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Conference - Les ministres arabes de l’Intérieur ont clôturé leurs travaux en proclamant leur appui aux Palestiniens La déclaration de Beyrouth contre le terrorisme, une tentative pour apaiser les Américains (photos)

«C’est une avant-première du sommet arabe». Ghassan Salamé, qui inspectait les lieux où se déroule la conférence des ministres de l’Intérieur, ne croit pas si bien dire, puisque le communiqué final donne aussi un avant-goût des décisions du sommet. Tout au long de la matinée, le discours guerrier du président Bush a pesé sur les ministres et le communiqué final est apparu comme une timide réponse aux menaces américaines. Ni intention belliqueuse, ni défi, rien qu’un rappel de principes déjà connus : non au terrorisme, non aux pratiques israéliennes, oui à la résistance et à l’appui au peuple palestinien, oui à une politique commune de lutte contre le terrorisme et au renforcement de la coopération sécuritaire. Pas un mot sur les mouvements islamistes, ni même une mention directe du Hezbollah, mais une demande de redéfinition du terrorisme et un rappel des principes de l’islam. Les conflits ont été évités et, pour tout le monde, le test est réussi : la dix-neuvième conférence des ministres de l’Intérieur arabes sous la présidence du Liban n’a fait que des heureux... sauf les citoyens pris dans des embouteillages. Commencée par des versets du Coran, la conférence des ministres de l’Intérieur se termine sur l’hymne de la police arabe, rendu public hier pour la première fois. Les 17 ministres et leurs délégations se lèvent pour l’écouter ou pour le chantonner. La conférence a, de toute évidence, réussi à éviter les clashs, et ses résolutions reflètent l’état d’esprit du monde arabe où chacun ne pense qu’à sauver sa tête. Le ministre Élias Murr s’est démené pour sauver la solidarité arabe qui risquait de montrer des failles à la suite du discours du président Bush, l’Irak voulant plus de fermeté et l’Égypte souhaitant au contraire un ton plus conciliant. L’émir Nayef, chef «spirituel» de ce Conseil qu’il a lui-même créé (le Conseil des ministres de l’Intérieur ne dépend pas de la Ligue, l’académie Nayef pour les sciences de la sécurité en est l’âme), a reçu tous les chefs des délégations, à tour de rôle, pour aplanir les différends. Dissensions ou simples concertations ? Le temps passe et les concertations se poursuivent. Alors que le communiqué final devait être lu à 11h, il est midi et rien ne bouge encore. Les contacts se font dans les étages, notamment la suite impériale et toute l’aile réservée à la délégation saoudienne. Certains ministres peu engagés dans les conflits tentent quelques pas dans le hall. Ils sont aussitôt assaillis par les journalistes. Certains parlent de concertations de dernière heure, rejetant toute idée de conflit, d’autres laissent entendre que le ministre koweitien n’est pas totalement satisfait et que l’Égyptien veut plus de conciliation à l’égard des Américains. Le ton de la conférence devient ainsi très politique, car en général, ces ministres, qui sont pour la plupart des militaires de carrière, sont d’accord sur les mesures sécuritaires communes. Tous savent, en fait, que l’importance de leur réunion est qu’elle se tient dans des circonstances très graves dans le monde arabe et que leur communiqué sera minutieusement lu par les chancelleries occidentales parce qu’il sera considéré comme la réponse arabe aux pressions américaines. La réponse est donc rendue publique avec deux heures et demie de retard, après une première tentative au cours de laquelle les journalistes sont introduits, mais vite priés de sortir par le secrétaire général le Dr Koumane au ton bien peu diplomatique. La seconde tentative est la bonne et le ministre Murr déclare la session terminée. L’émir Nayef lui remet un présent en souvenir de la session ministérielle et après avoir divulgué le message de remerciements des délégations au président Émile Lahoud, le secrétaire général entame la lecture du communiqué final, plutôt technique, suivi de la déclaration de Beyrouth contre le terrorisme et d’une déclaration d’appui au peuple palestinien. Des déclarations de principe et des généralités Tout est ainsi dit et, comme prévu, les résolutions se cantonnent dans les déclarations de principe et les généralités, ressemblant