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Actualités - CHRONOLOGIES

PARLEMENT - Le projet de loi sur l’acquisition des biens-fonds par les étrangers amendé en commission - Des brèches ont été colmatées, mais on peut encore nettement mieux faire

Le projet de loi sur l’acquisition des biens-fonds par les étrangers, présenté par le gouvernement Hariri à la commission parlementaire de l’Administration et de la Justice, a été amendé hier, au bout, uniquement, de deux jours de travaux. Un premier amendement, le projet sera ensuite soumis aux députés en séance plénière. Une première chose : des failles ont été colmatées, c’est un fait. Mais il en reste, et pas des moindres. Et il aurait largement mérité qu’on lui accorde beaucoup plus de temps, «un mois d’études et d’argumentation n’aurait pas été superflu», a même estimé une source parlementaire. Il aurait également mérité d’être examiné par des experts extra-parlementaires, des juristes, «des membres du Conseil d’État ou du Conseil constitutionnel, par exemple...» C’est un projet à la fois très complexe et pas toujours très cohérent, et qui est censé intéresser l’ensemble des Libanais, du moins par l’importance de ses enjeux – qui n’ont sans doute pas échappé au gouvernement en général et à Fouad Siniora en particulier ni aux députés membres de la commission : relancer les investissements et empêcher, au maximum, ne serait-ce que l’idée d’une implantation des réfugiés palestiniens. «Sans aucune ségrégation raciale», a tenu à préciser cette source parlementaire interrogée par L’Orient-Le Jour. Aucun étranger, qu’il soit personne physique ou morale, ne peut acquérir des biens-fonds au Liban, sauf après décret du Conseil des ministres. Voilà, en gros, ce que dit la loi de 1969, et sur quoi s’est basé le gouvernement pour donner naissance au nouveau projet étudié hier en commission parlementaire. Les individus, Libanais d’origine ou ressortissants arabes, pouvaient acquérir jusqu’à 5 000m2 de terrains sur tout le territoire libanais, mais pas plus de 3 000 dans Beyrouth. À une condition : qu’ils y construisent avant cinq ans. Quant aux sociétés, elles bénéficiaient d’un plafond de 10 000m2, à condition que 51 % des parts des SARL soient purement libanaises – ou le tiers des actions des SAL. Avec le nouveau projet de loi, c’est bien plus restrictif : sociétés comme individus ne peuvent plus acquérir que jusqu’à 3 000m2 de biens-fonds. «Tout cela constitue un bon garde-fou, regardez en Suisse, ils sont beaucoup plus restrictifs...» Sauf que là où le bât blesse, c’est dans la durée octroyée aux acquéreurs pour construire : non seulement elle reste fixée à cinq ans, mais elle devient renouvelable, ce qui, pour un cabinet obsédé par la relance des investissements, semble carrément aberrant. «Oui, mais l’administration libanaise est lente», aurait-on argumenté place de l’Étoile. Parfois, la preuve, le nivelage par le bas atteint des proportions effarantes, et ce n’est apparemment pas de sitôt que le gouvernement se déciderait à réformer l’administration. Monopole et/ou implantation Autre restriction, «et ça, c’est bien» : le permis qui serait éventuellement accordé aux sociétés, et qui concernait 5 % de la surface d’un mohafazat selon la loi de 1969, n’autorise plus aujourd’hui les acquisitions de biens-fonds que sur 3 % de la surface territoriale edificandi, excepté pour Beyrouth : 10 % – quelqu’un ayant même proposé, lors de la réunion d’hier, 15 %. «Mais là c’est plus rassurant, vu qu’il reste 1 250 000m2 d’appartements à vendre, dont la majorité est aux mains de Solidere...» Ce qui par contre pourrait s’avérer extrêmement dangereux, c’est d’abord le risque de prolifération de prête-noms et le détournement des lois lorsqu’il n’y a pas de plafond. Selon la loi de 1969, des permis pouvaient être accordés aux grandes sociétés touristiques industrielles de développement, pour une surface allant jusqu’à 50 000m2. Avec le nouveau projet, les sociétés ne sont plus limitées par aucun plafond – excepté les 3 % du territoire libanais. Le danger du monopole serait alors énorme, tout comme celui de l’encouragement à l’implantation palestinienne. Pour les partisans du non-plafond, l’argument-choc aurait été, au cours des débats, «et si Disneyland veut s’investir au Liban ?», ou, à l’instar du président de la commission de l’Administration et de la Justice, le député Mikhaïl Daher : «tout le Liban profiterait ainsi des projets touristiques». Quant aux détracteurs de ce non-plafond, ils avancent l’exemple d’une société aux capitaux, «disons, israélo-américano-canadiens, et qui construirait une série d’HLM qui serviraient à loger les réfugiés». Les uns, minoritaires, auraient donc proposé aux autres, majoritaires, d’exclure de ce non-plafonnement les habitations. «Non, parce que ceux qui investiraient de cette manière ne le feraient certainement pas s’ils n’étaient pas sûrs d’y gagner au change», leur aurait-on rétorqué. Dans tous les cas, au sujet des réfugiés palestiniens, L’Orient-Le Jour a appris qu’une proposition du député de la Békaa-Ouest Robert Ghanem a été finalement adoptée après moult tergiversations. Une proposition selon laquelle toute personne physique apatride – sans carte d’identité – n’aurait pas le droit d’acquérir un quelconque bien-fond. Autre mesure décidée enfin pour favoriser les investissements : les sociétés – SARL comme SAL – dont les capitaux seraient majoritairement libanais verraient 50 % de leur acquisition exemptées du plafond de 3 %. En gros, le plafond, dans ce cas-là, s’élèverait jusqu’à 6 %. De quoi, concrètement, encourager les investisseurs comme la participation libanaise. Il n’empêche, ce projet, faut-il le répéter, est dans l’état un véritable casse-tête : il faut en même temps drainer le maximum d’investissements dans le pays tout en veillant à ce que le Liban ne soit pas «vendu» aux étrangers. La solution adoptée, par exemple, par le Royaume-Uni ou certains pays arabes aurait sans doute dû être étudiée – celle-là qui consiste à louer, pour 30, 50 ou 99 ans, des biens-fonds aux étrangers. Un constat : ce projet de loi a été examiné, amendé, trop hâtivement. Ce qui fait qu’on n’en verra les failles qu’une fois mis en pratique. Et dans ce cas-là, parfois, comme souvent au Liban, c’est trop tard...
Le projet de loi sur l’acquisition des biens-fonds par les étrangers, présenté par le gouvernement Hariri à la commission parlementaire de l’Administration et de la Justice, a été amendé hier, au bout, uniquement, de deux jours de travaux. Un premier amendement, le projet sera ensuite soumis aux députés en séance plénière. Une première chose : des failles ont été...