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Actualités - ANALYSE

Criminalité et villégiature : risque accru de morte saison ...

Il faut s’entendre: une psychose, c’est mental mais ce n’est pas du vent dans un crâne, ce n’est pas une maladie imaginaire. Ainsi, ce n’est pas sans de frappantes raisons que les gens du Metn se barricadent chez eux. Après le double assassinat des malheureuses joaillières de Mazraat Yachouh, le ministre de l’Intérieur avait pris des mesures, déployé des brigades d’inspecteurs en civil dans des voitures banalisées. Et demandé à la population de dormir sur ses deux oreilles, tout comme jadis le président Frangié l’invitait à sommeiller portes ouvertes et l’on sait trop bien qui alors était entré par la fenêtre… Le tour de vis ministériel n’a apparemment servi à rien: les incidents, les méfaits, les agressions à main armée avec mort d’homme ont continué de plus belle, notamment à Broummana et à Beit Mery où l’on a retrouvé le corps d’un Bahreini, victime probable d’un crime crapuleux. Il y a donc de forts risques maintenant que les vacanciers riches du Golfe déguerpissent en jurant de ne plus jamais remettre les pieds dans ce faux paradis qu’est le Liban. Et c’est en vain que le même ministère de l’Intérieur aura mis les bouchées doubles pour organiser des municipales ( du reste remarquablement) avant l’été pour ne pas bousiller la saison: l’impéritie policière y est arrivée toute seule. Pourtant, M. Michel Murr avait parlé avec tant de fermeté que la population s’était sentie réellement rassurée. Quand la pègre a relevé le défi et repris ses sanglants exploits, la désillusion s’est doublée d’une inquiétude désormais irrépressible. Comme dans la fable «au loup au loup», les Libanais en général et les Metniotes en particulier ne peuvent plus croire les promesses qu’on leur fait, les assurances qu’on leur donne avec tant d’assurance. C’est même la peur, n’ayons pas peur des mots, qui les étreint. Ils se cuirassent de métal, s’arment même en douce et les prix des pistolets de dame ne cessent de grimper sur le marché noir clandestin. C’est sans doute illégal, sauf quand on parvient à décrocher un permis, mais après tout ce sont les autorités elles-mêmes qui, avant même le double meurtre de Mazraat Yachouh, avaient distribué des prospectus invitant les gens à contribuer activement à leur propre protection et à leur sécurité. Ce qu’en Amérique on appelle la «légitime autodéfense» et qui a donné lieu en France à de retentissants procès (par exemple d’un boucher qui a abattu un voleur) est en train de se mettre petit à petit sur pied au Liban. Mais il est douteux que le système, qui est après tout assumé par des gens qui restent par définition des amateurs, puisse être efficace. Rien en fait ne peut se substituer à une bonne police. Et rien ne peut faire une bonne police qu’un bon renseignement, comme Vidocq l’a dit il y a un siècle et demi. Un précédent Comme naguère Toufayli, mais à sa façon propre, le «milieu» défie donc l’Etat dans le Metn. Il faut bien en parler comme d’une entité organisée, car c’est là l’avis du principal expert local, le ministre de l’Intérieur en personne. Ce dernier attribue en effet la recrudescence actuelle de la criminalité ordinaire à un seul et même «cerveau» dont l’objectif serait de faire diversion pour détourner l’attention des réseaux subversifs manipulés par Israël. Une explication aussi palpitante qu’un roman qui allierait le polar à l’espionnage. «Plus prosaïquement, il faut voir dans cette dégradation, dit un sociologue, les raisons suivantes: — A tort ou à raison, le Metn-Nord et le Kesrouan sont considérés comme des grottes d’Ali Baba bourrées de trésor et cela y explique la forte concentration de gangs. — Au second degré, la faiblesse politique accusée de la collectivité de l’Est la rend moins immunisée contre les virus de toutes sortes. — D’autant que ces régions sont globalement plus permissives, moins fermées que les sociétés de villages, de vieux quartiers citadins ou de banlieues dominées par des conservateurs plus ou moins intégristes qui se cloisonnent volontiers et s’autoprotègent ainsi plus facilement. — Mais surtout quand la loi est inégalement appliquée, qu’il y a des discriminations, l’encouragement à la criminalité se fait direct. On le voit concrètement: il ne sert à rien de disposer de plus de 100.000 hommes en armes entre armée, FSI, Sûreté générale, Sûreté de l’Etat et différentes polices si la loi n’est pas appliquée avec une égale fermeté à tous. Et si les coups de main, les spoliations légalisées se poursuivent ici ou là, dans la périphérie du centre-ville ou ailleurs…». Quoi qu’il en soit, c’est aujourd’hui l’opposition qui a beau jeu. «Le ministre de l’Intérieur affirmait il y a quelques jours à peine que l’on exagérait, que l’on dramatisait trop les choses et qu’il n’y avait eu à tout prendre qu’une dizaine de forfaits… Qu’en dit-il aujourd’hui?», se demande un député qui souligne cependant que «le problème pour être sainement traité implique avant tout le redressement économique du pays. Car c’est la misère qui pousse au crime…».
Il faut s’entendre: une psychose, c’est mental mais ce n’est pas du vent dans un crâne, ce n’est pas une maladie imaginaire. Ainsi, ce n’est pas sans de frappantes raisons que les gens du Metn se barricadent chez eux. Après le double assassinat des malheureuses joaillières de Mazraat Yachouh, le ministre de l’Intérieur avait pris des mesures, déployé des brigades...