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Actualités - OPINIONS

Colloque - « Francophonie et diversité culturelle » au CCF - La culture française entre statisme et dynamisme

Les XIes rencontres internationales francophones du pays de Quercy se sont tenues vendredi 26 et samedi 27 octobre au Centre culturel français sur le thème : «Diversité culturelle et francophonie», sous la présidence du professeur Edmond Jouve et à l’initiative de l’Association des écrivains en langue française (Adelf). En tout, quelque vingt intervenants ont pris la parole pour aborder des sujets d’ordre divers. Loin d’épuiser réellement les différents aspects du problème, le colloque aura en revanche eu le mérite de poser, en clôture, une problématique fondamentale : que voulons-nous, une francophonie dynamique, prônant les valeurs qui lui sont intrinsèques, à la tête desquelles les droits de l’homme, ou statique et versée dans la contemplation de sa splendeur passée ? D’entrée, Joseph Fadel, professeur en relations internationales à l’Université Saint-Joseph, introduit cette problématique à la suite de son intervention sur le thème de «Culture de vie contre culture de mort». Dans une perspective dynamique, M. Fadel s’intéresse à «l’unité ontologique de la personne humaine», au-delà de la diversité culturelle. Cette unité ontologique devra déboucher sur «une culture de vie, à travers la création d’un nouvel humanisme». Par conséquent, le rôle de la francophonie, affirme-t-il, se trouve dynamisé et acquiert une dimension concrète, socio-politique. S’inscrivant dans cette dynamique, le professeur Edmond Jouve se demande si «la diversité culturelle peut être facteur de paix». La réponse est oui, et les pays francophones jouent un rôle d’avant-garde dans ce domaine. En effet, poursuit-il, dans une étude des textes de droit positifs, l’article 1er de la Charte de la francophonie stipule que cette dernière est «au service de la paix, de la coopération et du développement». Le droit à la paix devient progressivement norme de droit dans la déclaration de Hanoï, à l’issue du sommet francophone, adoptée par plus de 50 chefs d’État, puis lors du sommet de Moncton. Le sommet de Beyrouth, en 2002, devrait consacrer la francophonie dans son action pour une culture de paix et de tolérance, conclut-il. La conception dynamique de la francophonie a enfin été analysée dans son interaction avec la démocratie et les droits de l’homme, ensembles de valeurs intimement liées à la culture française et européenne, et dont cette dernière devrait être le fer de lance. Droits de l’homme Deux intervenants ont posé ce problème, sous ses différents aspects : le fondateur de l’association française pour la défense des droits de l’homme Nouveaux droits de l’homme (NDH), Pierre Bercis, et le représentant au Liban de NDH, Élie Abou Aoun. Si M. Bercis a abordé la question dans une perspective globale, plaidant pour la reconnaissance de «nouveaux droits de l’homme» en plus des droits de l’homme «traditionnels» reconnus dans la Déclaration et qu’il faut absolument continuer à promouvoir, M. Abou Aoun s’est intéressé à la relation entre les droits de l’homme et la francophonie, procédant à une étude de la situation au Liban. Lisant certains des actes d’accusations prononcés contre les militants aounistes et des Forces libanaises interpellés en août dernier – «exercer une pression médiatique sur le gouvernement, l’opposition à la politique du gouvernement» ou «l’incitation des partisans à manifester» –, M. Abou Aoun a affirmé : «Ce ne sont pas des extraits d’un oukase stalinien des années 40, mais des chefs d’inculpation élaborés en août 2001 par le procureur près le tribunal militaire au Liban contre plusieurs dizaines de citoyens libanais dont cinq sont toujours en détention sans jugement». Estimant «qu’à part quelques rares pays, le mouvement francophone rassemble un grand nombre de gouvernements responsables de graves violations des droits de l’homme», M. Abou Aoun a parlé de l’opération militaire syrienne d’octobre 1990, évoquant «la mort de centaines de civils par des massacres souvent intentionnels et des disparitions forcées niées jusqu’à nos jours tant par les autorités libanaises et syriennes». «Toutes les ONG des droits de l’homme évoquent dans leurs rapports la détention illégale et arbitraire en Syrie de centaines de Libanais, certains depuis 1976. Malgré le fait que des dizaines de personnes aient été libérées à deux reprises en 1998 et 2000, le sort de plusieurs autres reste inconnu dans le déni total des autorités concernées, avec toutes les conséquences sociales, familiales et humanitaires de ces disparitions forcées», a-t-il ajouté. M. Abou Aoun a par ailleurs indiqué que «la loi d’amnistie votée en 1991 consacre l’impunité totale pour tous les seigneurs de la guerre, la plupart d’entre eux responsables de bombardements sauvages et massifs, de massacres de civils désarmés». Évoquant en outre «les arrestations massives et le non-respect de la procédure légale», il a estimé que «le système judiciaire est devenu un instrument redoutable de règlement de comptes politiques». M. Abou Aoun a enfin déploré le statut des non-Libanais résidant au Liban, notamment «les conditions de vie lamentables des Palestiniens dans les camps de réfugiés et des travailleurs étrangers, notamment asiatiques, dont les passeports sont confisqués par leurs employeurs dès leur arrivée au Liban», mais aussi «la régression des droits économiques et sociaux pour les Libanais, surtout en ce qui concerne les conditions d’enseignement, l’absence de couverture sociale et médicale et la qualité des soins dans les hôpitaux publics, laquelle est en dessous des normes acceptables». «Si le mouvement francophone décide de devenir un système de valeurs au lieu d’être un club de chefs d’État violateurs des droits de l’homme et si ce mouvement décide de s’inscrire dans le sillage universel des droits de l’homme, il faut absolument que le respect de ces droits soit renforcé par des mécanismes de recours et de contrôle qui puissent dissuader, dans la mesure du possible, les gouvernements respectifs de violer les droits et de les ignorer», a-t-il conclu. Le mot de la fin est revenu à Claude Hagège, professeur au Collège de France, dont l’intervention a été lue en clôture du colloque : pour survivre, une langue doit s’entourer d’un patrimoine culturel et donc de valeurs, dont la promotion du respect des droits de l’homme, règles de jus cogens reconnues universellement. Une idée que l’Europe et plus particulièrement la France et les francophones devront méditer longuement, notamment dans l’attente du prochain sommet de Beyrouth, pour que la langue française demeure, et plus que jamais, vivante.
Les XIes rencontres internationales francophones du pays de Quercy se sont tenues vendredi 26 et samedi 27 octobre au Centre culturel français sur le thème : «Diversité culturelle et francophonie», sous la présidence du professeur Edmond Jouve et à l’initiative de l’Association des écrivains en langue française (Adelf). En tout, quelque vingt intervenants ont pris la...