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Actualités - OPINION

Correspondance Etat de droit et consensus national

Mes François Harfouche et Albert Sara commentent, chacun sous un angle différent, l’article de M. Samir Frangié paru dans L’Orient-Le Jour du 16 août dernier sous le titre “État de droit et consensus national”. Nous repoduisons ci-dessous des extraits de ces deux correspondances ainsi que les réponses qu’elles ont appelées de la part de l’auteur. Le commentaire de François Harfouche Complexe, notre société ? Les efforts de pensée de Samir Frangié sont certes louables pour parvenir à un «État de droit et consensus national» au Liban, mais c’est à se demander s’ils constituent la meilleure façon d’aborder le problème crucial de l’après-Taëf. Il semble à première vue que l’auteur ait perdu tout espoir d’éradiquer le confessionnalisme – pour beaucoup la source de tous les maux – des esprits comme des textes. Ne sait-il pas que la distribution des Libanais entre 17 communautés reconnues est impensable dans une démocratie véritable ? En voulant concilier «citoyenneté et pluralisme communautaire», ne cherche-t-il pas à concilier l’inconciliable, à proposer un mariage contre nature entre deux concepts qui se rejettent dans un système politique qui se veut démocratique et parlementaire ? Un pareil système ou régime politique sous la dénomination «démocratique et parlementaire» suppose que les Libanais sont régentés par une seule loi applicable à tous sans distinction aucune, tant pour ce qui a trait à leur vie publique que privée (...) Les Libanais, toutes communautés confondues, sont de souche orientale et arabe et baignent dans la même civilisation (...) Ils ne forment donc qu’un seul peuple et une seule ethnie, animée par une culture commune dont la langue arabe est le support (...) Notre société nationale (...) n’a rien par conséquent de «complexe», contrairement à l’affirmation de l’auteur. Son identité unique et intangible, elle la tient de son histoire qui, écrite jusqu’ici par des étrangers, a été déformée et dénaturée (...) Le confessionnalisme ne représente pas, à mon avis, «la source de tous les maux». C’est une donnée de société qu’il convient de prendre en considération. L’identité de l’individu n’est pas une donnée simple – «nous sommes tous un seul peuple» – mais une donnée complexe. Elle ne se limite pas à l’identité nationale, elle est la synthèse – «l’intersection», pour reprendre l’expression de Michel Serres – d’un grand nombre d’appartenances (familiale, linguistique, culturelle, sociale, régionale, professionnelle, religieuse, etc.). L’identité nationale exprime un niveau d’appartenance, l’appartenance à une nation, qui est plus large et plus englobant que les autres niveaux cités sans toutefois être le plus large. Pour préserver l’unité de la société, les appartenances autres que nationale ont été rejetées dans la sphère du privé et, dans de nombreux cas, totalement occultées. Cette réduction de l’identité au seul domaine national a trouvé historiquement sa justification dans le fait que les autres niveaux d’appartenance ne sont pas communs à tous les membres de la société et qu’ils constituent, de ce fait même, une menace pour la société, les différences étant perçues comme la source majeure de conflit entre les individus d’une même société. Cette démarche a montré ses limites partout dans le monde. Car si la réduction de l’identité au seul domaine national a historiquement permis aux différentes sociétés européennes de s’unifier dans un cadre national, la violence qui a été ainsi contrôlée à l’intérieur de chacune de ces sociétés n’a pas été conjurée, mais exportée vers l’extérieur et s’est exprimée en une série de conflits nationaux qui ont mis l’Europe à feu et à sang durant près d’un siècle. Pour échapper à la violence, les États d’Europe de l’Ouest se sont dotés d’une nouvelle identité, cette fois supranationale, l’identité européenne, qui est appelée, à terme, à se substituer à l’ensemble des identités nationales, mettant ainsi fin à la violence «nationaliste». En parallèle, on assiste, un peu partout en Europe, à une remise à l’honneur des identités infranationales comme en témoignent l’évolution de la Grande-Bretagne, le débat sur les régions en Espagne ou la polémique sur les langues régionales en France. Il serait peut-être utile de commencer à réfléchir tous ensemble sur l’avenir de notre société et de rechercher les moyens réels de maintenir son unité.
Mes François Harfouche et Albert Sara commentent, chacun sous un angle différent, l’article de M. Samir Frangié paru dans L’Orient-Le Jour du 16 août dernier sous le titre “État de droit et consensus national”. Nous repoduisons ci-dessous des extraits de ces deux correspondances ainsi que les réponses qu’elles ont appelées de la part de l’auteur. Le commentaire de...