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Actualités - CHRONOLOGIE

Obsèques de Raymond Eddé - Il aurait pu être président s'il avait composé Jour de victoire pour le Amid (photos)

Il est parti la conscience tranquille, ayant tout fait pour que son cher Liban soit indépendant, souverain et libre. Décédé à Paris, Raymond Eddé a été enterré hier, dans la bonne terre du Liban, aux côtés de ses parents, au cimetière de Ras el-Nabeh. Il a eu droit aux honneurs accordés aux grands, à des éloges qui tous sonnaient juste, et dont le plus éminent venait du patriarche maronite. D’une journée éprouvante et mémorable, le moment de plus intense émotion a été celui de l’entrée du cercueil dans la majestueuse cathédrale Saint-Georges, on dirait rénovée à temps pour l’accueillir. Dans la grande tradition maronite, le cercueil contenant la dépouille de ce grand Libanais, de ce Libanais sans artifice, avait été portée à bout de bras, depuis son domicile, rue Émile Eddé (Sanayeh). Des bras maronites, des bras solides et noueux comme des branches de chêne, ont mené jusqu’à la présence de son Seigneur, celui qui n’avait pas craint, quelques jours plus tôt, de sourire à la mort qui approchait, en confiant à son médecin qu’il était heureux à la pensée qu’il ne tarderait pas à voir sa mère. Après la douleur des retrouvailles, la douleur de la séparation. Les larmes coulent sur les joues des femmes. Beaucoup d’hommes ont les yeux rougis. Sous un tonnerre d’applaudissements, le cercueil est déposé sur une table située au milieu de l’allée centrale. Il y est déposé un peu comme on plante un drapeau. Dans la nef, c’est le cœur du Liban qui bat, toutes familles spirituelles et communautés confondues. Raymond Eddé prouve dans la mort qu’il est un grand leader national. Cet enterrement, c’est un peu un jour de victoire, ou de retrouvailles. Raymond Eddé est un trait d’union précieux entre le présent et le passé. Par son intransigeance sur l’indépendance, un père fondateur du Liban. Ces hommes et femmes massés dans la nef et à l’extérieur qui le pleurent, le regrettent, ce sont les enfants spirituels de ce célibataire qui avait épousé la cause du Liban. Dans la nef, tout est prêt pour le début de la cérémonie religieuse. Walid Joumblatt, arrivé avec la procession, s’assied au premier rang, à côté de Carlos Eddé. À l’autre extrémité, l’ancien ministre Michel Eddé. Le chef de l’État a délégué pour le représenter le président de l’Assemblée nationale. Quelques minutes auparavant, un autre grand Libanais, Sélim Hoss, avait fait son entrée. Le Hezbollah est représenté par une délégation parlementaire. Le métropolite Audeh, dont l’arrivée est applaudie, est placé près des évêques maronites. On note l’absence de Mgr Béchara Rahi, qui a pris l’avion le matin même pour Rome, où il précède le patriarche qui doit s’y rendre mercredi, point de départ d’une tournée pastorale en Afrique. Après les introductions liturgiques syriaques et arabes, la lecture de l’épître et de l’Évangile, la voix du patriarche lisant l’oraison funèbre résonne fortement dans la nef. «Il aurait pu être président, s’il avait composé sur les principes». «Il combattit l’asservissement des institutions à l’arbitraire politique». «Qu’il fut appelé conscience du Liban ne doit pas étonner». Beaucoup hochent de la tête. Ces phrases cinglantes peuvent facilement être considérées comme autant de reproches à de nombreuses figures assises, là, écoutant l’oraison funèbre (VOIR PAGE 4). La lecture de l’oraison achevée, la liturgie conclue, les fidèles sont invités à prononcer un Notre Père et un «Je vous salue Marie» pour le repos de l’âme du grand disparu. Puis le patriarche et les officiels présentent leurs condoléances à la famille, tandis qu’une certaine confusion s’installe autour du pupitre. L’archevêque de Beyrouth est placé devant le fait accompli, et plutôt que d’être prononcés à l’extérieur de la cathédrale, les mots préparés par l’ancien bâtonnier de Beyrouth Antoine Klimos, et par M. Ihrahim Estephan, au nom du Bloc national, ainsi que par le médecin personnel du Amid, et enfin par son successeur à la tête du Bloc national Carlos Eddé, sont prononcés à partir du pupitre réservé à la lecture des épîtres. La voix étranglée par l’émotion et le trac, Carlos Khoury, qui succédera au Dr Sakhr Salem, ne parviendra pas au bout de son mot de remerciements, et quelqu’un le lira pour lui. «Le fait qu’il repose en terre du Liban est pour nous une consolation», dira-t-il. Le cercueil est ensuite transporté, toujours à bout de bras, vers le cimetière de Ras el-Nabeh où repose désormais, entre son père Émile Eddé et sa mère Laudie, celui qui fut, est, et continuera d’être, non seulement la conscience des Libanais, mais aussi leur mémoire.
Il est parti la conscience tranquille, ayant tout fait pour que son cher Liban soit indépendant, souverain et libre. Décédé à Paris, Raymond Eddé a été enterré hier, dans la bonne terre du Liban, aux côtés de ses parents, au cimetière de Ras el-Nabeh. Il a eu droit aux honneurs accordés aux grands, à des éloges qui tous sonnaient juste, et dont le plus éminent venait du...