Liban-Sud - Beyrouth et l’Onu en clair désaccord sur l’opération de Chebaa Annan inflexible : « La ligne bleue devrait être respectée »

Le secrétaire général des Nations unies Kofi Annan a réaffirmé hier à Beyrouth que l’enlèvement des trois soldats israéliens samedi dernier par le Hezbollah dans le secteur des fermes de Chebaa était une «violation de la résolution 425» du Conseil de sécurité et souligné que l’appartenance de ces fermes au Liban était encore à «prouver». M. Annan a tenu ces propos sans équivoque au terme d’un entretien à Baabda avec le président de la République Émile Lahoud, qui l’a reçu en présence du chef du gouvernement Sélim Hoss. M. Lahoud a demandé à cette occasion au secrétaire général, arrivé peu auparavant au Liban en provenance d’Israël, d’œuvrer pour obtenir la libération des 19 prisonniers libanais détenus par l’État hébreu le plus rapidement possible, et cela dans le but d’«alléger les répercussions négatives dues à leur maintien en détention», selon un communiqué de la présidence. Le chef de l’État a en outre informé M. Annan de la protestation du Liban à la suite des multiples violations par l’aviation israélienne de l’espace aérien libanais, ce qui constitue, selon lui, une «violation flagrante de la résolution 425». Il a également réaffirmé que les fermes de Chebaa formaient un territoire libanais, «reconnu comme tel, tant par le Liban que par la Syrie». M. Lahoud a d’autre part évoqué avec M. Annan les développements dans les territoires palestiniens et condamné «les agressions contre le peuple palestinien qui ont suscité la colère des peuples arabes». Quant au secrétaire général de l’Onu, il devait indiquer par la suite à la presse avoir demandé que le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) ou un représentant de l’Onu puisse rencontrer les trois soldats israéliens prisonniers du Hezbollah. «J’ai fait la demande pour que le CICR ou l’un de mes représentants puisse les voir pour être en mesure d’indiquer s’ils sont en bonne santé ou si on les traite bien», a-t-il déclaré. «Aucun de nos fonctionnaires ne les a vus encore et pour autant que je sache le CICR ne les a pas vus» non plus, a-t-il dit. Interrogé sur les déclarations qu’il avait faites la veille à Jérusalem à propos des fermes de Chebaa, M. Annan a clairement explicité sa position : «Je rappelle que j’avais travaillé avec votre gouvernement et celui d’Israël sur le retrait israélien du Liban-Sud», a-t-il dit. «Nous avions pour cela tracé une ligne de retrait que nous avions nommée ligne bleue et nous avions demandé aux deux États de respecter cette ligne et de ne pas la transgresser», a-t-il ajouté. «J’avais, il est vrai, été informé par les deux pays de leurs réserves sur cette ligne, mais tous deux avaient promis de la respecter. Or, une partie de cet accord portait sur les fermes de Chebaa. Il a été convenu que ce secteur était situé hors de la zone d’action de la Finul (Force intérimaire des Nations unies au Liban), conformément à la résolution 425», a souligné M. Annan, précisant que «l’appartenance des fermes de Chebaa au Liban nécessitait des documents pour le prouver». Selon lui, l’opération du Hezbollah ayant eu lieu au-delà de cette ligne, il y avait donc «violation» de la résolution 425. Au sujet de l’information sur le lynchage des militaires israéliens à Ramallah, qu’il venait d’apprendre, M. Annan a déclaré : «Personne ne va gagner à ce jeu. Les Israéliens sont perdants, les Palestiniens sont perdants, nous sommes tous perdants dans la région (du Proche-Orient) comme dans le monde entier», a-t-il déclaré. «Ce genre d’incident ignoble ne facilite pas les choses. En fait, cela complique les problèmes que nous essayons de résoudre, a-t-il ajouté, mais cela ne veut pas dire que nous ne pouvons pas trouver un moyen de sortir de cette situation difficile et trouble». Le secrétaire général a rencontré ensuite le ministre iranien des Affaires étrangères Kamal Kharazi, avec lequel la question d’un échange possible de prisonniers avec Israël a été évoquée (voir par ailleurs). Il s’est ensuite rendu à Naqoura pour une visite au quartier général de la Finul, qu’il a dû toutefois abréger pour regagner immédiatement Israël et les territoires palestiniens. M. Annan, qui déjeunait avec des officiers de la Finul, a embarqué à bord d’un hélicoptère qui a pris la direction d’Israël, après avoir reçu un appel téléphonique au milieu du repas. Le Premier ministre israélien Ehud Barak venait de publier un communiqué annonçant que des mesures allaient être prises après le lynchage des soldats israéliens dans les locaux de la police palestinienne à Ramallah.