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Actualités - CHRONOLOGIE

Beyrouth appréhende une paix à ses dépens

Loin des surenchères coutumières, plusieurs officiels avouent en privé que le tournant des négociations s’engage assez mal pour le Liban, parce qu’en réalité il a cédé à autrui son droit de vraie parole. Ces responsables, qui ne disent pas pourquoi ils ne réagissent pas en conséquence, soulignent que le pays, maillon faible de la chaîne régionale, a tout l’air de devoir servir aux uns et aux autres de monnaie d’échange, ainsi que de tare pour équilibrer la balance. Se cherchant de vagues excuses, ces mêmes personnalités soutiennent que le Liban ne peut pas parler pour lui-même et se faire entendre tant que ses composantes sont divisées. Dès lors, ils prévoient que souveraineté, indépendance et libre décision autonome resteront pour longtemps de simples fictions ou slogans creux. – Mais d’autres dirigeants, qui savent que les murs ont des oreilles, maintiennent imperturbablement le cap sur la ligne principale de la propagande officielle : non, proclament-ils, le Liban n’est pas seul. Les décideurs veillent de près sur ses intérêts et ils sont si forts qu’ils arriveront à le protéger des intrigues sionistes. – En dehors des cercles officiels, certains entretiennent le rêve d’un sauvetage par les Occidentaux. Ils s’accrochent plus particulièrement à l’Amérique. Ils se réfèrent à l’ambassadeur américain, M. David Satterfield, qui, rencontrant des étudiants libanais, leur a dit : «Nous prévoyons un merveilleux avenir pour ce pays, malgré les défis intérieurs et extérieurs». Quant au président Clinton, il a glissé à l’oreille du président Hariri, à Rabat : «Je crois que vous allez entendre de bonnes nouvelles pour le Liban dans les mois qui viennent». Ces pôles locaux prêtent surtout foi, avec une touchante crédulité, aux promesses faites par Madeleine Albright, il y a deux ans, lors de son passage au Forum de Beyrouth. Lyrique, le secrétaire d’État avait déclaré : «Vous luttez pour édifier un nouveau Liban à l’orée du vingt et unième siècle. Nous voulons voir vos efforts réussir. Nous souhaitons contempler un Liban reconstruit dans son bel écrin. Des aéroports sûrs, des marchés florissants, des flots de touristes venant des quatre coins du monde, de jolies plages, de fières montagnes, le cèdre éternel qui couronne un fabuleux patrimoine historique. Nous respectons votre conception d’un Liban à reconstruire non pas sur un autre modèle, non pas sous la coupe d’une quelconque puissance étrangère. Nous souhaitons un Liban fait par vous, pour vous, peuple libanais. Nous vous soutiendrons pour réaliser un Liban totalement indépendant, unifié, souverain, libre de toute tutelle». Oubliant que c’est exactement le même discours que les Américains tiennent depuis vingt-cinq ans, ces parties locales pensent que lors de sa prochaine tournée régionale, destinée à donner le coup d’envoi des négociations, Albright va mettre l’accent sur le cas libanais. À leur avis, Washington estime que cette carte ne doit être utilisée par aucun des voisins de ce pays. Ce qui est difficilement concevable en pratique. D’autant que cela reviendrait à dire que le Liban constituerait une part que les Américains se réserveraient à eux-mêmes. On peut également souligner que, durant ces deux dernières années, le Liban s’est ancré encore plus solidement à la Syrie, à travers la promotion par ses dirigeants de la théorie du jumelage. On en est arrivé comme on sait au point que la 425 se fond dans la 242 et que la récupération du Sud se trouve liée à celle du Golan.
Loin des surenchères coutumières, plusieurs officiels avouent en privé que le tournant des négociations s’engage assez mal pour le Liban, parce qu’en réalité il a cédé à autrui son droit de vraie parole. Ces responsables, qui ne disent pas pourquoi ils ne réagissent pas en conséquence, soulignent que le pays, maillon faible de la chaîne régionale, a tout l’air de...