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EXÉCUTIF - Un seul moment de tension et une commission pour ne pas changer les habitudes L’harmonie, du moins en façade, toujours de mise au Conseil des ministres

L’ordre du jour était sans doute banal, mais la situation, elle, l’était un peu moins. Pour la première fois depuis la formation de ce gouvernement, M. Rafic Harriri présidait la séance du Conseil des ministres. C’est d’ailleurs la raison essentielle du choix de l’ordre du jour de ce rendez-vous, qui se voulait essentiellement consensuel pour éviter un clash ultérieur avec le chef de l’État, en visite privée en France.

Pure coïncidence ou fait exprès, la plupart des ministres proches du président Lahoud se sont absentés de la séance, notamment MM. Issam Farès, Élias Murr et Jean-Louis Cardahi. M. Karim Pakradouni s’est donc retrouvé presque tout seul face « à l’autre camp », dans une atmosphère toutefois détendue et bon enfant, qui n’a connu qu’un seul moment de tension, lors de l’évocation de l’attentat contre la voiture du PDG de la Cité sportive, M. Riad Cheikh.
Tout avait d’ailleurs été fait pour que la séance se passe sans accrocs majeurs. Elle avait été précédée d’un climat général qui se voulait rassurant. Ce n’était pas un hasard si à la veille du Conseil des ministres, M. Rafic Hariri avait été reçu à la table du chef des SR syriens au Liban, le général Rustom Ghazalé. Si certains observateurs critiquent l’importance donnée à cette rencontre, le général Ghazalé étant en contact permanent avec la classe politique, d’autres y voient le signe évident de l’état des relations du Premier ministre avec les autorités syriennes, une rencontre avec le chef des SR devenant ainsi un événement en soi. Toujours est-il que le message était clair : l’heure est à l’harmonie, du moins en façade.

Deux questions
du ministre de l’Économie
La séance du Conseil des ministres s’est donc ouverte dans une ambiance calme, et c’est le ministre de l’Économie, M. Marwan Hamadé, qui a ouvert le débat en posant deux questions au président du Conseil. « La semaine prochaine, le gouvernement devra répondre au Parlement à deux questions qui lui ont été posées. Que comptez-vous dire à M. Akram Chéhayeb, qui a soulevé le problème du ramassage des ordures par la société Sukleen, et à M. Nicolas Fattocuhe, qui a évoqué le dossier des carrières et le blocage par un magistrat d’une décision de justice ? »
M. Rafic Hariri a alors pris la parole, profitant de l’occasion pour faire une petite introduction sur l’action du gouvernement et l’exigence de productivité. Le président du Conseil a aussi déclaré que le ministre de la Justice, M. Bahige Tabbarah, préparera la réponse à M. Fattouche, puisqu’il s’agit d’un problème qui touche à ce domaine. Quant au dossier du ramassage des ordures (qui avait d’abord été évoqué par M. Walid Joumblatt avant d’être repris par M. Chéhayeb), la position du gouvernement est claire : si l’État a choisi de signer le contrat avec la compagnie Sukleen, c’est parce qu’elle a été la seule à répondre à l’appel d’offres. Le contrat a été signé pour cinq ans, mais il peut être résilié, à condition de donner six mois de préavis à la compagnie.
Le président du Conseil a ensuite évoqué le dossier de la banque al Madina, qui n’en finit plus de faire la une de la presse, et il a affirmé que cette question sera traitée par le Conseil supérieur bancaire. Autrement dit, qu’elle relève de la responsabilité du gouverneur de la Banque centrale, M. Riad Salamé. Le ministre des Finances, M. Fouad Siniora, a approuvé et le Conseil des ministres est passé à l’examen de l’ordre du jour.

Pour une « charte
des piétons »
Comme il s’agissait de points de pure routine, les décisions ont été rapidement prises. Mais le président du Conseil a expliqué qu’il souhaitait regrouper trois points afin de les soumettre ensemble au vote du Conseil des ministres. Il s’agit du mazout vert, des transports publics (déféré devant une commission spéciale présidée par M. Issam Farès) et des minibus.
Pour ne pas rompre avec ce qui est devenu une habitude en Conseil des ministres, une commission a été formée pour étudier la structure et l’organigramme du ministère de la Jeunesse et des Sports. Après tant d’années, l’initiative est louable. La commission est évidemment présidée par le vice-président du Conseil, M. Issam Farès, et elle a pour membres MM. Sébouh Hovnanian, Bahige Tabbarah, Karim Pakradouni, Fouad Siniora, Abdallah Farhat et Ali Hassan Khalil. Une petite discussion a opposé MM. Bahige Tabbarah et Karim Pakradouni, lorsqu’il a été question d’une proposition du député membre du bloc Hariri, M. Mohammed Kabbani, d’adopter une sorte de « déclaration des droits des piétons », qui serait intégrée au nouveau code de la route. Le ministre de la Justice aurait attiré l’attention des présents sur la responsabilité de l’État, qu’une telle démarche entraînerait. Il a longuement expliqué que si les droits des piétons sont intégrés au code de la route, un citoyen qui trébuche dans la rue, faute de l’existence d’un trottoir, pourrait porter plainte contre l’État et lui réclamer des dommages et intérêts. M. Siniora a aussitôt rejeté l’idée, et il a été finalement convenu de charger M. Pakradouni de préparer avec M. Kabbani, une « charte des piétons », à l’instar de la « charte du citoyen », qui, d’ailleurs, est probablement appelée à connaître le même sort : l’oubli.
Ce petit échange n’a toutefois pas réussi à jeter un froid sur l’atmosphère générale au sein du Conseil des ministres. Le seul moment de tension a eu lieu lorsque le Premier ministre a évoqué l’attentat à l’explosif contre la voiture du nouveau PDG de la Cité sportive, M. Riad Cheikh. M. Hariri aurait relevé à ce moment-là l’absence du ministre de l’Intérieur, M. Élias Murr, retenu par des réunions avec son homologue autrichien, actuellement en visite à Beyrouth. Le Premier ministre se serait alors demandé si cette agression ne serait pas liée au rapport établi par M. Cheikh, critiquant la maintenance à la Cité. M. Hovnanian aurait alors protesté, affirmant que si la société en charge de la maintenance à la Cité sportive fait mal son travail, c’est parce qu’on ne lui paie pas ses frais. Le ministre des Finances aurait à son tour protesté, et M. Hariri aurait fait état de menaces reçues par M. Cheikh. « Il faut mener une enquête. Ces agressions sont inadmissibles », aurait-il déclaré. Mais l’affaire en est restée là, le baromètre politique restant au beau fixe. Les orages, ce sera pour plus tard.

Scarlett HADDAD
L’ordre du jour était sans doute banal, mais la situation, elle, l’était un peu moins. Pour la première fois depuis la formation de ce gouvernement, M. Rafic Harriri présidait la séance du Conseil des ministres. C’est d’ailleurs la raison essentielle du choix de l’ordre du jour de ce rendez-vous, qui se voulait essentiellement consensuel pour éviter un clash ultérieur...