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Actualités - ANALYSE

Trois problèmes interactifs : la récession, les rapports avec Damas et le Sud

Le Cabinet dit de la dernière chance se trouve confronté à trois dossiers apparemment distincts. Mais tellement liés au fond qu’on voit mal comment il pourrait réussir dans l’un en échouant dans l’autre. – D’abord, la crise socio-économique, préoccupation majeure des Libanais. C’est un domaine dont M. Rafic Hariri et sa garde rapprochée, autrement dit les ministres qui gravitent directement dans son orbite, se réservent le traitement. Empoignant le taureau par les cornes, le chef du gouvernement a pris d’entrée de jeu quelques premières mesures accélérées. D’abord, et avant même d’être investi de la confiance de la Chambre, il est allé parler aux Syriens. Parce que l’une des causes de la crise relève de leur présence, un peu trop concurrentielle, sur le marché de l’emploi comme sur le marché tout court. Ce qui rappelle du reste l’interdépendance des problèmes qui se posent au pays. Ensuite, M. Hariri annonce qu’il va faire modifier le système fiscal établi par son prédécesseur. En base de ce constat que confirment les chiffres : les augmentations d’impôts ou de taxes ne rapportent pas un surplus de recettes au Trésor, mais paralysent l’activité économique en général et commerciale en particulier. Sans compter le coup porté à la consommation, facteur établi de croissance. Ainsi, des projets de lois pour l’allègement des taxes à l’importation et pour la réorganisation des douanes sont déjà en cours de préparation. Parallèlement, M. Hariri veut ouvrir en grand les vannes de l’investissement. Pour attirer les capitaux, il a l’intention de faire libéraliser les législations concernant l’accès des étrangers à la propriété dite de production. Quiconque voudra créer une entreprise, industrielle ou autre, pourra acquérir les surfaces nécessaires à son installation, après le feu vert du Conseil des ministres. De même, les formalités concernant les projets seront simplifiées, rendues moins chères et accélérées. Dans le même créneau d’injection de fonds, le chef du gouvernement entend gommer les entraves qui retardent le redémarrage des chantiers de Solidere. Un lancement qui doit créer des emplois d’une part et d’autre part redonner un peu plus confiance aux investisseurs. Sur le plan monétaire, la stabilité de la livre va continuer à être jalousement préservée, tandis que des efforts seront déployés pour freiner l’accroissement galopant de la dette publique. Mais le gros morceau, ce sera bien entendu la réforme et la modernisation de l’Administration, instrument de travail essentiel sans lequel aucun redressement économique ne peut s’accomplir. Il faut là de la compétence et de la transparence, au lieu de la corruption et de l’anarchie qui continuent à sévir. Mission difficile, on le sait. Mais le problème serait en partie réglé par la privatisation d’un certain nombre de départements principaux de services publics comme l’électricité et le téléphone. Le but ultime, défini par le chef de l’État : que le Liban devienne, en cas de paix, le Singapour de la région. – Le deuxième dossier, mis en lumière encore une fois hier par le vibrant communiqué du patriarche Sfeir, est celui des rapports avec Damas. Il s’agit, dans un premier volet, de réviser certains accords bilatéraux dont l’application a donné lieu à bien des abus. Il s’agit ensuite d’aborder enfin sérieusement, sans dérobade, la question-clé de la présence militaire syrienne. Une question que les autorités locales entourent sinon d’un flou du moins d’un tas de précautions oratoires qui attisent les divisions intérieures, politiques ou même confessionnelles. On sait en effet qu’une frange de la population réclame le retrait syrien à terme et pour le moment, le redéploiement sur la Bekaa, comme l’exige Taëf. Tandis qu’une autre fraction s’y oppose. Les deux gouvernements doivent négocier le dossier, loin des surenchères et de tout tapage médiatique. Pour bien définir les besoins stratégiques, la localisation précise et la mission purement militaire des forces syriennes, puisque le pouvoir local entend ne pas se passer d’elles. Et pour bien mettre un terme aux immixtions dans les affaires intérieures libanaises, petites ou grandes. En attendant que puisse se réaliser ce vœu du patriarche Sfeir : que luise la lumière «de ce soleil des nations qu’est la souveraineté». –Enfin, le Sud. Bien que le gouvernement soit pratiquement ligoté à ce sujet par les diktats de ce que l’on appelle le jumelage, il peut difficilement continuer à ignorer la campagne intensive menée par l’Onu et l’Occident pour le déploiement de l’armée dans cette région. Le secrétaire général des Nations unies, M. Kofi Annan, a ainsi harcelé le président Hariri à Doha même, pour répéter une sévère mise en garde contre les dérapages que l’absence de l’armée risque de provoquer. De plus, si Beyrouth persiste à faire la sourde oreille, le mandat de la Finul, qui expire dans un mois à peine, pourrait bien ne pas être renouvelé. Et, au stade actuel, toutes les promesses d’aide à la reconstruction du Sud et aux investissements au Liban sont gelées. Sans compter que le non-envoi de l’armée est source de heurts politiques redoutables à l’intérieur et brise tout espoir d’entente nationale bien comprise. Émile KHOURY
Le Cabinet dit de la dernière chance se trouve confronté à trois dossiers apparemment distincts. Mais tellement liés au fond qu’on voit mal comment il pourrait réussir dans l’un en échouant dans l’autre. – D’abord, la crise socio-économique, préoccupation majeure des Libanais. C’est un domaine dont M. Rafic Hariri et sa garde rapprochée, autrement dit les ministres...