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Interview - Le nouveau député de Baabda-Aley invite les jeunes à participer activement à la vie politique Henri Hélou à « L’Orient-Le Jour » : J’alignerai ma conduite sur les positions de Bkerké (photo)

Il a fait son entrée dans l’arène politique de façon précipitée et sa campagne électorale s’est déroulée au pas de charge. Aucun indice ne permettait en effet de présager la subite disparition de Pierre Hélou. Du coup, Henri Hélou s’est trouvé pris, du jour au lendemain, dans le tourbillon des manœuvres et des calculs politiques tournant autour de sa personne. Contrairement à une idée préconçue, le nouveau député de Baabda-Aley n’est pas véritablement un novice parachuté sur la scène politique. Depuis le début des années 90, il suivait de près, mais dans l’ombre, l’action de son père et il était même associé, parfois, à certains de ses contacts. Il était le principal élément moteur de sa machine électorale au cours des derniers scrutins législatifs. Il connaît donc, dans une certaine mesure, le « terrain ». Mais, par contre, l’opinion publique ignore tout de lui. Dans une interview accordée à «L’Orient-Le Jour», il définit les lignes directrices de son action future. L’histoire de mieux se faire connaître de son électorat, et des Libanais en général.
Affable et courtois, Henri Hélou se montre à la fois lucide et prudent, et fait preuve d’indépendance d’esprit, ce qui laisse entrevoir le profil politique qu’il compte se forger. Cet architecte de cinquante ans a entamé ses hautes études, en 1972, à l’Université américaine de Beyrouth avant de se rendre aux États-Unis puis à Londres, afin de parachever sa formation. Marié à une Française, père de trois enfants (un garçon et deux filles), il s’est installé définivement à Beyrouth au début des années 90 après avoir travaillé, notamment, en France et dans le Golfe.
De tempérament apparemment calme, il aurait souhaité que sa bataille électorale se déroule dans une atmosphère plus sereine, plus réfléchie. Il aurait surtout souhaité que le taux de participation soit plus élevé. Comment analyse-t-il un tel désintérêt pour ce srutin partiel ? « La participation au vote a été effectivement très faible au niveau de toutes les communautés et dans toutes les régions (un peu plus de 20 pour cent à l’échelle de l’ensemble de la criconscription), déplore M. Hélou. J’espérais qu’on atteindrait un taux de 30 à 35 pour cent. Telles étaient nos prédictions, en se basant sur les chiffres de l’an 2000 (date des dernières élections). Ce faible taux de participation est dû évidemment au fait qu’il ne s’agissait là que d’un scrutin partiel qui, de par sa nature, n’enthousiasme pas les électeurs. »
« Mais au-delà d’une telle considération, précise M. Hélou, les résultats de cette partielle reflètent le sentiment de ras-le-bol perceptible au niveau de la base. Certains électeurs ont voté pour M. Hikmat Dib afin d’exprimer ce ras-le-bol. D’autres se sont tout simplement abstenus pour exprimer ce même sentiment. Pour eux, les élections ne constituent nullement une priorité dans leur vie quotidienne. Dans les circonstances présentes, leurs priorités sont plutôt d’ordre socio-économique, plus particulièrement en cette période de rentrée scolaire. Ce désenchantement s’explique sans doute par le fait que beaucoup de promesses ont été faites sur ce plan mais qu’elles n’ont jamais été tenues. »
Au-delà du facteur relatif au taux de participation, comment M. Hélou perçoit-il le report des voix par communauté, sachant qu’il a obtenu plus de 80 pour cent des voix druzes et chiites, alors que le candidat « aouniste », Hikmat Dib, a obtenu, en moyenne, plus de 70 pour cent des voix chrétiennes ? « J’ai été élu, et à ce titre, je représente toute la région, dans toute sa diversité », souligne le nouveau député.

