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Actualités - ANALYSE

Bilan en demi-teinte

Moins de trois mois après la formation du gouvernement, on commence déjà à lui demander des comptes. L’enthousiasme des premiers jours a cédé la place à une prudence sceptique, voire à une méfiance timide. Si certains pensent qu’il est encore trop tôt pour se prononcer sur l’action gouvernementale, l’opinion publique et une partie de la classe politique n’ont pas attendu l’heure du bilan pour se poser des questions. Le tandem Hariri-Joumblatt parle carrément de «faillite», alors que Najah Wakim, que l’on croyait recyclé dans l’école loyaliste, critique les «hésitations fatales» du Cabinet. Le gouvernement a donné un coup de frein, tout le monde le sait. Mais beaucoup aimeraient connaître les raisons de ce changement de vitesse et surtout ses conséquences sur le crédit populaire dont jouit le nouveau régime. La situation est tellement confuse que des hommes politiques qui n’ont pas ménagé leur soutien à l’équipe actuelle se trouvent dans l’embarras. Zaher el-Khatib, Moustapha Saad, et bien d’autres encore, observent un silence gêné. Omar Karamé et Najah Wakim, eux, ne cachent pas leurs griefs et ont repris leurs critiques. Ils n’épargnent même plus Sélim Hoss avec lequel, pourtant, il ont mené dans les rangs de l’opposition de dures batailles contre l’ancien régime. Il y a à peine un mois, l’image était très claire. D’un côté, le nouveau régime et ceux qui le soutiennent et de l’autre, ses détracteurs regroupés autour de MM. Rafic Hariri et Walid Joumblatt. Aujourd’hui, il y a une troisième force, les déçus. Ceux-là reprochent au président Hoss son manque de combativité face à des adversaires qui ne reculent devant rien pour «l’affaiblir et le discréditer». «Au lieu de faire front, le chef du gouvernement préfère jeter du lest, déclare un député qui fait partie de cette troisième force». Ce même député ajoute que le président Hoss a fourni à ses détracteurs, à cause de ses hésitations, les armes avec lesquelles ils le combattent. Ces néo-opposants – si on peut les appeler ainsi – reprochent aussi au gouvernement l’absence d’un politique économique et financière bien définie. «On a l’impression que les principales orientations du régime précédent ont été adoptées, affirme la même source. Même au niveau de la politique fiscale, la vision du gouvernement est en deçà de celle développée par le président Émile Lahoud dans son discours d’investiture». Lors d’une réunion avec M. Hoss il y a quelques jours, M. Wakim a eu l’impression que le gouvernement a réduit ses ambitions dans le domaine budgétaire. «Je pense que l’objectif est de maintenir le déficit à 40 %, dit-il. Cela veut dire qu’à la fin de l’année, la dette publique va encore augmenter». Un groupe de députés et d’hommes politiques a entrepris une campagne de lobbying auprès des présidents Lahoud et Hoss pour les convaincre que le seul moyen pour renflouer le trésor est de récupérer les biens de l’État «volés pendant le régime précédent». Cependant, l’idée d’ouvrir les dossiers du passé n’enthousiasme visiblement pas le chef du gouvernement qui a été la cible d’une féroce campagne de dénigrement pour bien moins que cela. Conscient de la situation difficile dans laquelle se trouve le gouvernement, le président Lahoud s’est vu contraint d’intervenir personnellement dans la polémique. Mais c’est une arme à double tranchant. Le chef de l’État se met déjà à puiser dans son propre crédit pour soutenir le gouvernement. Ce crédit n’est pas infini, Émile Lahoud le sait et ses détracteurs aussi. Si aucune action d’éclat n’est entreprise dans les deux prochains mois, le régime risque bien de se retrouver en train de gérer un compte débiteur.
Moins de trois mois après la formation du gouvernement, on commence déjà à lui demander des comptes. L’enthousiasme des premiers jours a cédé la place à une prudence sceptique, voire à une méfiance timide. Si certains pensent qu’il est encore trop tôt pour se prononcer sur l’action gouvernementale, l’opinion publique et une partie de la classe politique n’ont pas...