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VIE POLITIQUE - La déclaration ministérielle approuvée en Conseil des ministres Frangié accuse et Lahoud réplique vertement(photo)

Mauvais démarrage pour le gouvernement, qui, réuni hier afin d’examiner et d’approuver la déclaration ministérielle sur base de laquelle il devra obtenir la confiance de la Chambre, la semaine prochaine, a clôturé sa séance sur des grincements de dents. En dépit d’un discours conciliant du Premier ministre, Rafic Hariri, qui a notamment appelé à l’ouverture d’une nouvelle page, au niveau de l’action de l’Exécutif, le ministre de la Santé, Sleiman Frangié, n’a pas pu s’empêcher d’accuser les chefs de l’État et du gouvernement d’avoir, à cause de leurs querelles, paralysé l’action de l’ancien cabinet et de déplorer le fait que la composition de la nouvelle équipe soit le fruit d’un partage des parts entre les pôles du pouvoir. Il s’est attiré une vive réponse du chef de l’État, le général Émile Lahoud, qui a frappé du poing sur la table de conférences avant de lever la séance et de sortir en trombe de la pièce. Jusqu’à ce que M. Hariri évoque le thème de la solidarité gouvernementale, la réunion se déroulait à merveille. La réunion du Conseil des ministres a eu lieu dans la matinée, le chef du gouvernement Rafic Hariri devant prendre l’avion dans l’après-midi pour Paris. Présidée par le général Lahoud, elle a essentiellement porté sur l’examen de la déclaration ministérielle et, dans une moindre mesure, sur le dossier de la téléphonie mobile. Ministre d’État, M. Talal Arslan a boycotté la séance, qui s’est déroulée en l’absence du vice-président du Conseil, Issam Farès -ce dernier avait adressé, par écrit, ses remarques sur le texte avant son voyage- et des ministres Sébouh Hovnanian et Najib Mikati. Le texte a été modifié conformément aux remarques formulées sur sa teneur par les chefs de l’État et du gouvernement, ainsi que par un certain nombre de ministres. Quelques amendements seulement y ont été introduits. À la demande du président de la République et de M. Karim Pakradouni, ministre d’État pour le Développement administratif, un article soulignant l’engagement du gouvernement à mettre en application le projet de médiateur de la République a été ajouté au document. Un vif échange En sortant de la salle de réunions, un des ministres, sollicité par la presse, devait qualifier M. Frangié de « héros », mais sans donner davantage de précisions. L’intéressé non plus n’a pas voulu en dire plus : « Je n’ai rien à dire. Rien ne s’est passé au cours de la réunion ». Idem pour M. Hariri et le ministre Ali Hassan Khalil. Aucun d’eux n’a voulu satisfaire la curiosité des journalistes, se contentant de répéter : « Le ministre Frangié est toujours un héros ». Un ministre devait finalement vendre la mèche : il est apparu que M. Frangié a fait, au cours de la réunion, une intervention-critique des pratiques du pouvoir qui a été très mal accueillie par le chef de l’État. Tout a donc commencé quand, après l’approbation de la déclaration ministérielle, M. Hariri a pris la parole pour commenter les critiques de certains ministres concernant la répartition des portefeuilles. Réaffirmant que l’ancien gouvernement s’était autoaffaibli et marginalisé à cause des griefs que des anciens ministres formulaient dans des déclarations publiques, il s’est dit disposé à coopérer avec tous les membres de son équipe, s’ils font montre de sérieux dans le travail. M. Hariri a ensuite mis l’accent sur la nécessité de l’homogénéité de la nouvelle équipe et a proposé, en soulignant que ce sont les actes et non pas les vœux pieux qui intéressent l’opinion publique, que le Conseil des ministres examine et tranche successivement les dossiers restés en suspens sous le mandat de l’ancien cabinet, « ce qui donnera la preuve d’un changement et montrera que le nouveau gouvernement ne s’inscrit pas dans le prolongement du précédent ». « L’important est que le cabinet travaille sérieusement pour débloquer les dossiers gelés et qu’il adopte des décisions à chaque Conseil des ministres. C’est de la sorte qu’il gagnera rapidement en crédibilité », a-t-il ajouté. M. Hariri a invité les ministres à travailler « comme un seul homme, de manière positive et à s’abstenir de provoquer des tensions, ce qui nous porte préjudice plus que le tort que nous causent l’opposition et les pressions extérieures exercées » sur le Liban. Apparemment piqué au vif par les remarques du Premier ministre sur l’ancien cabinet, M. Frangié s’est empressé d’intervenir pour relever que « le problème n’est pas dans la solidarité de l’équipe ministérielle, mais dans la configuration du gouvernement ». Affirmant qu’il n’est guère satisfait de la structure du nouveau cabinet, il a estimé que M. Hariri et plusieurs ministres ne sont pas non plus contents. « Mais nous restons parce que notre présence revêt un caractère politique et non pas ministériel », a-t-il poursuivi. Il s’est dépêché de préciser que le problème n’est pas les ministres, « mais la façon avec laquelle la composition du nouveau cabinet a été annoncée, telle que