Hommage à Samia Toutounji , disparue il y a dix ans

Avant d’être poète par l’écriture, Samia Toutounji était, en son être même, une incarnation poétique rayonnante de beauté et de charme, de culture et de goût, d’intuition et de sensibilité, d’ouverture d’esprit et de générosité de cœur. Passionnée et réservée, transparente et secrète à la fois, elle était dure envers elle-même et les autres parce qu’elle détestait les concessions, et cependant capable d’une extrême douceur parce qu’elle possédait un sens exquis de l’amitié et de l’amour. Animatrice culturelle, elle fut présidente de Dar el-Fan Wal Adad. Mais c’est dans la promotion artistique qu’elle trouva plus qu’un métier, une véritable vocation. Pour elle, l’art ne fut jamais un simple produit à vendre. L’important à ses yeux était l’artiste, non le client. Une fois qu’elle l’avait élu, parce qu’elle avait foi en l’authenticité de son expérience et de la qualité de sa démarche créatrice, elle se transformait en attentive et prévenante compagne de route, lui apportant un soutien moral et financier, certes, mais surtout un soutien critique par de fréquentes visites à l’atelier et des dialogues nourris à propos des œuvres en train de naître. C’est pourquoi et ses artistes chevronnés et les jeunes talents qu’elle poussait dans la bonne voie se sentirent soudain orphelins et désemparés de sa tragique disparition. J’en connais qui, pendant des mois et des mois, ne purent plus toucher un pinceau. Quel plus bel hommage à sa présence désaltérante que cette traversée du désert? Et Beyrouth fut et dmeure beaucoup plus désert d’avoir perdu en Samia Toutounji une femme d’exception et en Platfform une galerie hors normes. Joseph TARRAB