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Actualités - REPORTAGES

Fondation maronite internationale - Politique et lobbying aux États-Unis

La Fondation maronite internationale est née en 1994, à la suite des recommandations du congrès maronite international qui s’est tenu à Los Angeles (Californie) cette même année. Elle est enregistrée dans l’État américain de Californie et jouit d’un statut d’exemption de taxes. La fondation regroupe notamment des leaders maronites locaux issus d’une grande partie de villes et d’États américains. «La fondation exerce plusieurs activités mais l’événement le plus important qu’elle prépare actuellement est le prochain congrès international maronite qui devrait se tenir en juin 2002», précise Élias Ayoub, président du conseil de la fondation. Pourquoi l’appellation «internationale» ? «Toutes les organisations maronites reconnues dans le monde sont représentées dans notre conseil d’administration, qu’elles soient basées en Australie, au Mexique, au Venezuela, au Koweït, au Brésil ou en Suisse, précise-t-il. Cela ne veut pas dire que ces organisations font partie de la nôtre. Elles gardent toute leur indépendance, mais leur représentation au sein de notre conseil d’administration facilite une collaboration étroite entre nous». La fondation, du fait de son statut, n’exerce pas que des activités socioculturelles, mais se mêle aussi de politique et de lobbying «non seulement pour les maronites, mais pour les intérêts de tous les Libanais». «Nous nous impliquons dans les événements politiques aux États-Unis, notamment au niveau des élections du Sénat de la Chambre des représentants, poursuit M. Ayoub. Nous visons entre dix et vingt sénateurs et nous contribuons au financement de leurs campagnes, afin de pouvoir nous adresser à eux en cas de besoin. La plupart sont américains, mais certains sont d’origine libanaise». Prié de donner un exemple récent de lobbying, il précise : «Notre seule allégeance politique est à Bkerké. Le conseil des évêques nous fait parvenir ses communiqués que nous publions sur notre site Internet, et nous les envoyons aux journaux locaux de différentes villes». Les activités socioculturelles visent principalement les émigrés libanais des États-Unis dans le but de les aider, notamment les plus jeunes, à ne pas perdre de vue leurs origines. «Nous faisons en sorte que les enfants fassent connaissance, souligne-t-il. Une personne est chargée de leur parler de leur pays d’origine et du patrimoine maronite. Nous coopérons par ailleurs de façon assidue avec l’Église maronite aux États-Unis. Deux évêques sont en mission dans ce pays, l’un à New York et l’autre à Saint Louis. Sans compter les prêtres». Une fédération paralyserait les organismes A la question de savoir combien de membres compte la fondation, M. Ayoub déclare qu’il ne peut donner aujourd’hui de chiffres significatifs parce que l’organisation est en pleine mutation. «Nous formions un mouvement ouvert uniquement à l’élite, explique-t-il. Les membres du conseil d’administration étaient tous des leaders locaux, représentant à eux seuls une grande communauté. Nous avons tenu compte dans notre choix de la nécessité pour eux de n’être pas mus par des intérêts personnels ou politiques; pas de double agenda donc. Toutefois, lors du conseil d’administration qui s’est tenu en avril dernier, nous avons décidé d’ouvrir la porte aux demandes d’inscription. Officiellement, ces inscriptions devraient débuter en août». Combien de membres s’attendent-ils à voir affluer? «Des milliers certainement», affirme-t-il. Combien de maronites vivent aujourd’hui aux États-Unis ? «Environ un million et demi», répond-il. Les citoyens américains d’origine libanaise sont estimés à trois millions. Qu’en est-il de la création d’un réseau de coopération entre les différentes organisations maronites dans le monde, promise par M. Harès Chehab, président de la Ligue maronite au Liban ? Émile Yammine, secrétaire général de la fondation au Liban, qui était présent à la réunion des ligues maronites qui s’est tenue à Rome en marge de la cérémonie de canonisation de sainte Rafqa, explique : «Nous avons discuté des possibilités de coopération entre les différentes organisations maronites et d’un programme de travail. Il a été décidé que l’idée d’une fédération devrait être abandonnée pour l’instant parce qu’elle n’atteint pas nécessairement les objectifs voulus». Quels sont les obstacles devant la création d’une telle fédération ? «Les difficultés sont logistiques; elles portent sur l’exécution de notre programme, poursuit-il. En effet, si le leadership de cette fédération se trouve aux États-Unis, quelles seraient les conséquences pour les autres organisations ? Un leadership trop centralisé risquerait de paralyser leur action, souvent extrêmement localisée. Il vaut mieux que ces organisations demeurent des “ambassades” dans leurs propres pays, mais qu’elles coopèrent de façon plus assidue avec les autres, tout en suivant les grandes lignes d’un plan d’action décidé avec la Ligue maronite à Beyrouth». «D’une part, nous devrions dorénavant tous