En ce qui concerne la première question, il semble bien que oui (voir L’Orient-Le Jour du vendredi 20 juin), surtout depuis quatre ou cinq jours. Qu’un deuxième redéploiement des forces syriennes, après celui de février, soit, selon une source de l’opposition, « imminent ». Il y a une dizaine de jours, un haut responsable militaro-sécuritaire syrien avait commencé par donner des premières indications en ce sens. Bahjat Sleimane avait évoqué une éventualité de redéploiement – de retrait total, même –, tout en insinuant (d’une façon totalement malvenue) que les Libanais rappelleront bien vite les Syriens au secours. D’autant plus que Damas ne se prive pas de confondre, depuis de nombreuses semaines, le territoire libanais avec un no man’s land où l’on peut entasser, pour amadouer un secrétaire d’État US de plus en plus menaçant, les membres du Hamas ou du Jihad islamique. En ne comprenant pas – et c’est bien là une faute particulièrement grave – que faire du Liban une nouvelle Somalie n’arrangerait en rien ses affaires, économiques surtout.
Les assertions péremptoires de Bahjat Sleimane ayant été précédées, le 25 mai dernier, des bonnes notes (l’armée libanaise est désormais opérationnelle, idem pour les institutions civiles ou la société...) administrées aux autorités libanaises par le président syrien, Bachar el-Assad, ce redéploiement « imminent » serait, pour la première fois, « visible ». Que les Libanais, les Américains, les Européens – tout le monde – verraient d’impressionnantes colonnes de chars et autres véhicules armés prendre bien ostentatoirement la route de Damas.
Que Colin Powell verrait aussi, surtout. Ce dernier pourrait d’ailleurs assister, aussi, à un retrait total, que certains prévoient début 2004, que d’autres, plus pressés, ou plus introduits, estiment qu’il pourrait avoir lieu début décembre, voire même en septembre. Lequel septembre serait le deadline fixé par les superpuissants pour achever de tester la « feuille de route » israélo-palestinienne, et en commencer une autre, directement liée à Beyrouth et à Damas celle-là. Et Damas, selon des observateurs particulièrement attentifs, aurait plus que compris l’irréversibilité de cette date butoir.
Mais tout cela ne reste que pures supputations. Parce que tout le monde connaît la versatilité, l’inconstance et le cynisme américains. Parce que tout le monde sait qu’un retrait total, du Liban, des forces de Damas peut être une façon pour la Syrie d’ôter – provisoirement – une carte de pression à Washington. Sans diminuer le moins du monde l’annexion de la libre décision et de la ligne politique libanaises. Washington – qui reste déterminé à désarmer le Hezbollah et à voir l’armée libanaise le long de la ligne bleue – aura alors tout le loisir de décider si cette option – retrait mais influence qui perdure – signifie la fin de ce que les États-Unis ont appelé, eux, l’« occupation » du Liban.
Encore faut-il d’abord, pour que ce redéploiement ou ce retrait total ne soient pas simple poudre aux yeux, que les dirigeants libanais cessent d’être plus Syriens que les plus Syriens des Syriens. Et comprennent l’utilité d’une relation privilégiée certes, mais impérativement équilibrée.
Ziyad MAKHOUL
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