nous l’avons apprise par les médias ». « Nous avons découvert, a-t-il expliqué, que les chefs de l’État, du Parlement et du gouvernement ont chacun eu sa part. C’est le cas d’ailleurs depuis 1990. Nous venons aux réunions du Conseil des ministres et si notre point de vue converge avec celui du chef de l’État, le Premier ministre est irrité. Si au contraire, nous sommes du même avis que le chef du gouvernement, c’est le président de la République qui le prend mal. Sans compter que des ministres adoptent des positions conformément à la ligne politique qu’ils représentent, du moment qu’ils ont été nommés en fonction d’un partage de parts ». Pour lui, le problème se pose à ce niveau. « Si nous voulons que le gouvernement puisse assumer ses responsabilités, il faut adopter un règlement intérieur du Conseil des ministres pour que cette institution puisse assumer son rôle, tel qu’il a été prévu par l’accord de Taëf, et que les ministres puissent formuler leur opinion en toute indépendance. Aujourd’hui, nous ne sommes que le fruit d’un partage de parts. Nous ne sommes que des parts. Chacun de nous est une part. Les gouvernements changent sur le plan de la forme, mais le fond reste le même », a-t-il insisté. « Le problème se posait-il donc au niveau des ministres qui sont partis ou des objectifs qui sont fixés ? Le problème, messieurs, est dans la façon dont les gouvernements sont formés, parce qu’elle est fausse, et ce n’est pas nous qui assumons la responsabilité (les défaillances du cabinet). Le problème se pose à votre niveau, Excellences », a lâché M. Frangié, en s’adressant directement au général Lahoud et à M. Hariri. Lahoud frappe du poing C’en était trop pour le chef de l’État, qui a frappé du poing sur la table de conférences en affirmant qu’il ne tolère pas ce genre de propos, qu’il a qualifiés d’« inacceptables ». « Je dois vous le préciser une fois pour toutes : je défie quinconque de dire que lorsque la question d’un changement du gouvernement a été abordée, j’ai demandé à avoir tel ou tel autre ministre au sein du cabinet », a-t-il déclaré en s’adressant aux personnes présentes. « Mes prises de position n’ont jamais changé. Ne m’attribuez pas des choses auxquelles vous êtes vous-mêmes habitués. Je vous assure que si nous voulons œuvrer pour le salut du pays, nous devons nous élever au-dessus des intérêts personnels et privilégier l’intérêt public, sinon nous n’arriverons nulle part. Nous sommes en présence d’un nouveau cabinet. Quelles que soient les considérations (qui justifient les propos de M. Frangié), il n’est pas permis de faire endosser les responsabilités à tel dirigeant ou à tel ministre. Chaque membre du gouvernement doit accomplir son devoir, se rendre au ministère et assumer se responsabilités », a-t-il soutenu. Après avoir invité les ministres à agir comme un seul homme, le général Lahoud a estimé qu’il ne faut pas se laisser influencer par les rumeurs ou les analyses de presse. « Si nous collaborons ensemble, nous pourrons édifier notre État, mais si chacun s’emploie à faire de la surenchère et à se lancer dans des actes héroïques fictifs, nous ne pourrons pas assurer l’intérêt du pays », a-t-il noté. Le président de la République a ajouté : « Chaque jour, des informations selon lesquelles j’aurai désigné tel ou tel ministre sont filtrées à la presse. mais est-ce moi qui a nommé Issam Farès vice-président du Conseil ? Est-ce moi qui a voulu Farès Boueiz ou Jean-Louis Cardahi ? Je vous assure que je ne me suis déclaré en faveur de personne. La composition du gouvernement m’a été présentée et je me suis contenté de l’approuver. C’est tout ce que j’ai voulu vous dire. J’espère que vous prendrez mes paroles au sérieux. Il n’est pas permis que vous contribuiez à l’échec de ce cabinet à cause des prises de position ou d’un héroïsme quelconque. Il n’est pas permis de démarrer par un faux pas. Il était peut-être utile d’entendre ces propos (de M. Frangié) pour exposer clairement notre position », a-t-il conclu avant de lever immédiatement la séance et de sortir en trombe. D’autres membres du gouvernement l’ont suivi. Seul M. Hariri est resté dans la salle de réunion pour discuter avec M. Sleiman Frangié, en présence de MM. Fouad Siniora, Jean Obeid, Bahige Tabbarah, Farès Boueiz, Assaad Hardane, Ali Hassan Khalil et Samir Jisr, et tenter de calmer le jeu. De sources ministérielles, on a également indiqué que le chef de l’État a été surpris par le ton de M. Frangié, d’autant que la réunion était calme et que le discours du chef du gouvernement allait dans le sens d’un apaisement. Et si le général Lahoud a préféré sortir précipitamment de la salle de réunions, au terme de son intervention, c’est pour barrer la route à un éventuel débat, a-t-on précisé.
Mauvais démarrage pour le gouvernement, qui, réuni hier afin d’examiner et d’approuver la déclaration ministérielle sur base de laquelle il devra obtenir la confiance de la Chambre, la semaine prochaine, a clôturé sa séance sur des grincements de dents. En dépit d’un discours conciliant du Premier ministre, Rafic Hariri, qui a notamment appelé à l’ouverture d’une...