Des alliances au cas par cas
Les circonstances dans lesquelles s’est déroulé ce scrutin du 14 septembre sont, sans nul doute, conjoncturelles et les résultats – sur le plan strictement qualitatif – constituent, à ce titre, une donne qui peut radicalement changer et évoluer en fonction de la situation. Maintenant que les dés ont été jetés, comment le nouveau député de Baabda-Aley se positionne-t-il sur l’échiquier local ? « Ce que je voudrais pour l’instant, c’est garder, autant que possible, mon indépendance, précise M. Hélou. Il faut attendre un peu l’avenir pour déterminer mes alliances. Je coopérerais avec certains partis ou blocs, au cas par cas, suivant les projets concernés. En tout état de cause, j’ai un objectif primordial qui est de défendre les intérêts de la région de Baabda et de Aley. »
« J’ai déjà vécu les problèmes auxquels est confrontée cette région, poursuit M. Hélou. Ma priorité ira donc au retour des déplacés, aux questions d’ordre socio-économique et aux failles qui se manifestent au niveau du développement dans les cazas de Baabda et de Aley. Tels seront les principaux dossiers que je soulèverai en tant que député. Pour atteindre mes objectifs dans ces domaines, j’aurai sans doute des alliances, au cas par cas, avec différentes parties. » Pour l’heure, M. Hélou n’envisage donc pas d’ahérer à un bloc parlementaire précis. Il souligne, toutefois, qu’il n’est pas « très loin » des thèses du Rassemblement de Kornet Chehwane et précise qu’il est encore prématuré d’envisager son adhésion au nouveau groupement d’opposition que son père avait décidé de rejoindre et qui comprend Mme Nayla Moawad et MM. Hussein Husseini, Sélim Hoss, Omar Karamé, Boutros Harb et Albert Mansour. « J’avais participé aux premiers contacts de mon père avec M. Hussein Husseini, mais maintenant, en ce qui me concerne, on verra comment les choses évolueront », indique M. Hélou.
Au plan national, quelle serait la ligne directrice de la conduite politique du nouveau député ? « À mon sens, il faudrait, au stade actuel, axer notre action sur le dossier de la réforme administrative, souligne M. Hélou. Il est impératif d’éradiquer la corruption et d’aller jusqu’au bout sur ce plan afin de mettre en place, enfin, des institutions étatiques édifiées sur les principes d’intégrité et de compétence. »
En ce qui concerne les grands dossiers nationaux en rapport, à titre d’exemple, avec les relations libano-syriennes, le rétablissement de la souveraineté et de l’indépendance nationales, l’équilibre au niveau du pouvoir, ou encore la loi électorale, M. Hélou affirme d’entrée de jeu qu’il alignera sur ce plan sa position sur celle de Bkerké. « J’adhère à cet égard aux idées du patriarche, précise-t-il. J’estime à ce sujet que tous les problèmes doivent être réglés par le dialogue constructif, comme le souligne le patriarche. »

La situation des jeunes
Abordant la question de la fuite des cerveaux et la situation des jeunes, M. Hélou tire la sonnette d’alarme, mettant en garde contre les retombées de l’hémorragie qui touche le pays au niveau des compétences. Il expose à ce propos une vision globale et approfondie du dossier. « Nous sommes en train de perdre nos cerveaux, et nos cadres hautement qualifiés sont embauchés un peu partout dans le monde, déclare M. Hélou. Nous avons une dette publique de 35 milliards de dollars et une partie de ces fonds a été dilapidée, mal gérée. Ces montants dilapidés auraient pu être utilisés dans des projets visant à développer les secteurs productifs, ce qui aurait eu pour effet de créer des emplois et, donc, de juguler et limiter la fuite des cerveaux et l’émigration des jeunes. »
Dans le contexte présent, M. Hélou presse les jeunes à participer activement à la vie politique car s’ils désirent un changement, c’est dans le cadre des institutions qu’il devrait se faire, souligne-t-il, parallèlement à une action qui pourrait être entreprise au niveau de la société civile et des organisations non gouvernementales (ONG). « Je suis avec les jeunes lorsqu’ils expriment leur volonté de changement, indique-t-il, mais j’insiste sur le fait qu’il devrait se faire dans le cadre des institutions, d’où l’importance de la participation à la vie politique. »
M. Hélou admet à ce propos que beaucoup de jeunes ont voté pour M. Hikmat Dib, précisément pour exprimer cette soif de changement. Quel message le nouveau député pourrait-il adresser à ces jeunes, et d’une manière générale à tous ceux qui ont voté pour le candidat « aouniste » ? « Je voudrais d’abord souligner que beaucoup de ceux qui ont voté pour Hikmat Dib ne me connaissent pas, déclare M. Hélou. Mon message est que j’espère qu’ils pourront à l’avenir me rencontrer un peu partout pour réaliser que, finalement, j’ai des idées très proches des leurs, notamment pour ce qui a trait à la volonté d’édifier un Liban sur des bases saines et rationnelles. Durant cette campagne, on m’a souvent qualifié de candidat du pouvoir, ce qui est contraire à la réalité. Je saurai faire preuve de fermeté et de détermination pour contrer tout projet susceptible de porter préjudice aux intérêts de notre région. » M. Hélou affiche dans ce cadre sa foi inébranlable dans le dialogue avec les jeunes. « J’espère qu’ils apprendront à me connaître », souligne-t-il.
Le nouveau député de Baabda-Aley entame ainsi une carrière politique prometteuse. Une carrière qu’il espère longue, car, contrairement à certaines rumeurs, il n’a nullement l’intention de se contenter d’un bref passage dans l’hémicycle et d’abandonner ensuite la partie en 2005.
Michel TOUMA
Il a fait son entrée dans l’arène politique de façon précipitée et sa campagne électorale s’est déroulée au pas de charge. Aucun indice ne permettait en effet de présager la subite disparition de Pierre Hélou. Du coup, Henri Hélou s’est trouvé pris, du jour au lendemain, dans le tourbillon des manœuvres et des calculs politiques tournant autour de sa personne....