Elections - Manoeuvres de Murr pour diviser l'opposition au Metn N. Lahoud prône une coalition avec Moukheiber et Gemayel (photo)

Tout comme lors du scrutin de 1996, la bataille électorale au Metn-Nord revêtira cette année l’aspect d’un bras de fer entre l’opposition et le gouvernement. Il semble que Michel Murr, chef de file des loyalistes dans cette circonscription et ministre de l’Intérieur et des Affaires rurales et municipales, utilise tous les moyens mis à sa disposition pour mener campagne. Nassib Lahoud, pour sa part, prône une large coalition de l’opposition incluant Albert Moukheiber et Pierre Gemayel. Une telle liste verra-t-elle le jour au Metn, ou assistera-t-on à la naissance de trois listes, l’une soutenue par le pouvoir, les deux autres, affaiblies, représentant l’opposition ? M. Lahoud annoncera sa liste durant la première semaine d’août. Dans une interview accordée à L’Orient-Le Jour, il a déclaré qu’il tente toujours de former une liste représentant «la plus large coalition possible des forces de l’opposition, afin de mettre fin au système qui sévit au Metn». Une région qui, selon lui, «représente le plus grand défi à l’État de droit». «Jamais un tel clientélisme, un tel abus de pouvoir n’a été aussi répandu et pratiqué comme au Metn. C’est le cas actuellement sous le “système Murr”, dont la technique consiste à troquer les services élémentaires accordés aux citoyens contre une allégeance politique inconditionnelle», a déclaré M. Lahoud Pour le député du Metn, il est possible dans cette circonscription d’allier des forces qui représentent un large éventail politique, de manière à mettre sur pied une forte coalition de l’opposition. Celle-ci regrouperait notamment Nassib Lahoud, Albert Moukheiber et Pierre Amine Gemayel. Elle mènerait une bataille «pour le changement et la réforme». M. Lahoud estime qu’une «liste forte de l’opposition peut infliger une importante défaite à la liste Murr». Il entend «donner toutes les chances à la constitution d’une telle coalition», qui devrait comprendre également Michel Samaha et Auguste Bakhos. Cette année, la liste Lahoud comprendra un candidat arménien : Raffi Médéyan ou Ara Yérévanian. Deux sièges demeureront vacants, l’un maronite et l’autre orthodoxe, qui feront l’objet, dans les jours à venir, d’un accord entre les candidats. Mais cette liste forte représentant une coalition de l’opposition a du mal à se former. La réponse de Gemayel se fait toujours attendre. Avec Moukheiber, il reste certains obstacles à surmonter. D’aucuns affirment à cet égard que certaines parties se livrent à toutes sortes de manœuvres pour empêcher la mise sur pied d’une coalition Lahoud-Moukheiber-Gemayel. M. Lahoud explique : «Pour éviter un bras de fer entre l’opposition et le pouvoir, il est fortement question d’une entente tacite entre M. Murr et M. Moukheiber». «J’ai de la peine à croire que M. Moukheiber, qui mène bataille depuis cinquante ans pour défendre les valeurs démocratiques et républicaines, soit capable de conclure un accord tacite avec le ministre de l’Intérieur. Celui-ci, en effet, représente aujourd’hui un défi permanent et quotidien à ces valeurs», ajoute-t-il. Clore le dossier de la guerre À la question de savoir si des manœuvres sont entreprises pour empêcher la formation d’une coalition, M. Lahoud déclare que «le camp loyaliste met actuellement en place tous les moyens qui peuvent créer la dislocation des forces de l’opposition». Et de poursuivre : «Il est impensable que les forces de l’opposition se prêtent à ce jeu». Pour lui, «une bataille politique est encore possible au Metn, où la victoire de l’opposition peut avoir des répercussions très importantes sur la réforme et le changement dans le pays». «C’est bien pourquoi les différents candidats de la région et les électeurs portent une responsabilité nationale», dit-il. Existe-t-il un lien entre l’appel de Lahoud à une liste de coalition et sa récente interview télévisée au cours de laquelle il a demandé la libération de l’ancien chef des Forces libanaises Samir Geagea et le retour du général Michel Aoun et du président Amine Gemayel ? Le député du Metn précise que sa position à ce sujet dépasse le cadre étroit d’une campagne électorale ponctuelle. M. Lahoud met l’accent sur la nécessité de clore une fois pour toutes «le dossier de la guerre». «Ce n’est pas la première fois que je demande le retour des leaders en exil», a-t-il indiqué. Pour lui, «clore le dossier de la guerre nécessite une série de conditions». «Cela implique de permettre le retour de Aoun et de Gemayel, d’accorder une amnistie à Geagea, le seul chef de guerre à être en prison, de revenir sur la décision de dissoudre les Forces libanaises du fait qu’elles ont été innocentées de l’accusation relative à l’attentat de l’église de Zouk, d’organiser des élections libres qui permettraient l’entrée au Parlement de toutes les forces libres libanaises et enfin de former un gouvernement d’union nationale», explique-t-il. Ces cinq conditions constituent une partie du programme électoral du candidat du Metn. «Il faut que toutes les forces démocratiques se regroupent et pas uniquement les forces chrétiennes. Tous ensemble nous devrons défendre les valeurs démocratiques et les libertés publiques qui sont bafouées et constamment contestées», déclare M. Lahoud. Quelques jours nous séparent de la proclamation de la liste de Nassib Lahoud. À ce moment-là, il sera possible de savoir si le camp Murr a réussi dans ses manœuvres. Si tel devait être le cas, trois listes seraient formées au Metn, ou, autre cas de figure, deux listes verraient le jour et des candidats indépendants plus ou moins forts se présenteraient. Dès lors, les candidats du Metn et leurs électeurs auraient l’occasion d’assister à une victoire de l’opposition. Une victoire qui ne manquerait pas d’avoir un impact non négligeable sur l’ensemble du scrutin dans le pays.