves, durant le débat en Conseil des ministres, sur le budget 2004 de Siniora. Le chef de l’État pourrait en effet vouloir intégrer le budget dans son cycle de réforme. En exigeant, pour commencer, que l’on ferme les robinets des dépenses à caractère politicien. Et en tentant de réduire les frais administratifs, encore trop élevés.
Philippe ABI-AKL
Les chiffres annoncés par Siniora, avant la transmission de son projet de budget au Conseil des ministres, n’ont surpris personne. On savait en effet depuis longtemps que le ministre, à son corps défendant et sous la pression de Hariri, avait renoncé à l’idée d’augmenter les taxes et les impôts. Il se trouve techniquement obligé, dès lors, de prévoir un déficit...