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Redressement - Polémique sur les défaillances du pouvoir Le domaine économique de nouveau miné par les tensions politiques

Une nouvelle fois, la politique mord sur l’économie nationale, et la mord au flanc. Une polémique éclate entre les tenants du pouvoir au sujet du blocage de différents programmes comme des engagements pris à Paris II. Le président Hariri a lancé de la sorte des critiques acerbes, sur fond économique, en affirmant que des projets d’un montant global de deux milliards de dollars sont suspendus à cause de considérations politiques. Dans son speech d’ouverture du congrès organisé par Confex en collaboration avec les organismes économiques, Hariri a affirmé que les comptes exigés du gouvernement à propos de Paris II ne sont pas à leur place. Dans ce sens que le dossier des engagements non tenus relève de la responsabilité de tous les dirigeants étatiques et non du seul cabinet. Autrement dit que le dérapage, sinon la faute, est commun. Le Premier ministre répondait aux observations d’Adnane Kassar qui venait de souligner que, sept mois après la conférence de sauvetage, le gouvernement libanais n’avait toujours pas honoré ses promesses.
Le président de la Fédération des Chambres de commerce, d’industrie et d’agriculture soulignait que ce manquement à la parole donnée affectait sérieusement les relations extérieures économiques du Liban. Laissant ainsi entendre que le déficit s’inscrit en termes de crédibilité et de confiance, éléments essentiels pour les échanges comme pour les assistances. Kassar a évoqué le document de travail publié par les organismes économiques en date du 20 juin 2002, mémorandum qui insistait sur la nécessité d’une entente politique pour mettre l’économie à l’abri des secousses. À la même occasion, les professionnels réclamaient une réforme approfondie du secteur public, l’arrêt du gaspillage, le recouvrement des dus étatiques, la mise en chantier des privatisations, aux fins d’attirer les investisseurs arabes ou étrangers.
Quoi qu’il en soit, la réplique défensive et extensive de Hariri ripostant à Kassar a provoqué une vive controverse dans les cercles concernés. Certains donnent tort au président du Conseil, en relevant qu’aux termes de la Constitution, c’est bien le gouvernement, et lui seul, qui reste responsable de toute non-exécution d’engagements pris à l’égard de parties extérieures. Ce qui revient à dire que c’est le gouvernement qui est responsable du blocage des projets.
Mais d’autres rappellent que Hariri, qui avait voulu prendre en charge, et en exclusivité, le dossier économico-financier s’était vu rétorquer que la responsabilité devait être commune, étendue à tous les rouages du pouvoir. Ce n’est pas lui qui l’a voulu, et il n’invente donc rien quand il souligne que l’on n’a pas laissé au gouvernement le soin d’assumer seul les décisions et la tâche. On avait en effet demandé à Hariri d’en référer en premier lieu au Conseil des ministres, en soumettant à cette instance un plan de redressement détaillé. Il s’était exécuté, son programme avait été dûment approuvé. Mais il s’était heurté par la suite à des entraves découlant des tiraillements politiques divers ainsi que de ses propres querelles avec le régime. Autant dire, ajoutent ces sources, qu’on lui avait mis des bâtons dans les roues.
Sur le plan factuel, le ministre des Finances, Fouad Siniora, indique que les engagements pris à Paris II qui n’ont toujours pas reçu un début d’exécution sont nombreux. Il cite la compression des dépenses, le réexamen à la baisse des crédits alloués aux contractuels, le sabrage des indemnités de licenciement ou de fin de service. Ce qui représente quelque 1 000 milliards de LL, contre 300 milliards dans les années quatre-vingt-dix. Il y a également la saignée des frais publics de santé ou d’enseignement, qui s’élèvent à l’équivalent de 12 % du produit intérieur. Il y a ensuite le rendement des administrations par l’augmentation de l’horaire officiel. Puis Siniora rappelle que le projet de loi concernant le service de la TVA se trouve depuis huit mois dans les tiroirs de la Chambre. Il précise enfin que la réforme fiscale impliquant un impôt sur le revenu unifié reste lettre morte, comme d’autres chapitres à caractère financier.
Ce tableau doit être exposé sous peu à une délégation internationale attendue à Beyrouth. Et qui se verra confirmer que ni les privatisations ni la titrisation, qui devraient permettre la réduction d’une dette publique frisant désormais les 35 milliards de dollars, n’ont été mises en chantier. S’y ajoute le problème de la baisse des taux d’intérêts, qui n’a pas englobé les emprunts débiteurs, ce qui a porté le secteur privé à protester, car le coût de l’argent rogne ses capacités de concurrence face à l’étranger. De son côté, la Banque centrale s’est vue contrainte à émettre des certificats de dépôt à 12,32 % d’intérêt, initiative susceptible de faire rebondir à la hausse les taux. À un moment où la situation régionale réfrène les investisseurs, ainsi que les entreprises qui seraient intéressées par d’éventuelles privatisations libanaises. De même, l’allégement présumé du déficit budgétaire est en train de s’évaporer. Alors que ces questions même font partie du contentieux qui oppose les présidents. Ce qui risque de faire reculer les donateurs qui ont promis quelque 3 milliard d’aide diversifiée au Liban.
Dans ce contexte, la nouvelle polémique sur le partage des responsabilités apparaît comme une aberration de plus. Car les Libanais, en butte à des difficultés croissantes, se soucient peu de savoir qui est en faute et qui est blanc comme neige. Ils veulent du travail, du rendement, par la grâce d’une normalisation des relations entre gens du pouvoir. C’est un même souhait que Vincent Battle exprime implicitement quand il souligne, après une entrevue avec Hariri, que la communauté internationale tient beaucoup à voir le Liban honorer les engagements pris, pour son propre bien, à Paris. De leur côté, les organismes économiques suggèrent que l’on dénoue l’écheveau à travers une séance du Conseil des ministres qui serait consacrée aux moyens à mettre en œuvre pour gommer le blocage actuel.
Émile KHOURY
Une nouvelle fois, la politique mord sur l’économie nationale, et la mord au flanc. Une polémique éclate entre les tenants du pouvoir au sujet du blocage de différents programmes comme des engagements pris à Paris II. Le président Hariri a lancé de la sorte des critiques acerbes, sur fond économique, en affirmant que des projets d’un montant global de deux milliards de...