Rechercher
Rechercher

Actualités - ANALYSE

Vie politique - Dans l'attente du changement espéré Plaidoyer en faveur d'une participation massive aux législatives

Des chefs politiques ont appelé au boycottage des prochaines législatives et proposé la prorogation du mandat de la Chambre actuelle, sous prétexte que les circonstances qui ont justifié le boycottage du scrutin en 1992 et 1996 n’ont pas changé, que le Liban continue d’être occupé par Israël et que l’armée syrienne y stationne toujours. Ces leaders justifient une demande aussi inhabituelle par leurs craintes de voir élue une Chambre encore plus prosyrienne que la Chambre actuelle. Commentant ce point de vue radical et quelque peu utopiste, une instance religieuse répond comme suit : Premièrement : Il va de soi que les hommes politiques doivent rester en accord avec eux-mêmes, puisqu’ils sont engagés dans la vie publique et représentent une partie de l’opinion et de l’électorat. Mais ce terrain n’est pas celui du siège patriarcal maronite, qui ne peut pas prendre parti en faveur d’un courant politique. En tant qu’instance nationale, Bkerké ne doit pas se mêler de considérations électorales, et limiter ses interventions aux grandes orientations nationales. Deuxièmement : Seules de très graves raisons peuvent justifier que Bkerké lance un appel de ce type. L’autorité du siège patriarcal et son rayonnement ne sauraient être ternis par un appel de principe qui n’a aucune chance d’être suivi. Or tout laisse croire que des franges non négligeables de l’électorat chrétien désirent participer au scrutin, et que les autorités n’ont aucune intention de proroger le mandat de la Chambre. Tout appel de ce type risque donc d’être démenti par les faits et de constituer un camouflet pour les parties qui le lanceront. Troisièmement : L’appel au boycottage des élections de 1992 a été très largement suivi. Mais ses effets sont restés nuls. L’Assemblée nationale émanant des législatives de 92 a voté des lois auxquelles tout le monde s’est soumis, et qu’il n’est pas possible de rejeter ou de ne pas reconnaître. La Chambre issue du scrutin de 1996 a été également reconnue comme légale, et a élu président de la République. Ni le boycottage de 92, ni celui de 96, n’ont pu modifier quoi que ce soit au paysage politique. Il est quasi certain qu’un nouvel appel au boycottage n’aura pas le moindre effet non plus. Il est donc nécessaire de tirer les leçons du passé, et de trouver d’autres moyens d’atteindre le but recherché. Aussi, les forces de changement démocratiques pourraient-elles changer de style d’action et lancer un mot d’ordre de participation massive au scrutin afin de permettre l’accession à la Chambre de quelques éléments représentant véritablement les aspirations populaires. Ce «petit nombre» agira ensuite comme un «levain», en attendant le changement espéré. Il semble, en effet, que la participation partielle aux législatives, à l’image d’un boycottage partiel, n’aura aucun effet sur le scrutin. Seule une participation massive fera l’affaire et pourrait obtenir l’élection de quelques personnalités représentatives. Quatrièmement : L’appel au boycottage et la demande de prorogation sont justifiés, mais se heurtent à un réalité imposée difficile à modifier par ce moyen. En effet, pour atteindre ces objectifs, deux possibilités s’offrent : l’une négative, si le terrain s’y prête et si elle a une quelconque chance de produire des résultats tangibles. L’autre positive, est représentée par la résistance politique, qui nécessite du souffle, de la patience et de la persévérance. L’histoire offre à cet égard quelques exemples, avec des peuples opprimés, privés de leur dignité et de leur souveraineté, occupés, et qui ont su attendre l’heure de la libération, venue grâce à l’action conjuguée de le leur volonté d’indépendance et d’un changement des données géopolitiques régionales. Gouvernés par des régimes totalitaires, dictatoriaux, privés de leur liberté par des élections falsifiées et une pratique dénaturée et purement formelle de la démocratie, ces peuples sont parvenus à provoquer les changements attendus et à sortir victorieux de leurs longues épreuves. Cinquièmement : La participation au scrutin ne signifie pas une capitulation devant le fait accompli, mais représente un effort pour modifier des résultats connus d’avance, par l’effet de surprise que créerait une participation massive. Une participation qui donnerait l’occasion aux forces du changement de mieux contrôler la régularité du vote. Dans le dernier en date des communiqués de l’assemblée du patriarche et des évêques maronites, il était mis en garde contre les élections législatives en ces termes : «Il ne faut pas espérer que le changement attendu viendra de candidats qui quémanderont l’approbation des forces dominantes pour obtenir leur siège». Cette prise de position ne se veut pas appel au boycottage, mais signifie que Bkerké s’efforcera de demeurer un observateur impartial de la vie politique et dénoncera toute déformation de la volonté populaire par fraude ou manipulation. Or, un boycottage du scrutin est une garantie de résultats conformes aux désirs des forces dominantes, mais une participation massive pourrait conduire ces derniers à des manipulations que l’on peut mieux contrôler. «Des élections, même mauvaises, valent mieux que pas d’élections du tout, un peu de démocratie mieux que pas de démocratie du tout, et une petite marge de souveraineté mieux que pas de souveraineté du tout», conclut l’instance religieuse citée. «Il aurait été bien plus profitable au Liban si les grandes puissances avaient écouté la voix de ceux qui ont boycotté les élections de 1992 ; si une telle prise de position avait pu accélérer le départ de toutes les armées étrangères et y avait rétabli la souveraineté et l’indépendance de l’État libanais. Hélas, ces puissances veulent ignorer les aspirations des petites nations, et ne prêtent attention qu’à leurs propres intérêts, défendant les droits de l’homme lorsque cela leur convient, et fermant les yeux sur la violation de ces droits, si leur intérêt le commande».
Des chefs politiques ont appelé au boycottage des prochaines législatives et proposé la prorogation du mandat de la Chambre actuelle, sous prétexte que les circonstances qui ont justifié le boycottage du scrutin en 1992 et 1996 n’ont pas changé, que le Liban continue d’être occupé par Israël et que l’armée syrienne y stationne toujours. Ces leaders justifient une...