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Actualités - CHRONOLOGIES

Largage de vivres en Afghanistan : confusion des genres, selon les ONG

«Action de marketing», «propagande», «insupportable habillage humanitaire» : les organisations non gouvernementales (ONG) ont dénoncé la «confusion des genres» après le largage de vivres en Afghanistan, simultanément aux premiers bombardements. «D’une main, vous tirez, de l’autre vous offrez de l’aide. Mêler la notion d’humanitaire avec tout ça, c’est un peu fort», s’insurge le président de Médecins sans frontières (MSF), Jean-Hervé Bradol, en réagissant, depuis le Pakistan, au parachutage de 37 500 rations alimentaires sur l’Afghanistan annoncé par les États-Unis. Les ONG, dont les expatriés ont presque tous quitté l’Afghanistan après les attentats du 11 septembre, craignent que ce type d’aide ne soit inadapté, malgré un «budget exhorbitant». Quelque 320 millions de dollars d’aide ont été promises aux Afghans par les États-Unis. «C’est une action de marketing, davantage destinée à l’opinion publique qu’à sauver des populations», déplore le responsable des programmes Afghanistan d’Action contre la faim (ACF), Thomas Gonnet. Il juge que le contenu des rations parachutées «n’est pas adapté à la malnutrition qui sévit chez des centaines de milliers de personnes». «Il leur faut du blé, de l’huile, du sucre et en aucun cas de la confiture de fraises ou du beurre de cacahuète emballés dans de sympathiques petits kits alimentaires», déclare M. Gonnet. D’autant que depuis le départ des expatriés, les Nations unies ont quasiment stoppé leurs envois de nourriture. «Avant le 11 septembre, elles distribuaient entre 20 et 25 000 tonnes par mois. À cause de la sécheresse, elles prévoyaient même de doubler cette aide. Mais depuis les attentats, seules 1 200 tonnes ont pu parvenir sur place», explique le directeur de Solidarités, Alain Boinet, une association présente depuis vingt ans en Afghanistan. En effet, hier, le Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations unies a interrompu toutes ses livraisons de nourriture à l’intérieur de l’Afghanistan et a conseillé à ses quelque 350 personnels locaux de rester chez eux, a annoncé à Genève la porte-parole du PAM, Christiane Berthiaume. Un dernier convoi est parti dimanche vers Kaboul, a précisé la porte-parole, sans pouvoir préciser si ce convoi est arrivé. M. Boinet considère que les parachutages ne sont pas la solution au problème humanitaire afghan. «Non seulement, c’est faux mais ce serait extrêmement grave», insiste-t-il. Les ONG estiment que les plus pauvres ne sont pas toujours les premiers destinataires des parachutages. «Les gens qui meurent de faim, ce n’est pas toute la population, rappelle M. Bradol. C’est la minorité ethnique laissée-pour-compte, ce sont les enfants, les personnes âgées, les veuves, bref tous ceux qui n’ont pas les moyens de récupérer l’aide». «Dans l’humanitaire, l’enjeu essentiel, c’est la qualité de la distribution au sol», ajoute le président de MSF en rappelant le précédent du largage alimentaire dans le sud du Soudan, en 1998, «très peu efficace en dépit d’énormes quantités». Aussi les ONG réclament-elles d’urgence de pouvoir revenir en Afghanistan et reprendre l’acheminement de vivres. «Nous savons où se trouvent les afflux de réfugiés. Ce n’est pas difficile de sécuriser des zones pour nous permettre de faire notre travail», estime le président de Médecins du monde (MDM), Claude Moncorgé. «Je ne nie pas que les militaires soient capables de compassion, poursuit-il. Mais à chacun son boulot. Bombarder, envahir une ville, faire tomber un régime, c’est une logique très éloignée de la nôtre». L’amalgame entre deux mots aux mêmes terminaisons – militaire et humanitaire – date déjà de plusieurs années, constatent les humanitaires. «On pensait qu’elle avait atteint son maximum avec le Kosovo, souligne M. Moncorgé. Mais peut-être va-t-on le dépasser avec l’Afghanistan».
«Action de marketing», «propagande», «insupportable habillage humanitaire» : les organisations non gouvernementales (ONG) ont dénoncé la «confusion des genres» après le largage de vivres en Afghanistan, simultanément aux premiers bombardements. «D’une main, vous tirez, de l’autre vous offrez de l’aide. Mêler la notion d’humanitaire avec tout ça, c’est un peu...