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Actualités - ANALYSES

L’opinion attend les cadres à l’œuvre

Pudiquement, personne ne parle de réforme. Mais le vaste mouvement administratif engagé par le pouvoir apporte à l’État un sang neuf. Ce qui laisse espérer une dynamisation des services publics profitable à la reprise économique. Les mécontents affirment certes qu’une fois de plus l’opération a consacré un système politicien de partage du gâteau. Mais l’opinion ne prête pas beaucoup d’attention à ces grincements de dents. Car à ses yeux ce qui importe, c’est qu’on ait mis «the right man at the right place». Et que les fonctionnaires promus se montrent compétents, efficaces et probes. Dès lors, c’est à l’œuvre que le public jugera ces cadres, porteurs en principe d’un changement appelé à se manifester également au niveau des législations comme des réglementations devenues désuètes. En somme, pour que l’amorce de réhabilitation se confirme, il faut lutter tout à la fois contre la corruption, le gaspillage, le clientélisme et la routine bureaucratique. Tout ne dépend donc pas de la qualité du tissu d’ameublement qui est choisi. Le législatif et l’exécutif gardent leur part de responsabilité, comme de travail à accomplir. Pour le moment, comme des sources indépendantes s’en félicitent, le pouvoir a réussi à surmonter ses contradictions internes. Les dirigeants sont en effet parvenus à préserver leur entente de base, pour mener les désignations à bien. C’est un exploit, en regard du passé. Car jamais auparavant les nominations ne se sont passées sans fortes secousses socio-politiques ou confessionnelles, et elles ont maintes fois occasionné des crises ministérielles. Dès l’ouverture de la séance initiale de mardi, le chef de l’État a pressé le Conseil des ministres de ne pas se séparer sans avoir promulgué les désignations. En soulignant qu’il y allait de la crédibilité du pouvoir comme de la stabilité du pays, puisqu’une dérobade aurait provoqué une multitude d’interprétations confuses. Le président Lahoud a ajouté dans son exorde-exhortation qu’avant tout le pouvoir doit garder à l’esprit la nécessité d’activer l’administration pour permettre la relance économique. Il reste que tout n’est pas réglé, loin de là. Pour que les rouages fonctionnent, il faut, entre autres impératifs, qu’un directeur général s’entende bien avec son ministre de tutelle. Ce dernier est donc supposé accepter les désignations. S’il n’en est pas satisfait, il peut consigner ses réserves ou aller jusqu’à démissionner. Mais, en principe, il ne devrait pas laisser s’implanter dans son département un climat de mésentente et de manque de coopération. C’est-à-dire que le cas échéant, il doit faire contre mauvaise fortune bon cœur et ne pas entraver la marche des affaires publiques par des bisbilles avec son secondant administratif. Certes, un seul ministre, M. Talal Arslane, s’est inscrit en faux ouvertement, officiellement, contre les nominations. Mais il ne fait aucun doute que nombre de ses collègues ne sont pas satisfaits. Il leur faudra néanmoins surmonter leur désillusion pour que l’État soit toujours bien servi. Et c’est peut-être trop leur demander. À terme, la grogne latente pourrait faire des ravages. D’autant que beaucoup de politiciens, de partis ou de dignitaires religieux développent des observations critiques à l’encontre des nominations. Soit pour reprocher aux dirigeants de ne pas avoir respecté suffisamment l’avis des ministres concernés. Ce qui risque de poser des problèmes de cohabitation. Soit pour estimer que dans certains cas la compétence n’a pas prévalu. Il est certain que, comme le souligne La Fontaine, on ne peut plaire à tout le monde et à son père. Toujours est-il que les désignations dans leur ensemble reflètent une certaine cohérence. En effet, on remarque que le président du Conseil, M. Rafic Hariri, s’est arrangé pour que les organismes à vocation économique ou financière restent pratiquement sous sa propre coupe, par lieutenants interposés. Il en va ainsi pour le Conseil du développement et de la reconstruction, Élissar et Idal. Le premier ministre a de même veillé avec un soin jaloux à ce que les institutions candidates à la privatisation aient à leur tête des cadres efficients, capables de redorer leur blason pour que leur cession soit plus rentable. Cela dans la double perspective de la signature de l’accord d’association avec l’UE et de Paris II. Le ministre du développement administratif, pratiquement en charge de la réforme, M. Fouad es-Saad, apporte le mot de conclusion. En relevant que la réorganisation de nombre d’administrations a déjà été accomplie. Et que les services publics ne sont finalement pas un bois mort, inerte, figé mais un corps mobile, en expansion, apte à évoluer. Ainsi lorsqu’on fusionne des départements, il faut évidemment en revoir les rouages. Et lorsqu’on veut privatiser des organismes, on doit également repenser les structures et les modes de fonctionnement. Sans oublier la nécessité de moderniser l’ensemble et d’introduire de meilleures connexions par l’informatique. Ce qui demande du temps.
Pudiquement, personne ne parle de réforme. Mais le vaste mouvement administratif engagé par le pouvoir apporte à l’État un sang neuf. Ce qui laisse espérer une dynamisation des services publics profitable à la reprise économique. Les mécontents affirment certes qu’une fois de plus l’opération a consacré un système politicien de partage du gâteau. Mais l’opinion ne...