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Actualités - INTERVIEWS

Interview express - « La Syrie, nous la forcerons à partir » - Albert Moukheiber : « Libanais, unissez-vous, vous allez réussir »

La flamme que porte en lui Albert Moukheiber est toujours aussi forte. Il suffit de croiser son regard perçant de détermination pour comprendre : le «docteur» estime que le vrai combat est celui que l’on mène jusqu’au bout. En septembre 2000, Albert Moukheiber avait relancé, place de l’Étoile, le débat sur la présence syrienne, faisant ainsi du principal sujet des discours du patriarche maronite Nasrallah Sfeir l’un des thèmes des débats parlementaires et posant du même coup le problème au niveau de l’une des plus importantes institutions politiques. Certains voient dans cette prise de position un des éléments-clefs qui ont mené à la reprise du dialogue et à la parution des documents de Kornet Chehwane et du Forum démocratique. Albert Moukheiber n’a pas participé aux assises de Kornet Chehwane ; il était en convalescence après une maladie qui l’avait cloué 18 jours au lit. Que pense-t-il de ces deux manifestes ? «Le document de Kornet Chehwane a repris les positions du patriarche maronite Nasrallah Sfeir, que je soutiens. Je regrette qu’on l’ait peut-être forcé à accepter le redéploiement. J’ai toujours été contre un redéploiement. Il était prévu en 1992 et il est aujourd’hui dépassé. De plus, il s’agit d’une entente entre militaires. Un redéploiement ne serait concevable que si l’on fixait dès maintenant la date du retrait total de l’armée syrienne». Faut-il faire un calendrier pour programmer ce retrait ? «Pas de calendrier. Une seule date, souligne-t-il. Les Libanais ne peuvent plus comprendre l’attitude de la Syrie qui traite le Liban comme un pays conquis. Le gouvernement ne prend aucune décision pour montrer au monde entier que le Liban n’accepte pas la présence de l’armée syrienne. Moi, par exemple, je rappellerais (le secrétaire général du Conseil supérieur libano-syrien) Nasri Khoury pour consultation. Cela montrerait bien que nous ne voulons plus des forces syriennes chez nous», affirme-t-il, intraitable. «J’ai toujours essayé de faire comprendre au président syrien Bachar el-Assad qu’il devait suivre une nouvelle voie parce qu’il ne saurait continuer de suivre la politique de son père. Il faut revenir à la logique du Liban qui soutient la Syrie dans ses difficultés. Si la Syrie remettait le sort du Golan entre les mains des Libanais, ils en disposeraient beaucoup mieux que la Syrie elle-même», lance-t-il. Comment évalue-t-il le redéploiement qui a eu lieu ? «Imaginez-vous que Taëf, qui est au fond un accord conclu sous contrôle international, a été modifié par des militaires syriens et libanais. C’est un comportement ingrat». Pense-t-il, comme le général Aoun, que le redéploiement est une manœuvre ? «Il s’agit d’une perte de temps et d’un manque de respect pour les Libanais». Y a-t-il une possibilité, selon lui, que la Syrie se retire du Liban ? «Je vous assure, et vous pouvez l’imprimer en gros caractères : la Syrie, nous la forcerons à partir», rugit-il. «Je respecte M. Bachar el-Assad et je lui conseille, pour qu’il puisse gouverner la Syrie avec force et logique, de montrer au monde entier qu’il est prêt à retirer ses troupes du Liban». Est-il optimiste quant à ce retrait ? La réponse est désarmante : «Je suis optimiste parce que c’est mon droit». L’élément stabilisateur druze On compare votre intransigeance vis-à-vis de la présence syrienne à celle du général Michel Aoun, qu’en pensez-vous ? «Avec le général Aoun, il y a tout le peuple libanais, à mon avis. Il y a une partie qui se déclare et une autre partie qui a peur de le faire. Les Syriens essayent de modifier l’opinion des Libanais en faisant pression sur les musulmans. Cela ne sert à rien, les musulmans sont aussi hostiles à l’occupation syrienne que le reste des Libanais». Et d’ajouter : «Je suis pour tous ceux qui cherchent à œuvrer pour le retrait de l’armée syrienne du Liban». Mais qui sont-ils aujourd’hui ? «La plupart des Libanais. Je commettrais une offense en nommant un tel et en oubliant un autre. La majorité des Libanais est opposée à la présence de l’armée syrienne. La Syrie nous a menés à la faillite et nous ne pouvons plus la soutenir économiquement». Que pense-t-il des initiatives du président Lahoud pour le rééquilibrage des relations libano-syriennes ? «Je suis contre tout rééquilibrage tant que l’armée syrienne est au Liban. D’ailleurs, comment les Syriens pensent-ils que le Liban doive accepter leur présence sur son territoire alors qu’ils réclament, eux, la libération de nos amis les Palestiniens ? Comment concilient-ils ces deux logiques ?». Qu’en est-il de ses rapports avec le Premier ministre Hariri ? «Je le respecte beaucoup. Sans lui, la ruine économique du pays aurait été totale». Et Walid Joumblatt ? «C’est un excellent élément. Le druze a toujours été un élément stabilisateur au Liban. Joumblatt ne recule devant aucune action susceptible de favoriser l’union des Libanais». Ses relations avec Amal et le Hezbollah ? «Je les respecte. Il ne m’appartient pas de les juger. Moi, je travaille dans mon camp». Et le Rassemblement pour la république, compte-t-il en faire un parti au vrai sens du terme ? «Oui. C’est un parti multiconfessionnel dont le but immédiat est de protéger les musulmans, qui partagent nos convictions, des Syriens qui les attaquent». Et de conclure, avec force et conviction : «Libanais, unissez-vous, vous allez réussir». «Sans peur et sans reproche», le vieux lion de la montagne, comme le chevalier Bayard. Un esprit libre sur lequel rien, pas même le temps, n’a de prise.
La flamme que porte en lui Albert Moukheiber est toujours aussi forte. Il suffit de croiser son regard perçant de détermination pour comprendre : le «docteur» estime que le vrai combat est celui que l’on mène jusqu’au bout. En septembre 2000, Albert Moukheiber avait relancé, place de l’Étoile, le débat sur la présence syrienne, faisant ainsi du principal sujet des...