Rechercher
Rechercher

Actualités - CHRONOLOGIE

Liban-Sud Retour de 297 libanais qui avaient fui en Israël (photo)

Tout le monde en parle. À la télévision, dans les salons, dans les cafés, dans la rue – la rue beyrouthine surtout. Tout le monde sait qui c’est. Le banquier, l’étudiant, le gardien de parking. Elle s’appelle Ghounwa Jalloul et le chiffre du 3 septembre dernier est éloquent. Ghounwa Jalloul a été élue à l’un des deux sièges sunnites de la troisième circonscription de Beyrouth – celle du président Sélim Hoss – avec le plus grand nombre de voix : 24 845. 24 845 électeurs qui ont certainement voté pour la liste de la Dignité dont elle faisait partie et que présidait l’ancien Premier ministre Rafic Hariri. 24 845 électeurs qui ont sans doute aussi plébiscité son engagement, son dynamisme, sa compétence, son implication, ses mots, sa jeunesse, son sourire. Qu’est-ce qui reste aujourd’hui, après la toute nouvelle donne du raz-de-marée Hariri, des convictions d’hier ? «Tout». Tout ? «Oh oui, tout». Voyons… D’État à État Le communiqué des évêques maronites a été à l’origine d’une réaction et de contre-réactions en chaîne de la part de l’ensemble de la classe politique libanaise. «Je ne veux pas répondre à ce communiqué». Tant mieux, c’est votre avis que l’on demande… «De par ma nature, je refuse la polémique, je n’ai pas d’avis à donner». C’est la première fois que vous refusez de répondre à l’une de nos questions, quelque chose a changé depuis la dernière fois… «Non. Vous savez, moi je défends la liberté d’expression. Un peuple a le droit de donner son avis dans le cadre bien défini des institutions constitutionnelles». Quel est le rapport entre la Constitution libanaise et le communiqué de Bkerké ? «Les relations syro-libanaises sont des relations d’État à État, et tant qu’il reste des institutions dans ce pays, c’est à elles de régler ce genre de dossiers». Donc selon vous, des partis, Bkerké ou Dar el-Fatwa par exemple n’ont pas à s’exprimer sur le sujet ? «Si, évidemment, mais dans le cadre des institutions qui traitent des rapports bilatéraux». Ça y est, Ghounwa Jalloul est lancée, elle veut en parler, des relations du Liban avec la Syrie, «et sans complaisance, je vous assure», elle en parle, elle s’étend… Pour elle, la paix avec Israël est encore loin d’être faite, il n’y a aucun accord, la situation régionale loin d’être assainie, et la présence syrienne au Liban légitime. «Dans tous les cas, personnellement, je ne comparerai jamais la présence syrienne à l’occupation israélienne, et je considère le Liban comme étant un pays indépendant». Indépendant ? «Le Liban agit et réagit en tant qu’État indépendant oui, en accord avec sa Constitution et ses rapports avec la Syrie, cette relation privilégiée, c’est l’affaire de deux États». Elle est brillante. Score : 1-0, balle au centre… Ça ne vous dérange pas de vous arrêter à un barrage étranger et que des soldats étrangers vous imposent leur volonté ? «Je ne les considère pas comme étrangers. Et puis si l’État et le président de la République en ont décidé ainsi, j’accepte, je suis citoyenne libanaise». Vous la partagez maintenant, la politique du général Lahoud ? C’est un scoop ! Et le rire fuse de nouveau, «j’ai de grands espoirs concernant le président de la République, surtout depuis qu’il défend l’État de droit et des institutions». Et le leitmotiv de Ghounwa Jalloul commence et ne s’arrêtera plus : «Lorsque je veux changer quelque chose, je le fais dans le cadre des institutions de l’État et après des concertations avec toutes les parties. Toutes». Vous allez la signer, la pétition parlementaire demandant l’abolition du confessionnalisme politique ? «Je ne l’ai pas lue…». Elle reprend l’article 95 de la Constitution. «Je suis d’accord avec ce principe, à condition qu’il soit soumis à un dialogue national entre toutes les parties». Vous ne signerez pas avant ? «Non, il faut qu’il y ait un accord interlibanais au préalable. Moi je suis prête, mais ça ne suffit pas !» Et si le président Hariri vous demandait de la signer, comme tous les membres de son bloc parlementaire ? «Le travail en équipe est mille fois plus important que le travail individuel, oui bien sûr, je le ferai». « Il ne m’a donné aucune cassette » Pourquoi cette