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Actualités - ANALYSES

Dossier régional - Le discours de Powell passé au crible - Avis mitigés à Beyrouth sur les perspectives de paix

Verra-t-on sur les écrans régionaux, l’an prochain, un remake du film français Les Mariés de l’An II ? Arabes et Israéliens vont-ils conclure la paix et faire, enfin, bon ménage puisque leur cohabitation est forcée ? Bush le fils réussira-t-il là où Bush le père avait échoué ? Aura-t-on, au moins, le soulagement de voir le processus redémarrer à l’ombre du discours refondateur de Colin Powell ? Bien entendu ces interrogations divisent globalement les spécialistes locaux, diplomates ou politiciens, en pessimistes et en optimistes, chacun tenant du reste à bien nuancer sa position. Les premiers relèvent que le secrétaire d’État n’apporte rien de nouveau. Les principes de Madrid existent depuis une bonne décennie. Les résolutions numéros 242 et 338 remontent à 1967. Le plan Mitchell, conditionné par une trêve sur le terrain, date de plusieurs mois. De plus, les problèmes les plus ardus, à savoir le retour des réfugiés palestiniens et la question de Jérusalem, sont toujours éludés. Mais les positivistes, si on peut les appeler ainsi, répondent que l’approche de M. Powell est loin d’être une banale redite. Elle se distingue par une proposition qui est dans le fond sans précédent : faire aller de concert, et de conserve, les concepts de paix et de sécurité. Ce qui constitue une solution médiane entre ce que les Arabes et les Israéliens réclament respectivement. Les uns soutiennent en effet, comme on sait, que sans une paix globale équitable, la région ne saurait être vraiment stabilisée. En soulignant que la restitution par Israël des territoires spoliés mettrait fin à toute résistance, à toute hostilité armée. Et les autres répondent que seule une sécurité, entendre la leur, solidement préétablie peut garantir une paix durable. Un thème qui sous-entend la mise au pas des extrémismes arabes, qui, même dans des pays comme l’Égypte ou la Jordanie qui ont déjà signé des accords de paix, veulent toujours démolir l’État hébreu. Ce que M. Powell recommande, selon ces sources locales, c’est que tout aille désormais de pair, qu’il n’y ait ni paix sans sécurité ni l’inverse. Cependant, les sceptiques rappellent pour leur part qu’en définitive la paix n’est pas affaire d’idées nouvelles ou de plans sur papier, mais tout simplement de ferme volonté d’appliquer les dispositions déjà publiées. En d’autres termes, il suffirait que Washington renonce à se montrer partial, en forçant enfin Israël à exécuter les résolutions de l’Onu ainsi que les principes de Madrid, pour que tout marche comme sur des roulettes. Or, ajoutent ces experts, cela fait trente-quatre ans que les Américains traînent les pieds pour ce qui est de faire appliquer la 242 et la 338. Et si la 425 concernant le Liban l’a été, d’ailleurs incomplètement, ce n’est certainement pas avec leur concours, bien au contraire. Il est évident dès lors que sans leur appui, ou du moins leur complaisance traditionnelle à l’égard de l’État hébreu, jamais ce dernier n’aurait pu défier pendant des décennies la légalité internationale. C’est une telle certitude qui a permis en 91 à Shamir, comme il l’a reconnu sans vergogne par la suite, de duper Bush le père, qui exerçait une très forte pression sur Israël à travers le blocage de crédits militaires, et de se rendre à Madrid avec la ferme intention de court-circuiter à terme les résolutions de cette conférence fondamentale. Au fil des années, les Américains se sont bien aperçus qu’ils avaient été floués. Mais ils ont continué à fermer les yeux, même quand Sharon les a ouvertement défiés et même presque insultés, en leur reprochant de couvrir un nouveau Munich 38. La Maison-Blanche a riposté que de tels propos sont inadmissibles. Elle a reçu des excuses, et cela s’est arrêté là, Sharon restant aux commandes avec les mêmes plans d’obstruction. Partant de cette constatation, les sceptiques locaux ne voient pas de raison qui permette de penser que Washington va changer de cap, alors que juste après le 11 septembre, il a tenu à réaffirmer son alliance stratégique, organique, avec Israël. Qui, selon ces sources, applaudit au discours de Powell d’une manière mensongère. C’est-à-dire sans avoir aucunement l’intention de mettre fin à la colonisation de terres arabes. Mais avec la volonté de neutraliser, grâce à l’initiative américaine elle-même, l’intifada. Les Palestiniens, de leur côté, concluent ces sources, n’approuvent le discours de M. Powell que dans un objectif ponctuel tactique. Celui de voir dans quelle mesure Washington va enfin faire pression sur Israël pour mettre un terme aux colonisations.
Verra-t-on sur les écrans régionaux, l’an prochain, un remake du film français Les Mariés de l’An II ? Arabes et Israéliens vont-ils conclure la paix et faire, enfin, bon ménage puisque leur cohabitation est forcée ? Bush le fils réussira-t-il là où Bush le père avait échoué ? Aura-t-on, au moins, le soulagement de voir le processus redémarrer à l’ombre du discours...