Violents combats à la frontière albano-yougoslave

De violents combats entre séparatistes albanais du Kosovo et l’armée yougoslave, le long de la frontière avec l’Albanie, ont fait 110 morts albanais, en deux jours, selon l’armée, et Tirana a accusé Belgrade de «menacer l’intégrité et la souveraineté» de l’Albanie. Selon le service d’information du 3e corps d’armée yougoslave, les combats ont éclaté lorsqu’un groupe de séparatistes armés d’environ «un millier d’hommes» a tenté de franchir clandestinement la frontière entre l’Albanie et la Yougoslavie pour pénétrer au Kosovo depuis le territoire albanais et s’est heurté aux garde-frontières de l’armée. C’est la première fois qu’est mentionnée une tentative de franchissement de la frontière par un groupe aussi important. Jusqu’à présent, les incidents de ce genre impliquaient au maximum 200 hommes. La première incursion a eu lieu en pleine nuit, dans le sud-ouest du Kosovo, près de Djeravica, non loin de la ville de Decani. Cette zone montagneuse est actuellement le principal couloir par lequel sont acheminés armes et équipements au Kosovo, selon des sources serbes. Les soldats yougoslaves «ont démantelé» le groupe, «ont liquidé une trentaine de terroristes et ont saisi une grande quantité d’armes et d’équipements militaires», selon le communiqué officiel. Des sources proches de l’armée avaient déclaré plus tôt que les combats avaient fait au moins 30 morts parmi les Albanais et que tous portaient des uniformes de l’Armée de libération du Kosovo (UCK). L’UCK mène une lutte armée pour l’indépendance du Kosovo, une province du sud de la Serbie peuplée à 90% d’Albanais. Selon l’armée, la seule victime dans ses rangs est un caporal qui a été grièvement blessé. L’armée yougoslave a affirmé que lors des combats, le feu avait aussi été ouvert sur ses soldats depuis le territoire albanais. La tentative d’incursion de samedi était «la plus grave enregistrée jusqu’à présent par son importance numérique, son audace et son agressivité», estime l’armée. A Tirana, le ministère albanais de l’Intérieur a indiqué que des tirs d’artillerie et des explosions de grenades avaient été entendus presque toute la nuit par les habitants de la zone frontalière, provoquant la panique. Des obus serbes sont tombés en territoire albanais, à 500 mètres de la frontière, sans faire de victime, et l’armée albanaise n’a pas riposté, a indiqué le porte-parole du ministère. C’était semble-t-il la première fois depuis le début de la crise au Kosovo que des obus s’abattaient en territoire albanais. La télévision d’Etat albanaise a interrompu ses programmes pour donner des informations sur les événements à la frontière et a qualifié la situation de «très critique». «Les Serbes sont en train de prendre position le long de la frontière avec l’Albanie», a déclaré une présentatrice. Dans la soirée, le gouvernement albanais a violemment dénoncé les activités de l’armée de Belgrade. «Les opérations serbes de samedi sont une provocation et une menace pour l’intégrité et la souveraineté de notre pays, et elles visent à impliquer l’Albanie dans un conflit régional très dangereux», a affirmé le gouvernement du premier ministre Fatos Nano. Le gouvernement a appelé la communauté internationale à prendre des mesures «extraordinaires» pour «arrêter par tous les moyens l’agression fasciste que Belgrade mène contre la population albanaise au Kosovo». Une centaine d’Albanais du Kosovo blessés lors de combats ou par des mines se sont réfugiés samedi en Albanie, selon le porte-parole du ministère albanais de l’Intérieur. Les ministères de l’Intérieur et de la Défense ont organisé un pont aérien avec des hélicoptères pour transporter vers Tirana les personnes grièvement blessées, a déclaré le porte-parole. (AFP)