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Actualités - CHRONOLOGIE

TRANSPORTS - Le texte sera discuté aujourd’hui au Parlement mais rencontrerait une forte opposition Proposition de loi pour réautoriser le mazout(PHOTOS)

L’affaire du mazout : suite et non fin. Après l’application, depuis le 15 juillet dernier, du deuxième volet de la loi n° 341 qui interdit les vans et les minibus (moins de 15 passagers) au mazout, cinq députés ont présenté hier à la Chambre une proposition de loi qui remet en question la première, donnant aux véhicules concernés un nouveau délai avant leur arrêt final. Une proposition allant à l’encontre d’une loi votée par ce même Parlement il y a un an exactement... Le texte de la proposition de loi précise que « contrairement aux stipulations de tout autre texte de loi, il est autorisé à tous les véhicules dont les moteurs fonctionnent au mazout, définis dans la deuxième partie de l’article 122 du code libanais de la route n° 72/67, de rouler conformément à la loi n° 368/94, et ce, jusqu’à l’importation d’un gazole vert non nocif à l’environnement «. Les cinq députés sont Élie Ferzli, vice-président de la Chambre, Assaad Hardane (Parti syrien national social, PSNS), Hussein Hajj Hassan (Hezbollah), Assem Kanso (Baas) et Robert Ghanem. Le texte devrait être discuté aujourd’hui au Parlement. Les spéculations allaient bon train hier sur les chances qu’avait le texte d’être adopté. Plusieurs blocs parlementaires ne lui sont en effet pas favorables, dont ceux du Premier ministre Rafic Hariri, du chef du Parti socialiste progressiste (PSP) Walid Joumblatt et, apparemment et sauf changement de dernière minute, du président de la Chambre, Nabih Berry. Interrogés par L’Orient-Le Jour, autant Michel Moussa, ministre de l’Environnement, que Akram Chéhayeb, président de la commission parlementaire de l’Environnement, se sont déclarés très sceptiques sur les chances qu’a le texte d’aboutir. « Ce serait un coup porté à la crédibilité de la Chambre, s’est exclamé M. Chéhayeb. Cette proposition a été faite à des fins électorales et politiques. » Quant à M. Moussa, qui appartient au bloc de M. Berry, il a déclaré qu’il était peu probable que ses collègues votent en faveur de la loi. Pourquoi un revirement aussi soudain que spectaculaire, alors que l’affaire du mazout avait fait l’objet d’un débat houleux national et qu’on la croyait tranchée ? Les signataires du texte de loi avancent plusieurs arguments pour étayer leur initiative : selon eux, l’application de la loi n° 341 sur les vans et les minibus a eu de nombreux effets négatifs qui justifient une contre-mesure. Près de 15 000 emplois ont été supprimés. Les propriétaires de ces véhicules ont dû interrompre leur activité économique alors qu’ils n’avaient pas fini de payer leurs traites. La loi a créé un problème social important sans résoudre celui de la pollution atmosphérique résultant du secteur du transport, puisque les autres véhicules roulant au mazout, plus nombreux, n’ont pas été touchés par l’interdiction. Les indemnités prévues sont loin de suffire puisqu’un nouveau moteur, avec les changements qu’il entraîne, coûte entre 5 et 10 000 dollars, quand il est disponible. Enfin, les signataires invoquent la compétition inégale entre les minibus, qui doivent payer 22 000 LL le bidon d’essence, et les grands bus qui ne payent le bidon de mazout que 7 200 LL. Ce point de vue est naturellement partagé par le président du syndicat des propriétaires de minibus, Abdallah Hamadé, qui répétait hier son slogan place Riad Solh où a eu lieu un sit-in pacifique : « L’autorisation pour tout le monde ou l’interdiction pour tout le monde. » Il assure que ses contacts avec les hommes politiques l’ont conforté dans l’idée que les députés sont « plus conscients aujourd’hui des problèmes sociaux engendrés par l’application de la loi ». Une