suivre un seul programme d’action, dit M. Yammine. D’autre part, nous obéirons tous, alors, aux mêmes valeurs et aux mêmes principes, et œuvrerons à la réalisations des mêmes objectifs. Le programme d’action a été exposé par la Ligue maronite et approuvé par tous les présents. Il devrait cependant être développé par le biais du comité de suivi qui a été désigné et qui devrait en faire un document de travail définitif pour le rendre public lors d’un séminaire organisé par la Ligue maronite, nous l’espérons, cette année, probablement à Beyrouth». Enregistrer les jeunes Américains d’origine libanaise Par ailleurs, le plus grand projet entrepris aujourd’hui par la fondation consiste à enregistrer les enfants qui naissent aux États-Unis de parents libanais. «La plupart d’entre eux ne sont jamais enregistrés auprès des ambassades ; il se fondent peu à peu dans la société américaine jusqu’à perdre leurs origines, dit M. Ayoub. Nous avons mis au point un plan d’action avec des coordinateurs nationaux, des représentants dans chaque ville et chaque État. Nous devrions travailler en étroite collaboration avec l’Église pour aider les couples à accomplir les formalités». Qu’en est-il des adultes d’origine libanaise qui ont grandi aux États-Unis sans jamais être porteurs de leur nationalité d’origine ? «Ce problème est très complexe, estime-t-il. Nous y avons réfléchi mais sans jamais trouver de solution. Lorsque les dernières statistiques officielles ont été effectuées dans les années trente au Liban, le gouvernement avait alors donné une chance aux émigrés non enregistrés de le faire. Ceux qui ont raté cette occasion n’ont plus aucune chance d’obtenir le passeport. Or une réponse aux questions que se posent ces émigrés, lésés dans leurs droits, devrait provenir de Beyrouth». Ont-ils soulevé la question avec des responsables ici ? «Nous l’avons fait, mais nous nous sommes retrouvés dans une impasse, dit-il. C’est vraiment dommage. Des personnes n’ayant vécu que quelque temps au Liban ont le droit de devenir libanais, alors que nos compatriotes de souche n’ont pas le droit d’avoir leur propre nationalité !». Les requêtes des émigrés (et pas seulement les maronites) ne s’arrêtent pas là : l’une des revendications les plus pressantes porte sur le droit de vote, mais à partir de leur pays d’adoption, tout comme les citoyens de tous les autres pays du monde. En vain. «Si les jeunes Libanais ont le devoir de faire leur service militaire, ils devraient aussi avoir le droit de voter, souligne M. Ayoub. Là aussi, nous arrivons à une impasse… pour des raisons politiques». Il faut préciser que la fondation entreprend également d’assister les jeunes émigrés débarqués nouvellement aux États-Unis. À la question de savoir si les tensions politiques observées au Liban s’exportent au sein des communautés libanaises à l’étranger, M. Ayoub confirme : «Malheureusement, elles existent partout. Mais elles ont tendance à s’estomper avec le temps. Les maronites des États-Unis se sont entendus dernièrement pour dépasser les conflits, fait somme toute normal dans toute société, pour se placer sous la bannière de Bkerké». Leur lobbying consistera donc de façon primordiale à faire circuler les principes évoqués par le patriarche ? «Nous mettons notre lobbying au service du Liban, tout en suivant le chemin tracé par le patriarche», confirme-t-il. Les adhésions à la fondation seront-elles réservées aux seuls maronites ? «Non, nous sommes ouverts aux différentes confessions et nous allons inviter certaines personnes non maronites à se joindre à nous», assure M. Ayoub. Ont-ils un projet pour faire ralentir l’immigration massive des Libanais vers l’étranger, notamment les États-Unis ? «Ce souci ne nous quitte pas, affirme-t-il. En 1997, nous avons organisé une conférence à Los Angeles axée sur le thème : “Comment faire affluer les investissements vers le Liban ?”. Les participants se sont montrés très intéressés par d’éventuelles possibilités. Mais le problème de la sécurité les effarouche toujours. Les investisseurs, même les Libanais d’origine, attendent une solution au problème du Moyen-Orient pour agir». Mais, selon M. Ayoub, les émigrés qui se sentent concernés par le problème ne baissent pas les bras pour autant : ils pensent investir dans une banque qui sera basée au Liban et dont les bénéfices iraient à une institution chargée de créer des projets, notamment des usines, des écoles et des hôpitaux. «Pour garder les jeunes au Liban, il faut leur assurer l’emploi, l’éducation et la médication», estime-t-il. Les formalités sont-elles facilitées aux émigrés qui désirent aider le Liban ? Comment décrit-il leurs relations avec l’État ? «Le gouvernement nous a toujours facilité la tâche», répond M. Ayoub.
La Fondation maronite internationale est née en 1994, à la suite des recommandations du congrès maronite international qui s’est tenu à Los Angeles (Californie) cette même année. Elle est enregistrée dans l’État américain de Californie et jouit d’un statut d’exemption de taxes. La fondation regroupe notamment des leaders maronites locaux issus d’une grande partie de...