Répercutant pour sa part les vues des tuteurs, Nabih Berry a informé récemment les députés qui lui rendent visite que les municipales auront bien lieu dans neuf mois, temps de gestation normal. De son côté, claquant des talons, le département de l’Intérieur fait savoir, par la bouche du ministre compétent, qu’il est fin prêt techniquement pour organiser les municipales au moment convenu.
Prouvant, si besoin était, une parfaite connaissance des arcanes de la vie publique libanaise, les Syriens manifestent beaucoup d’intérêt pour les municipales, indiquent leurs confidents locaux. Ils affirment que ce rendez-vous est important dans la mesure où il doit conforter tout à la fois la démocratie de proximité et l’essor du développement urbain ou rural. Les mêmes sources ajoutent que pour les Syriens, qui voient loin, les municipales peuvent constituer un vivier où l’on pourra puiser du personnel politique, pour insuffler un sang nouveau à la République libanaise.
Parallèlement, mais d’une façon un peu plus étonnante car on sait où réside le pouvoir de décision, les tuteurs déplorent, aux dires des mêmes témoins, que l’on accuse du retard dans l’élaboration d’une nouvelle loi électorale, pour les législatives. Selon les mêmes sources, les Syriens souhaitent un texte qui réponde aux aspirations de la majorité des Libanais, en prenant en considération les vues de certains recours comme de certains leaderships. Une façon à peine voilée d’évoquer le refrain à la mode : il faut tenter de donner satisfaction au patriarcat maronite, pour lui dire merci. Car il a enchaîné ces derniers mois les positions satisfaisantes pour Damas. D’abord, il a applaudi avec les évêques au discours d’Assad à Charm el-Cheikh. Ensuite, il s’est prononcé, comme le pape, contre la guerre en Irak. Enfin, et surtout, il a refusé de bénir les pressions américaines sur la Syrie concernant, notamment, le retrait du Liban (en précisant que la question doit être réglée entre frères). Bref, Damas veut que pour la prochaine édition électorale on ne lance aucun défi au cardinal Sfeir. De même, mais l’air est cette fois plus ancien, le slogan cité fait allusion à la fleur qu’il convient de faire à Joumblatt. Pour qui on avait déjà taillé des costumes sur mesure, par le passé.
Pour en revenir au plan global, un officiel, un ministre, qui abonde évidemment dans le sens des décideurs, affirme que les délais des échéances seront tenus parce que le Liban tient à montrer aux Occidentaux, Américains en tête, qu’il est bien un pays démocratique. Cela au moment où Washington fait campagne dans la région au nom d’une promotion de la démocratie.
Reste le gros morceau, la présidentielle. À ce propos, certains loyalistes avouent, d’une manière détournée, que la commandite pourrait bien ne pas être respectée. Ils ne vont pas jusqu’à dire que l’élection n’aura pas lieu dans les délais constitutionnels ; mais ils glissent qu’il est trop tôt pour en parler. Sans s’apercevoir qu’ils se contredisent, puisqu’ils soutiennent que les législatives, organisées bien des mois plus tard, ne seront pas reportées. Cependant, force est de reconnaître que la présidentielle dépend beaucoup plus que les autres échéances locales de la conjoncture régionalo-internationale. Et qu’elle aura lieu ou non dans les délais, selon les circonstances qui prévaudront ultérieurement, notamment au niveau des relations entre les grands électeurs, la Syrie et Washington.
Philippe ABI-AKL
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