Rechercher
Rechercher

Actualités

Bavardage

– Mais qu’est-ce qu’il me racontait le cousin hier ? Ah oui, rien, une bricole. Il rêve d’un chat qui miaule. Parce que par une nuit sans lune, en bas dans le jardin, on lui a tué quelques-uns de ses chats. À la grenaille. Un matou a survécu, l’épaule fracassée. Qu’est-ce qu’on fait dans ces cas-là, faudra demander au veto... Il y en a qui trucident leur belle-mère, mais ça peut parfois se comprendre. Tandis que martyriser des enfants, ou se payer d’innocentes bestioles, reste un acte gratuit, psychotique et néanmoins barbare. – S’attaquer aux animaux sans défense est d’ailleurs un sport pour ainsi dire national. Comme nous sommes un peuple commerçant, c’est dans les boutiques qu’il se pratique le mieux. Brave bête, j’ouvre un bouquin english, une biographie bizarre de Jules Renard. Sur papier recyclé, ça doit être bon marché. Sur la page de garde, il reste imprimé en biais Four Pounds. On n’est pas changeur, on vous les fait à six dollars grosso modo. J’imagine donc que je vais me fendre de dix bucks. Bernique, c’est 30 que le jeune vendeur me réclame. Ce garçon, dont le père est un ami, prétend de plus qu’il me fait un prix du même nom. Et qu’il me concède une ristourne coquette de 40 % ! Sans avoir à en référer à sa direction. C’est dire la marge que tous ces pirates-là, ensemble, se réservent. – Je garde mes sous. Plus bas dans la rue, un fourre-tout alimentaire. Je me prends du thon de bon ton à 1 500 livres. Et j’avise un boîte de même format, des saletés pour chat que je vais offrir au rescapé du cousin. Mais je me ravise : on m’en demande 6 000 LL ! Plutôt que de panser les plaies du félidé, je préfère remplir ma propre panse. Il fait chaud, je m’achète une glace. Pour m’y regarder, l’air dubitatif et penaud. – Toujours pendant cette promenade, je note que les cafés sont bondés. C’est jour férié, mais triste en principe : on célèbre la mémoire des martyrs. Comme en d’autres circonstances similaires, la fête des morts par exemple, les gens s’amusent bien. Les télés ne sont pas en reste. Elles se rabattent, in memoriam, sur le premier classique venu. Et le premier en classique, c’est Beethov. Alors, pour le deuil, on a droit en boucle à L’Hymne à la joie à longueur de journée. Certes, mieux vaut entendre ça qu’être sourd. Mais comme digestif consolateur, quand on ravale ses larmes en pensant aux amis perdus, c’est plutôt lourd. J.I.
– Mais qu’est-ce qu’il me racontait le cousin hier ? Ah oui, rien, une bricole. Il rêve d’un chat qui miaule. Parce que par une nuit sans lune, en bas dans le jardin, on lui a tué quelques-uns de ses chats. À la grenaille. Un matou a survécu, l’épaule fracassée. Qu’est-ce qu’on fait dans ces cas-là, faudra demander au veto... Il y en a qui trucident leur...