Rechercher
Rechercher

Actualités - ANALYSE

Réformes - Une mesure qui risque de secouer fortement le marché libanais Les commerçants mettent en garde contre toute atteinte aux agences exclusives

Après la décision du Conseil des ministres de baisser les droits de douane et le décret facilitant le mouvement des marchandises, le marché libanais risque d’être secoué, une nouvelle fois, par la politique ultralibérale du Premier ministre Rafic Hariri. Il est en effet question aujourd’hui de mettre fin aux agences exclusives. L’Orient-Le Jour s’est entretenu à ce sujet avec Sélim Bocti, vice-président du groupe Bocti SAL. La fin des exclusivités ne semble pas inquiéter outre mesure M. Bocti dont la société qu’il dirige opère principalement dans la branche de l’alimentaire. Car «s’il est facile d’émettre un décret, il reste difficile à l’appliquer», dit-il. Pourtant, le gouvernement, qui enchaîne depuis quelque temps les réformes économiques, considère que la fin des agences exclusives pourrait profiter aux consommateurs autant qu’à la grande majorité des commerçants. Cette mesure tend après tout à combattre les monopoles et à encourager la concurrence. L’État attend d’une telle décision une baisse radicale du prix des marchandises et une augmentation du pouvoir d’achat des Libanais. Un citoyen qui consomme plus contribue à long terme à favoriser la croissance et à relancer l’économie. Telle semble être la logique du gouvernement. Pour M. Bocti, «rien n’est moins sûr». Par exemple, le secteur de la publicité et des médias dépend en grande partie des exclusivités : «Les sociétés investissent 50 % du budget de la marque dans des plans marketing». Dans ce cas, toucher aux exclusivités reviendrait à handicaper considérablement tout un secteur de l’économie «et pas des moindres». Et d’ajouter : «Il ne faut pas croire que les sociétés d’importation travaillent contre l’intérêt du consommateur». M. Bocti insiste sur sa connaissance du marché, sur la capacité de marchandises qu’il peut contenir, sur les niveaux de prix à respecter. «Cette décision, si elle est prise, ne fera qu’augmenter le volume des stocks et créera une fuite des liquidités et donc un déséquilibre dans la balance de paiements du pays», avertit-il. Mais l’argument qui lui semble le plus pertinent pour infirmer le credo du gouvernement est que «cette loi d’exclusivité permet surtout de protéger le consommateur, de désigner un responsable en cas de produits défectueux ou de marchandise avariée». Pour la majorité des chefs d’entreprise, «cette décision ne ferait que renforcer le marché parallèle», indique M. Bocti. Si les prix vont nécessairement baisser, «cela va aussi abolir les marges de profits de nombreuses sociétés», ajoute-t-il. L’argument le mieux partagé chez les commerçants est qu’en réduisant leurs marges de bénéfices, l’État les empêche de créer des emplois et réduit à néant leurs capacités d’investissements. Quant aux entreprises industrielles, déjà fragilisées par une baisse jugée brutale des droits de douane, elles devront alors faire face à une concurrence encore plus rude. Ainsi, pour une fois, les industriels semblent d’accord avec les commerçants pour dénoncer une décision qu’ils jugent aberrante. Pour les importateurs, il y a d’autres moyens pour favoriser la concurrence au bénéfice du consommateur. Aujourd’hui, les produits de substitut font très bien l’affaire de l’acheteur. Pour certains, il faut davantage libérer le marché tout en maintenant la loi sur l’exclusivité. Dans ce cas, «le rôle de l’État devrait se réduire à veiller à ce que les lois de la concurrence soient respectées en éliminant les cartels déclarés ou tacites», affirment les commerçants les moins convaincus par cette éventuelle mesure gouvernementale. Bertrand FATTAL
Après la décision du Conseil des ministres de baisser les droits de douane et le décret facilitant le mouvement des marchandises, le marché libanais risque d’être secoué, une nouvelle fois, par la politique ultralibérale du Premier ministre Rafic Hariri. Il est en effet question aujourd’hui de mettre fin aux agences exclusives. L’Orient-Le Jour s’est entretenu à ce sujet avec...