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Actualités - OPINION

Sans viatique, le pays peut tenir six mois

Un ancien ministre, versé dans les affaires et proche des cercles bancaires, affirme que les 5 milliards de dollars potentiels des privatisations, ainsi que l’injection indirecte équivalente que l’on attend de Paris II sont tout à fait indispensables pour sortir de l’ornière. À son avis, sans de tels apports, les antalgiques administrés ces dernières années ne suffiraient plus. Passée une phase terminale de six mois, le pays risquerait de plonger dans le coma. C’est-à-dire qu’il y aurait dans les premiers mois de l’année prochaine une crise si forte que la Banque centrale ne serait plus en mesure de protéger la livre. L’État ne pourrait plus continuer à tenir tête au Fonds monétaire international qui réclame une dévaluation depuis deux ans. Cette personnalité ajoute qu’une fois le krach survenu, aucun gouvernement, aucun programme ne pourraient plus, intra muros, tirer le pays de ce mauvais pas, l’empêcher d’aller à la famine. Le seul traitement envisageable, à un tel moment, serait de se plier aux conditions draconiennes de la Banque mondiale. Dont les préceptes ont été jusque-là rejetés à cause de multiples considérations sociopolitiques internes. Le président Rafic Hariri, pour sa part, se montre constamment soucieux de ne pas démoraliser les Libanais. Mais il est certainement conscient du danger. C’est bien pourquoi il adresse régulièrement des mises en garde sévères, solennelles même, aux joueurs du cru. En insistant sur les conséquences qu’aurait toute entrave à la privatisation du cellulaire comme à la tenue de Paris II. Cela, au milieu d’un climat interprésidentiel troublé et instable... De son côté, M. Pierre Hélou, ministre d’État, déclare dans un entretien radiodiffusé que l’explosion pourrait se produire dès le 31 août, date butoir fixée pour entamer, par une mise en adjudication, le processus de privatisation du cellulaire. Une opération qui fait en réalité l’objet d’un échange de messages hostiles entre les protagonistes du pouvoir. Dont les tiraillements atteignent un tel paroxysme que le prochain Conseil des ministres risque d’en être houleux. L’ancien ministre précédemment cité veut dès lors espérer que les dirigeants reviennent à la raison et s’entendent enfin. Notamment pour sauver la saison touristique d’été que pourrait compromettre une reprise violente, ouverte, de leurs querelles, actuellement feutrées. Concrètement, où en est-on ? Le président Hariri affirme, catégorique, que « ni l’État ni Ogero ne vont gérer le cellulaire. Il n’y aura pas non plus de direction transitoire. Sinon, on avisera ». Le ministre des Télécoms, M. Jean-Louis Cardahi, réplique qu’il faudra bien que l’État prenne en charge ce secteur public, si l’adjudication devait avorter. Un avis que récuse le ministre de la Santé, M. Sleiman Frangié, pour qui une implication de l’État signifierait des recrutements de complaisance, des indemnités de licenciement pour les futurs fonctionnaires et un risque de tables d’écoute. Quant au chef de l’État, le président Émile Lahoud, qui se tient à l’écart de toute polémique, seuls lui importent l’intérêt du Trésor et le rôle des institutions constitutionnelles. Il se dit dès lors attaché à défendre tout mécanisme qui se révélerait nécessaire pour que cette équation soit respectée. Il souligne que l’État doit traiter le dossier en base des textes juridiques en vigueur. Selon des sources informées, il est possible que le président Lahoud n’ait pas d’objection à ce que les deux opérateurs sortants continuent sur leur lancée, pour deux mois, moyennant des royalties augmentées. Cela, si aucune compagnie internationale ne se présente pour l’adjudication. Éventualité évidente, étant donnée la stagnation du marché, euphémisme poli pour évoquer le peu d’attraction d’un pays économiquement fragile et politiquement instable. L’ancien ministre cité relève à ce propos que la réussite de l’opération de privatisation, et a fortiori de Paris II, se trouve largement conditionnée par l’attitude de Washington à l’égard de Beyrouth. On sait, en effet, que les désirs des Américains sont quasiment des ordres pour le FMI. Dont dépend pratiquement tout moratoire en faveur des finances libanaises en déperdition, accablées par une dette de près de trente milliards de dollars. Pour cette personnalité, l’objectif, déjà bien difficile à atteindre, ne peut être poursuivi qu’en base d’une parfaite entente entre les présidents Lahoud et Hariri. Leur désaccord met en péril le pays économique. Il faut donc, à son avis, qu’ils composent, du moment que tout changement ministériel reste hors de question. Et que Baabda ne peut actuellement disposer d’aucun partenaire de rechange. Dans ce cadre, conclut l’ancien ministre, il serait dangereux que des parties politiques misent sur l’échec de M. Hariri. Car le temple s’écroulerait sur la tête de tous. Émile KHOURY
Un ancien ministre, versé dans les affaires et proche des cercles bancaires, affirme que les 5 milliards de dollars potentiels des privatisations, ainsi que l’injection indirecte équivalente que l’on attend de Paris II sont tout à fait indispensables pour sortir de l’ornière. À son avis, sans de tels apports, les antalgiques administrés ces dernières années ne suffiraient...