plus à de la poésie qu’à des déclarations de ministres de l’Intérieur. Les Arabes s’engagent ainsi à combattre le terrorisme partout dans le monde, conformément toutefois aux dispositions de la convention arabe de lutte contre le terrorisme, entrée en vigueur depuis deux ans, et selon leurs propres critères qui prévoient une nette distinction entre le terrorisme et le droit des peuples à résister par tous les moyens pour libérer leurs territoires. Les ministres dénoncent aussi le harcèlement dont sont victimes des Arabes et des musulmans dans le monde rappelant que l’islam est basé sur des principes de pardon, de tolérance. Les ministres demandent aussi de régler les causes qui pourraient donner naissance au terrorisme et promettent de réclamer la tenue d’une conférence internationale pour définir le terrorisme. En fait, c’est là que réside le plus gros problème entre le monde arabe et les États-Unis. Qui est terroriste et qui ne l’est pas, toute la question est là et tant qu’ils ne pourront se mettre d’accord sur une définition commune, la situation demeurera aussi chaotique. Le Conseil des ministres arabes déclare son appui au peuple palestinien et à l’OLP, dénonçant vivement les actions génocidaires d’Israël. Il se promet d’aider la police palestinienne politiquement, moralement et matériellement, sans évoquer une aide militaire et sans préciser en quoi consistera cette aide. En réponse à une question, le ministre Murr, qui tient la conférence de presse de clôture, déclare que le ministre palestinien étant absent, il n’a pas été possible de déterminer en quoi consistera l’aide puisqu’elle dépend des besoins. Mais ceux-ci seront précisés ultérieurement. Murr et les embouteillages Dans une autre réponse, le ministre Murr qui a vécu ces deux derniers jours à un rythme infernal, veillant personnellement à ce qu’il n’y ait aucun accroc dans l’organisation, l’accueil, l’installation et surtout la sécurité des délégations arabes (ce qui n’était pas évident, d’autant que tous les ministres étaient accompagnés de leurs propres gardes du corps, l’émir Nayef ayant aussi amené ses propres voitures blindées), s’est excusé des citoyens pour les embouteillages causés. «Nous avons dû fermer certains axes routiers et prendre des mesures strictes, mais c’est généralement ainsi que cela se passe dans les réunions de ce genre dans tous les pays du monde. Et le plus important, c’est que la sécurité de tous ait été assurée». Interrogé sur les mesures que comptent prendre les ministres arabes contre les mouvements islamistes classés terroristes par les États-Unis, Murr a affirmé qu’il ne faut pas parler de mouvements islamistes, les groupes armés et les hors-la-loi appartiennent à toutes les religions et existent partout dans le monde. «Il y avait bien des Américains parmi les talibans. Le monde entier est concerné par le terrorisme et lorsque le Liban ainsi que d’autres pays arabes comme la Syrie les frappait chez eux, ils étaient accusés de violer les droits de l’homme. Si on regarde les lois appliquées actuellement aux États-Unis et celles qui sont appliquées au Liban, on voit que les nôtres sont bien plus clémentes. C’est pourtant nous qui sommes accusés de dérives dictatoriales...». Le ministre répond aimablement à toutes les questions, insistant sur le fait que chaque pays est souverain et qu’il peut prendre les mesures qu’il juge nécessaires au maintien de sa sécurité. Mais, en dépit de leur insistance, les journalistes ne pourront connaître les mesures concrètes prises pour coordonner la lutte arabe contre le terrorisme et la stratégie sécuritaire arabe. Ils devront se contenter de titres généraux et attendre la prochaine session des ministres de l’Intérieur arabe qui se tiendra à Tunis et dont l’ouverture sera présidée par le Liban pour espérer en savoir plus. Une chose semble toutefois claire : l’année 2002 sera particulièrement axée sur la sécurité dans le monde arabe, comme d’ailleurs dans le reste du monde. Scarlett HADDAD
«C’est une avant-première du sommet arabe». Ghassan Salamé, qui inspectait les lieux où se déroule la conférence des ministres de l’Intérieur, ne croit pas si bien dire, puisque le communiqué final donne aussi un avant-goût des décisions du sommet. Tout au long de la matinée, le discours guerrier du président Bush a pesé sur les ministres et le communiqué final est...