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Actualités - CHRONOLOGIES

Affaire NTV : l’opposition à Poutine privée - de sa principale tribune

Les défenseurs des droits de l’homme, l’opposition réformatrice et les critiques de Vladimir Poutine sont désormais privés de leur principale tribune avec le passage du côté du pouvoir de la télévision NTV. La suppression de cette voix de l’opposition s’inscrit dans un contexte de reprise en mains du pays par le président Vladimir Poutine qui a déjà remis au pas les régions indociles et réduit l’opposition à la Douma (Chambre basse), à peine plus d’un an après son arrivée au pouvoir. «Il s’agit d’une offensive personnelle de Poutine contre la liberté de parole. Alfred Kokh et Boris Jordan (les nouveaux dirigeants de NTV) ne sont que des hommes de paille», estime le politologue Andreï Piontkovski. La nouvelle direction de NTV, issue du géant gazier Gazprom dont le principal actionnaire est l’État, a pris le contrôle effectif de la chaîne dans la nuit de vendredi à samedi, mettant fin au mouvement de résistance des journalistes. NTV est l’une des trois chaînes d’audience nationale, aux côtés des télévisions publiques RTR et ORT, dans un pays où l’impact de la presse écrite est limité en dehors des grandes villes. La chaîne faisait une large place aux débats sur la vie politique russe, notamment avec des émissions comme «le héros du jour», «la voix du peuple» et «Itogui» (bilans) animées par trois journalistes qui ont quitté la chaîne ce week-end, refusant de se soumettre à la nouvelle direction. NTV était également la seule à critiquer la guerre menée en Tchétchénie par Vladimir Poutine, offrant ses micros aux défenseurs des droits de l’homme ou diffusant des reportages sur les réfugiés tchétchènes. «Il est évident que les opposants à la politique de Poutine ont perdu le contrôle de leur plus important moyen d’expression politique», estime le politologue Sergueï Markov. Les journalistes dissidents de NTV se sont réfugiés sur TNT, une autre chaîne du groupe Media-Most, l’ex-propriétaire de NTV. Mais TNT est loin d’avoir l’audience de NTV. «Le pouvoir va trouver tous les prétextes» pour empêcher les dissidents de NTV de se faire entendre, prédit Andreï Piontkovski. Il dispose notamment pour cela d’un outil précieux : des tribunaux dont le manque d’indépendance a souvent été critiqué. Après la prise de contrôle de NTV par une direction pro-Kremlin, «la verticale du pouvoir soviétique est pratiquement reconstituée», a estimé ce week-end le défenseur des droits de l’homme Sergueï Kovalev, député de la droite réformatrice à la Douma, qui a passé sept ans dans les camps soviétiques. «À l’époque de Boris Eltsine, il existait des contre-pouvoirs comme la Douma, le Conseil de la fédération et les médias. Nous voyons aujourd’hui comment ils disparaissent petit à petit. Nous avions été prévenus, les idéologues officiels nous ont dit assez souvent qu’une “démocratie dirigée” devait être instaurée» en Russie, souligne Andreï Piontkovski. Depuis son élection le 26 mars 2000, l’ex-agent du KGB Vladimir Poutine a réduit considérablement les pouvoirs des gouverneurs des 89 régions et territoires de la Fédération russe, leur supprimant le droit de siéger à la Chambre haute. À la Douma, le parti pro-Kremlin Unité a désormais le soutien d’un ex-ennemi du Kremlin et de son parti, le maire de Moscou Iouri Loujkov. Enfin, pour la première fois depuis 1995, les communistes ne sont plus, depuis la semaine dernière, la première force à la Douma, disposant du même nombre de députés qu’Unité (85 chacun).
Les défenseurs des droits de l’homme, l’opposition réformatrice et les critiques de Vladimir Poutine sont désormais privés de leur principale tribune avec le passage du côté du pouvoir de la télévision NTV. La suppression de cette voix de l’opposition s’inscrit dans un contexte de reprise en mains du pays par le président Vladimir Poutine qui a déjà remis au pas les régions...