polémique qui se poursuit Mais les chauffeurs de minibus de transport en commun ne sont pas les seuls à s’être insurgés contre une interdiction du mazout qu’ils ont qualifiée d’« improvisation des autorités ». Les industriels et les distributeurs se sont vu priver de dizaines de véhicules neufs, aujourd’hui immobilisés dans les garages. Selon Fadi Abboud, président de l’Association des industriels, « environ 40 % du volume total de distribution s’est trouvé compromis par l’arrêt de ces véhicules ». Il ajoute : « Il ne faut surtout pas croire que nous sommes hostiles à l’application de mesures de protection de l’environnement. Mais les véhicules touchés par la loi, c’est-à-dire les minibus de moins de 15 places et les camions de moins de 3 500 kilos, ne constituent que 6% des sources de pollution au mazout. Pour trouver une solution globale, il faut certes importer du gazole vert comme on l’appelle aujourd’hui, mais aussi des “moteurs verts”, en d’autres termes ceux qu’on désigne par Euro 2 et 3. » M. Abboud assure qu’il ne s’agit pas d’acheter de nouveaux moteurs mais simplement de modifier les engins existants, entre autres les générateurs d’électricité, qui fonctionnent eux aussi au mazout. « D’ailleurs, il nous a été confirmé que le gazole propre sera introduit sur le marché à partir de septembre, puisque les normes ont été établies et que le monopole d’importation sera levé », ajoute-t-il. Pour M. Chéhayeb, l’importation d’un gazole propre, ou « mazout vert », ne résout en aucun cas le problème. « Je ne sais pas si un mazout vert peut conserver sa couleur au Liban, sans devenir rouge par exemple, lance-t-il, ironiquement. En fait, tant qu’un mécanisme de contrôle efficace n’est pas instauré, compter sur l’application de normes d’importation strictes peut s’avérer dangereux. Voilà pourquoi nous préférons que l’interdiction ne soit pas levée. » Le président de la commission réitère la proposition qu’il avait présentée au Premier ministre il y a quelques jours en compagnie de M. Moussa : organiser le transport en commun de façon que les grands bus soient interdits d’accès à l’intérieur des villes, afin qu’ils ne représentent plus une compétition déloyale aux minibus. Cette proposition, rappelons-le, s’était heurtée au refus des chauffeurs de minibus qui n’y voient pas une solution au problème de la cherté de l’essence. En cas de rejet de la proposition de loi, aujourd’hui au Parlement, l’Association des industriels compte agir. « Nous pensons intenter, à la rentrée, un procès auprès du Conseil d’État pour l’instauration d’un mécanisme de paiement d’indemnités équitables pour toutes les parties concernées, explique-t-il. En effet, quand l’État veut interdire des véhicules, il doit au moins rembourser à leurs propriétaires le montant des taxes qu’ils ont payées à l’achat. Cela n’a pas été fait. » Les propriétaires de minibus, eux, ont présenté devant le Conseil d’État un recours en invalidation de la loi d’interdiction. Quel que soit le sort de la proposition de loi, aujourd’hui au Parlement, la nécessité de trouver une solution durable à ce problème demeure, un problème qui a illustré de manière éloquente le cafouillement des autorités. Quelle sera cette solution ? Sera-t-elle aussi radicale que l’espère M. Hamadé, autorisation pour tout le monde ou interdiction pour tout le monde ? Ou bien passera-t-elle par une vraie réorganisation du trafic ? Ou alors par un mécanisme de paiement d’indemnités plus juste et plus efficace ? S.B.
L’affaire du mazout : suite et non fin. Après l’application, depuis le 15 juillet dernier, du deuxième volet de la loi n° 341 qui interdit les vans et les minibus (moins de 15 passagers) au mazout, cinq députés ont présenté hier à la Chambre une proposition de loi qui remet en question la première, donnant aux véhicules concernés un nouveau délai avant leur arrêt...