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Actualités - ANALYSE

Administration - Le gouvernement veut déconfessionnaliser la première catégorie Le critère de compétence risque de poser un problème

L’alinéa B de l’article 95 C (Constitution) stipule l’abolition «du principe de la représentation confessionnelle dans les postes du service public (…) conformément aux impératifs de la réconciliation nationale. Ce principe sera remplacé par celui du professionnalisme et de la compétence. Toutefois les fonctions de première catégorie et leurs équivalents seront exceptés de cette règle. Les postes y seront distribués à égalité entre chrétiens et musulmans, sans réserver une charge particulière à une confession déterminée et en recourant plutôt au principe de la compétence». Plus de neuf ans après la publication de ces dispositions, le pouvoir se décide à les appliquer. Le gouvernement a en effet chargé le Conseil de la fonction publique de commencer à débroussailler le dossier en répertoriant la première catégorie et ses équivalents poste par poste selon les quotas confessionnels en vigueur. Et cela afin de tout chambouler, de redistribuer les sièges, en ne respectant plus que la parité globale chrétiens-mahométans. C’est-à-dire que telle commande jusque-là assurée par un chiite peut être confiée à un sunnite et ainsi de suite. Du même coup on ferait sauter la pesée des postes en termes d’importance qualitative, d’influence sociale ou politique. Un critère qui permettait de bien équilibrer le dosage : en renonçant par exemple à deux directions générales d’ordre mineur, comme le sport ou la culture une communauté se réservait un poste puissant comme l’intérieur ou les finances. Et toute la pyramide était calquée, appareillée au système politique confessionnel général : les postes-clés étaient d’une manière générale répartis entre les sept principales communautés du pays, les minorités n’obtenant que des miettes. Ce montage complexe, qui avait pris deux bonnes années jadis sous le gouvernement Omar Karamé pour être redéfini et peaufiné, va donc être démoli d’un coup. Reste qu’il faut savoir comment, par quoi on va le remplacer au juste. La compétence ? Certes, il avait fallu apporter des exceptions au programme de quotas susmentionné parce qu’on ne trouvait vraiment pas dans une communauté des fonctionnaires suffisamment qualifiés pour assumer un poste à haute charge de technicité. Ce qui semble prouver qu’effectivement en faisant sauter le confessionnalisme on va pouvoir enfin doter l’Administration de cadres à la hauteur. Mais il y a une objection de taille : dans le service public, sauf dans quelques postes hautement spécialisés, le savoir-faire vient le plus souvent avec l’expérience et non pas avec les diplômes. Comment un docteur es lettres pourrait-il, par exemple, se débrouiller à la tête d’un service de travaux publics où un simple contremaître pourrait faire merveille ? Et quelles bourdes ne ferait pas un politologue bardé de diplômes si on lui confiait le secrétariat général des AE plutôt qu’à un diplomate chevronné ? Aussi un ancien grand commis de l’État prévoit-il qu’en libérant soi-disant la fonction publique «on va avoir des problèmes, car des gens compétents, à part ceux qui sont blanchis sous le harnais, on n’en trouve pas des masses. De plus les formations préparatoires ont toujours été faites, au niveau des individus, en fonction du tableau confessionnel d’avancement. C’est-à-dire que les cadres de deuxième catégorie encore jeunes se sont orientés selon leur appartenance confessionnelle qui les destinait à briguer un jour telle direction générale et non une autre». Cette personnalité rappelle que le Conseil de la fonction publique a proposé naguère qu’on effectue une rotation entre les fonctionnaires de la première catégorie tous les cinq ans. Ou tous les six ans, à l’avènement d’un nouveau régime, pour qu’il puisse installer une équipe qui ait sa confiance à des postes sensibles comme la direction générale de la sûreté, l’intérieur, la direction du cabinet présidentiel, le commandement de la gendarmerie, des FSI ou de l’armée. Mais la question se pose de nouveau : un directeur général de l’état civil, par exemple, qui aurait accédé à ce poste en venant du cadre de ce département après y avoir acquis une longue expérience, que lui donnerait-on à faire après ses cinq ou six ans dans ce fauteuil ? Le nommerait-on à l’environnement, à la santé, aux travaux publics, à la culture , à l’information ? En somme le tableau se présente comme suit : le gouvernement veut à la fois la compétence et la ventilation. Or la première est largement fonction, répétons-le, du système confessionnel et la deuxième abolit la première, qui est déjà plutôt rare ! Ensuite il y a théoriquement le risque de voir les balances d’influence rompues si la redistribution devait donner aux mahométans ou inversement aux chrétiens une forte majorité de postes-clés, puisque la parité doit continuer à être respectée. Ce qui revient à dire qu’en matière de confessionnalisme, c’est tout ou rien, ou bien on le supprime ou bien on garde les quotas, les demi-mesures ne menant qu’à des déchirures. Dans cette logique on observe que les postes de première catégorie ont essentiellement une dimension politique. Dès lors tant qu’on n’a pas aboli le confessionnalisme politique on ne voit pas comment on pourrait le faire à ce palier de l’État sans préjudice public et national. Aussi l’ancien cadre cité conseille-t-il au gouvernement, dans le cas probable où ce dernier réaliserait l’impossibilité pratique de redistribuer les postes de première catégorie en faisant sauter les critères établis, de garder les quotas confessionnels à titre provisoire. Quitte à effectuer des permutations cycliques tous les six ans par exemple. Et il insiste en conclusion sur un impératif généralement négligé et pourtant aussi important que la lutte contre la corruption : la simplification des formalités et le bon service du public.
L’alinéa B de l’article 95 C (Constitution) stipule l’abolition «du principe de la représentation confessionnelle dans les postes du service public (…) conformément aux impératifs de la réconciliation nationale. Ce principe sera remplacé par celui du professionnalisme et de la compétence. Toutefois les fonctions de première catégorie et leurs équivalents seront...