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Actualités - REPORTAGES

Universités - Rixes à Byblos et à Beyrouth Les tiraillements politiques et confessionnels gagnent les campus

Après le sport, c’est aux universités que s’attaque le virus confessionnel. Si les rixes sont encore limitées, elles n’en restent pas moins significatives d’un état d’esprit effrayant chez les jeunes du Liban. Dissensions politiques, divisions confessionnelles, les jeunes ne sont que le reflet d’une société d’autant plus malade qu’elle cherche à masquer ses plaies. Depuis trois semaines, les campus de la Lebanese American University (ex-BUC) à Byblos et à Beyrouth sont ainsi le théâtre d’incidents à coloration politique et confessionnelle entre étudiants. Ces échauffourées ont d’ailleurs provoqué des convocations devant la police et, à Beyrouth, le déploiement de l’armée. Tout a commencé au campus de Byblos, quelques jours avant les vacances de Noël. Dans cette branche de l’université, les étudiants sont divisés en deux grands groupes : le Front (qui regroupe les cellules des Forces libanaises et des partis dits de l’est) et les Indépendants (qui regroupent des jeunes de toutes les confessions, dont certains sont affiliés ou sympathisants de partis dits de gauche). Entre les deux groupes, les relations n’ont jamais été au beau fixe. Mais comme c’est normal à Byblos, ce sont les membres du Front qui ont remporté les élections estudiantines. Selon les uns, un peu avant Noël, les étudiants du Front voulaient construire une grotte de la Nativité au sein de l’université et les étudiants indépendants s’y sont opposés. Selon une autre version, le conflit a éclaté au cours du dîner annuel de Noël, qui se tient généralement deux jours avant la fête. Un étudiant druze, qui a toujours vécu aux États-Unis et qui n’est pas du tout porté sur la politique ou le confessionnalisme aurait été agressé par un membre du Front. Quelle que soit l’hypothèse retenue, la suite est la même: deux étudiants se sont battus et la confession de l’un lui a été lancée au visage comme une insulte. Effervescence Le doyen des étudiants qui est un membre de l’administration est aussitôt intervenu pour séparer les jeunes gens, promettant de mener une enquête et de sévir. Mais chez les étudiants, l’atmosphère était à l’effervescence. Les membres du Front jubilaient, se présentant comme les vainqueurs, alors que les autres bouillonnaient et reprochaient aux autres de se donner des surnoms guerriers : tels que par exemple Merkava. (Un des étudiants ayant participé à la rixe porte ce surnom). Les responsables des Indépendants réclamaient notamment que le responsable du Front, qui est aussi le délégué des étudiants et qui a activement participé à la rixe soit destitué, sans que cela ne porte atteinte à ses études. Dans cette atmosphère survoltée, un autre incident se produit : les étudiants Forces libanaises, membres du Front, distribuent des cartes de vœux à l’effigie de Samir Geagea, appelant à sa libération. Les Indépendants ripostent en distribuant des tracts rappelant que la fête de Noël n’a rien à voir avec la politique. Là aussi, le doyen des étudiants intervient, ramassant les documents, car, dit-il, ils n’ont pas obtenu son accord préalable. Mais il est désormais difficile de mettre un terme à la tension. Une pancarte portant en guise de vœux : «Joyeux Noël et bon Ramadan» est perçue comme une provocation et, à chaque instant, la situation risque de déraper. C’est alors qu’arrive la décision du conseil de la faculté : les deux parties reçoivent un avertissement. Cette sentence est mal accueillie chez les Indépendants, qui considèrent être la partie agressée et qui estiment que l’agresseur et l’agressé ne peuvent être traités de la même manière. Ils se sentent victimes d’une injustice et certains songent même à quitter l’université, pour s’inscrire à Beyrouth. La nouvelle se répand dans les milieux estudiantins et au campus de la LAU à Beyrouth, certains groupes évoquent la possibilité d’une vengeance. Double incident à Beyrouth La tension est si grande qu’une rixe éclate lundi au campus de Beyrouth, entre un groupe d’étudiants originaires de la Békaa et un autre de la montagne. Les deux groupes s’attendent à la sortie du campus et s’affrontent à mains nues, mais avec des clés pour marquer le visage de l’adversaire. Le groupe d’Amal entre le lendemain (hier) dans la bataille. Certes, à Beyrouth, la rixe commence par un incident individuel et se dote de colorations politiques et régionales, mais les mobiles confessionnels ne sont jamais bien loin. Les FSI sont appelées à la rescousse. Ils emmènent trois jeunes gens, avant d’appeler à leur tour à l’aide, la quatrième unité d’intervention de l’armée désormais postée autour du campus, sans y entrer bien sûr. À Byblos, dix-sept étudiants sont convoqués devant la police pour provocation de dissensions confessionnelles. C’est dire que les autorités ont décidé de réagir rapidement. Mais cela suffira-t-il à enrayer ce mal qui continue de gangréner la société libanaise neuf ans après la fin officielle de la guerre ? Le plus grave c’est que cette fois, il n’atteint pas des jeunes des rues, venus assister à un match. C’est la future élite de la société qui donne le spectacle affligeant de la division confessionnelle. Il est sans doute temps de se pencher sérieusement sur ce problème.
Après le sport, c’est aux universités que s’attaque le virus confessionnel. Si les rixes sont encore limitées, elles n’en restent pas moins significatives d’un état d’esprit effrayant chez les jeunes du Liban. Dissensions politiques, divisions confessionnelles, les jeunes ne sont que le reflet d’une société d’autant plus malade qu’elle cherche à masquer ses...