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Actualités - REPORTAGES

Théâtre - Une mise en scène courageuse de Michel Jabre, au Monnot "La vie est belle"quand on brave les interdits (photos)

Approchez, braves gens, mais approchez aussi, gens mal élevés ! Voilà Michel Jabre et sa tonitruante smala de quatorze acteurs dans un théâtre qui vise à dénoncer les poncifs de notre société et les discours-clichés des responsables : Al-Hayat Helwa ( La vie est belle), c’est une parabole «satirico-grotesque dans un style de jeu burlesque», note le metteur en scène. La pièce comporte quelques tirades bien senties et, ma foi, plutôt hardies. Elles ont réussi à braver la censure. Mais dame Anastasie risque de charcuter, là ou le bât blesse. Vous êtes prévenus. Sur les planches du Monnot, jusqu’au 30 novembre. Jamil el-Mad’ouss (Jamil l’écrasé) est chômeur, il vit aux crochets de sa femme. Un soir, il réveille sa tendre moitié. Il a faim. Wafa peut-t-elle lui amener un bout de «kafta» à se mettre sous la dent ? Excédée, la Wafa en question se rebiffe. Jamil pique sa crise. Le ton monte. Ils vident leur sac. Sous le coup de la colère, Jamil claque la porte. Sa femme est persuadée qu’il est sorti se suicider. Elle appelle le voisin à l’aide. La nouvelle se répand comme une traînée de poudre. Rappliquent les représentants des partis politiques, des communautés religieuses, les syndicats, les intellos… Tels des rapaces, ils cherchent à s’approprier la proie et rallier le suicidé à leurs causes. La vie est belle est inspirée du Suicidé du dramaturge soviétique Nicolaï Erdman. La mise en scène de Michel Jabre la place dans un registre impossible à définir, qui navigue aux confins de nombreux genres, de la commedia dell’arte à la bédé, de l’opéra bouffe au chansonnier. Il utilise l’humour et le burlesque, accordant un rôle primordial à la musique, au chant et à la danse comme symbole de vie et de mouvement. Sans pour autant diminuer de l’importance des dialogues, construits comme des bouts de «discourailles», pêchés du langage des personnalités qui se trouvent sous les feux de la rampe : un brin de vocabulaire politique, une pincée de «religieux» ; un bout de «confessionnel», des tournures de phrases idéologiques… Le suicide. Moral ? La vie est belle est avant tout une prise de position très claire de Michel Jabre contre toutes les formes de manipulation, qu’elles soient d’hier ou d’aujourd’hui, médiatiques ou politiques, sociales ou religieuses. Pour Jabre, le théâtre n’est qu’un prétexte à la parabole sur la trahison et la manipulation, la puissance et la gloire, les victimes du système. Jabre s’attaque aux politiciens de tous bords, à ces électoralistes sans scrupules qui se compromettent dans toutes les formes du mensonge, ainsi qu’à leurs principaux complices, les médias, qui disposent du pouvoir le plus fort, celui de distiller l’information à leur gré et de maintenir le monde à l’état d’ignorance. Mais tout cela n’est pas exposé aussi crûment. Cela se révèle à travers l’histoire d’un couple, ses illusions et désillusions, ses joies et ses peines et ce fameux suicide qui n’en finit pas d’aboutir. La satire est constamment au point et perçante, n’hésitant pas à troubler les tabous et à exposer au grand jour des caractéristiques sombres. Une foule d’éléments typiques de notre culture sont satirisés, et si quelques-unes de ses pointes sont un peu faciles, d’autres frappent davantage dans le mille. Le spectacle est parfois inégal : la qualité des gags passe d’exceptionnelle à médiocre dans l’espace de quelques secondes seulement, mais les bons moments inspirés, s’ils peuvent à eux seuls faire de la pièce une réussite, valent certainement la peine d’être vus. La troupe des acteurs est uniformément convaincante. Ces jeunes étudiants de l’UL et de l’Iesav campent des personnages de petit bourgeois, développant le thème du “petit homme” dans le contexte de la société post-guerre et la promiscuité de l’appartement communautaire. La vie est belle est une tragi-farce, composée avec une science consommée des situations et de la langue. Cette pièce a pour thème “l’imposture” ; pour personnage principal un faux suicidé et pour événement central (qui vient en conclusion) un faux enterrement. La conclusion forte et sombre se veut mémorable et en parfaite unité avec ce qui a précédé. L’écriture de la pièce, incisive, rapide, décrit des personnages comiques, met en relief les différences sociales et culturelles, pour entonner, au-delà du tragique, un merveilleux hymne à la vie. Une magnifique «machine à jouer» pour des comédiens amateurs passionnés. Passionnés pour nous parler du chômage qui pousse à des actes désespérés ; passionnés pour dénoncer l’apathie ambiante ; pour pasticher les travers de la société et se moquer des manipulations égoïstes des politiciens et des responsables.
Approchez, braves gens, mais approchez aussi, gens mal élevés ! Voilà Michel Jabre et sa tonitruante smala de quatorze acteurs dans un théâtre qui vise à dénoncer les poncifs de notre société et les discours-clichés des responsables : Al-Hayat Helwa ( La vie est belle), c’est une parabole «satirico-grotesque dans un style de jeu burlesque», note le metteur en scène. La...