Un magot démago

« El Pueblo unido, jamas sera vincido. » Hymne hispanique. Le peuple, verbe magique. Fondateur de toute politique. En même temps, magma nébuleux. Et slogan creux. Vox populi, vox Dei. On le déifie. On veut que sa volonté soit faite. Sur la terre. Souvent, un filon prodigieux d’attrape-nigaud planétaire. Qu’exploite à fond la politicaille. Écoutons-la aujourd’hui qui braille. Combien elle veut le bien. Du peuple irakien. Qui se cherche, dans des convulsions post-guerrières que certains attisent en sous-main. Quelle démocratie, demain ? Les kurdes, les chiites, les sunnites, un zeste de chrétiens, les religieux, les progressistes, les pro-Occidentaux, les radicaux, les modérés chez les uns ou les autres. Dans un climat de revanche, de vengeance, d’appétit de pouvoir, déjà ponctué d’assassinats. Et ce n’est pas l’occupant, honni par tant et tant, qui peut calmer le jeu. Le peuple ? Deux cents figurants hurleurs, huit caméras bien placées et les metteurs en scène vous montrent un effet de foule saisissant. Tandis qu’à côté on souffre, on a faim, on a soif, on tremble par habitude devant les puissants. * * * Et ici ? Mon cousin me souffle : « Chassez le naturel, il revient au galop. » C’est Destouches. Il en rajoute une louche : « Chacun a son défaut, où toujours il revient Honte ni peur n’y remédient. » Cela coule de source, c’est donc La Fontaine. Quelle honte, quelle peur, peuvent les retenir. Sortis par la porte, ils rentrent par la fenêtre. Coupables d’une permanente concussion, comme l’avouait naguère la troïka elle-même. Rien ne les arrête, surtout pas l’opinion. Qui ne peut même pas se mêler de ses oignons. Le peuple, c’est le bon peuple qui vous le dit à tout coin de rue, n’existe pas. N’existe plus, ou à peine. Il va, comme un perclus. Qui titube. Malgré sa béquille. Syrienne. J.I.