CRÉATION Le « groupe des Belges »... (photos)

Si Paris reste le plus célèbre des foyers de la mode, des centres de création sont en train de se développer dans plusieurs autres coins du monde. D’ailleurs il y a une telle fluidité dans les échanges et les créations que les correspondances entre visions et réalisations finissent par accuser des «parentés» très proches dans les tendances. Pendant très longtemps, le génie créateur était concentré à Paris. Aujourd’hui, si la Ville lumière reste le chef d’orchestre vénéré et incontestable, d’autres villes et lieux aussi montent au firmament de la création. C’est bien le cas pour la Belgique, dont les créateurs réussissent à faire distinguer leurs noms et leur talent au niveau international. Olivier Theyskens est le plus jeune d’entre eux. Très doué, il puise son inspiration dans le théâtre et l’histoire, le tout soumis à une technique très maîtrisée, même s’il a quitté l’école de la Chambre en deuxième année! Sa fougue et son instinct ne l’avaient pas trahi. Son talent dépassait effectivement ce niveau de la formation technique. Martin Margiela a été proche collaborateur de Jean-Paul Gaultier. En 1988, il fonde la maison Martin Margela et défile à Paris régulièrement depuis cette date. La maison Hermès lui confie son prêt-à-porter dont il revitalise le classicisme depuis 1997. Son talent dynamise le style de la grande maison, tout en respectant les points cardinaux de la griffe. Peinture métallisée sur un veston pieusement classique, taillé dans de la gabardine de laine. De longues robes noires, moulantes et sans manches, à porter avec des boots... An et Filip Vandevorst ont défilé à Paris pour la première fois en 1998. Depuis, ils poursuivent une brillante trajectoire. Leur devise? Émotion plus confort, le tout basé sur une impeccable architecture. Invention aussi, avec des cols et plastrons amovibles, des tabliers jupes, des coordinations inattendues et diverses... Véronique Leroy: assistante d’Alaïa, après une formation à l’Institut de Paris et de modélisme au Studio Bercot, elle travaillera aussi avec Martine Sitbon. Depuis 1997, elle s’autofinance, donnant libre cours à une créativité originale, mélangeant avec bonheur provocation et retenue, matières précieuses et étoffes inattendues. VOGUES ET COURANTS Les arts aussi ont leurs foyers de modes Au Convention Center de Miami, aux États-Unis, s’est tenue récemment une gigantesque exposition d’art contemporain. Aussi importante que la fameuse Art Basel, qui reflète régulièrement tous les courants artistiques actuels, cette gigantesque manifestation à l’échelle américaine a offert un extraordinaire aperçu de tous les courants ou presque de l’art contemporain. À l’instar des grands Salons de la mode, le public a vu défiler tout le gotha de l’art international, dans un tourbillon de visites de collections privées et d’animations diverses, faisant de cette exposition un événement inédit majeur, véritable festival artistique des temps actuels. Cet Art Basel, de son appellation officielle, a réuni à Miami Beach 160 artistes et marchands d’art célèbres, comme le font les Salons de l’habillement ou les festivals cinématographiques. Il semble que jamais le lancement d’une foire, artistique de surcroît, n’a suscité autant d’événements et d’enthousiasme. Pimenté savamment pour enflammer les esprits, ce «festival de l’esprit» inaugure une nouvelle approche de la promotion des arts. Dans l’intention, sans doute, de faire oublier la conjoncture politique angoissante, les États-Unis accordent à cette manifestation artistique la dimension d’un événement majeur. Voilà donc dans le domaine des modes une nouvelle façon de promouvoir les vogues artistiques, sans défilés, toutefois, ni présentation sur podium de nouveaux modèles... Lancée dans cette ville dont la situation stratégique de carrefour entre les deux Amériques la rend unique, pareille initiative soulève l’enthousiasme. D’autant plus que les tentatives amorcées à Palm Beach et à Chicago n’ont pas fait long feu. Sur le plan de l’évaluation artistique, la critique européenne estime que l’ensemble est certes de bon niveau. Meilleur toutefois chez les contemporains que chez les résolument modernes... MÉTIERS DE MODE Créateurs de chaussures Derrière une belle chaussure branchée, précieuse, irrésistible, il y a un artiste, créateur inspiré, que le public ignore. Artistes de l’ombre, ils sont souvent des créateurs dans le sens complet du terme. Dans cette tradition «bottière» se logent des talents devenus les icônes du métier: Roger Vivier, Manolo Blabnik, Christian Louboutin. Mais la créativité n’a pas tari après leur disparition. Aujourd’hui, Michel Perry, Bruno Frisoni, David Meyer, Carlos Puig Padilla sont de véritables célébrités de la chaussure chic. Spécialisés dans la création et l’exécution de chaussures féminines, sauf exception confirmant la règle, ils ne sont ni enfants du métier ni fils de lignées d’artisans «chausseurs». Ils n’ont même pas des attaches directes ou indirectes avec ce milieu. Il s’agit de passionnés, nés avec un intérêt et une sensibilité particulière pour la chaussure, comme d’autres pour la peinture ou la musique! Leur point commun serait que tous, sans exception, ont fait leur apprentissage chez des grands couturiers dans la grande diffusion ou le prêt-à-porter. Leur mot d’ordre commun? Hyperféminité, talons hauts, matières précieuses, nombre limité. Leurs prix? Entre 305 et 500 euros la paire. La réalisation des modèles, forcément très sophistiqués, nécessite le savoir-faire d’ateliers et de personnel haut de gamme. Les commandes ne sont jamais grosses. En fait, il s’agit d’artistes qui s’autofinancent, employant des artisans exceptionnels, véritables artistes du métier. Ce qui explique le prix élevé des produits finis. RUBRIQUE RÉALISÉE PAR Claire Gebeyli