impression que M. Hariri vous a donnée, à vous comme à tous vos colistiers, la cassette du parfait député haririen que vous vous repassez tous les soirs ? À chaque fois que l’on interroge l’un d’entre vous, c’est toujours la même réponse, c’est bizarre, non ? Le rire de Ghounwa Jalloul reprend, c’est presque un fou rire cette fois-là. «Non, il ne m’a donné aucune cassette. Nous les 18 nouveaux députés de Beyrouth avons une politique socio-économique commune et nous sommes convaincus, tous, d’un même futur pour le Liban».C’est un miracle. Vous avez le droit de donner votre avis ? «Si je n’étais pas convaincue à 10 000 %, je ne me serai pas présentée aux élections. C’est tout». Soit. Sujet clos. Et que cheikh Nasrallah, par exemple, exhorte les Palestiniens du Liban à défendre leurs frères en Israël à partir du territoire libanais, vous y adhérez ? «Nous soutenons tous, vous comme moi, la cause palestinienne, mais il n’est pas envisageable que cela se fasse au détriment du Liban. C’est à travers les institutions de l’État que nous devons soutenir cette cause». Vous savez que beaucoup de femmes, vos principales alliées, ont réagi extrêmement mal lorsque vous avez pris position contre le statut civil ? «Pourquoi ? Je ne peux imposer aucun changement à la société libanaise sans un accord avec les 18 communautés. Je suis pour le mariage civil à condition qu’il ne soit pas en contradiction avec les principes communautaires. Notre statut personnel, et c’est dans la Constitution, est basé sur le confessionnalisme, on ne peut pas oublier ça ! Je ne peux pas régler le problème si je ne commence pas par la base. Et la base, c’est la séparation de l’Église et de l’État.» Vous êtes pour ? «Bien sûr que je suis pour. Les femmes n’ont pas à être déçues par ce que j’ai dit. Il faut positiver, agir, lorsque sur cinq points, il y en a quatre sur lesquels tout le monde est d’accord, pourquoi ne pas commencer par œuvrer pour les appliquer avant de régler les controverses ? Il faut po-si-ti-ver et faire. C’est tout».C’est le slogan de Nike, ça… Et le rire de Ghounwa Jalloul… Ghounwa Jalloul refuse l’idée de la monopolisation de la communauté sunnite par un seul homme, en l’occurrence Rafic Hariri. Pour elle, «les Libanais ont voté en toute connaissance de cause». Ghounwa Jalloul souhaite qu’on arrive à un système de partis politiques, avec un programme, un vrai, à l’instar des partis européens. Ghounwa Jalloul est pour le référendum, «après l’entente entre tous, c’est un must». Le rôle du député ? Légiférer et questionner le gouvernement, «le plus important, ce sont les commissions». Ghounwa Jalloul pense à celle de l’éducation, si elle n’arrive pas à en créer une nouvelle, une consacrée à la technologie. Vous avez ressenti quoi, la première fois que vous êtes entrée au Parlement ? «C’est une première fois, une étape et pas un but ultime, j’étais fière, c’est vrai, et un peu surprise par le photo-call rituel. Aux projecteurs, je préfère l’ombre, vous savez…» Ses trois enfants – leurs âges varient de 5 à 17 ans – ont hurlé le «yes» familial à l’annonce des résultats électoraux, son mari a repris le chemin de la banque, et la plaque bleue de sa voiture portera le numéro 108. Pourquoi 108 ? «J’aime les chiffres pairs, j’aime le 8…». Et puis Ghounwa Jalloul lit de la politique, de l’histoire, et surtout en anglais. Dans ses oreilles, la musique de Zaki Nassif, la voix de Feyrouz, du jazz quand il le faut, «et Julio ! Qui n’aime pas Julio ?…». Vous savez que neuf hommes sur dix sont amoureux de vos yeux ? Elle rougit, Ghounwa Jalloul, elle sourit, «c’est vrai ?» Oui, c’est vrai. «C’est un beau compliment». Une histoire d’yeux… Pas seulement brillante, mais simple. Et vraie. À condition de rester fidèle à ses convictions – Dieu comme ce n’est pas facile au Liban – madame la députée de Beyrouth est promise à un sacré bel avenir. Affaire à suivre. Nécessairement.
Tout le monde en parle. À la télévision, dans les salons, dans les cafés, dans la rue – la rue beyrouthine surtout. Tout le monde sait qui c’est. Le banquier, l’étudiant, le gardien de parking. Elle s’appelle Ghounwa Jalloul et le chiffre du 3 septembre dernier est éloquent. Ghounwa Jalloul a été élue à l’un des deux sièges sunnites de la troisième circonscription...