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Actualités - OPINION

Carnet de route Amoureuses politiques ou Ich Liebe dich

Henry Kissinger, l’ancien secrétaire d’Etat américain, aime bien le président Hafez el-Assad. Il l’a déclaré voici trois jours et seuls ceux qui n’ont pas suivi les relations entre les deux hommes ou qui n’ont pas idée de la personnalité de l’un et de l’autre s’en seront étonnés. Il y a ainsi, même en politique, des affinités sentimentales, qui ne font pas toujours l’objet de déclarations (imagine-t-on de Gaulle exprimant, lors de la fameuse poignée de main avec le grand homme allemand, sa profonde affection pour Adenauer, ou, pis, se jetant à son cou?). Nous, Libanais, savons par exemple, ne serait-ce que par leurs ferventes effusions médiatisées, que le président Chirac et M. Hariri, notre chef de gouvernement, sont liés, depuis leur première rencontre, par un sentiment profond qui dépasse de loin leur entente politique. Voilà qui est bien. Voilà qui est sain. Et qui dément le cliché selon lequel la politique et les sentiments sont antinomiques. Il n’est que de se souvenir du tendre attachement qui unissait Giscard d’Estaing (personnalité réputée glaciale), lors de son mandat présidentiel, au chancelier Helmut Schmidt, qui n’était pas non plus spécialement jovial. Si l’on était méchant, on se laisserait à dire que seuls les Arabes ne s’aiment pas entre eux, ce qui est une vieille légende et une vieille réalité. Qui souffre quelques exceptions. Ceci dit, il vient de passer par le Liban non seulement le plus grand, mais un des rares intellectuels arabes d’envergure, Mohamed Heykal. Cet écrivain, ancien ministre de la Culture au Caire, qui tient jusqu’aujourd’hui à ne s’affirmer que journaliste, sa carrière d’origine, a été le meilleur ami de Nasser, le seul qui fut mis dans la confidence, quarante-huit heures avant la nationalisation du Canal de Suez. Cette amitié entre le scribe et le pharaon fit beaucoup de bruit et de jaloux, à cette nuance près que les intellectuels, et en général l’intelligentsia, frappés par la jalousie, furent souvent les mêmes sur lesquels Heykal exerça une influence écrasante, au point que, comme l’avoua l’un d’eux, il leur fallut parfois aller jusqu’à «liquider leur Œdipe» par rapport au «maître». C’est vrai, je suis sortie de mon sujet initial, qui portait sur l’amour en politique, et je l’ai fait à l’instar de ce notable Libanais des années trente, chargé de prononcer un discours pour accueillir, au «cercle de l’union française» de Beyrouth une importante personnalité mandataire et dont le seul souci était de présenter, à l’hôte célèbre, Paul, son fils unique et adoré. Arrivant à la fin de son texte, il se dépêcha: «Vive la France, Vive le Liban, et par conséquent, cher ami, je vous présente mon fils Paul». Moi, j’avais envie de parler de Heykal, j’ai toujours envie de parler de Heykal depuis que je le lis, et il me fallait bien glisser mon envie quelque part. Parce qu’il domine un monde intellectuel arabe quasi désertique, parce que nous faisons partie, nous Libanais, de ce désert, et qu’enfin, de temps en temps, on est tenté d’être fier de quelqu’un d’autre que de Khalil Gebran, encore et toujours lui, Dieu ait son âme. Cet autre fut-il Egyptien, nassérien, octogénaire. Après tout, n’était-ce pas un maronite (?) qui nous qualifiait de pays «à visage arabe»? Alors, Heykal, dans notre pauvreté intellectuelle actuelle, pourquoi ne pas l’annexer, pardon, le... nationaliser? Amal NACCACHE P.S. — Trêve de jongleries. Il y a pénurie d’intellectuels (sinon de créateurs) dans le monde arabe oriental. Même si nous nous approprions Edward Saïd, avec toute son intelligence, et la petite brochette de Cairotes que son haut niveau n’a pas empêché de foncer tête baissée dans les thèses ineptes de Roger Garaudy. Chez nous, nous en avons vu, et des meilleurs, lire de travers un ouvrage de l’historien français Michel Winock et confondre Benda avec Benda Péché mignon, culture mineure quand même. Bref, s’il ne faut pas désespérer, il ne faut pas non plus prendre des vessies pour des lanternes. La confusion est déjà assez importante comme ça...
Henry Kissinger, l’ancien secrétaire d’Etat américain, aime bien le président Hafez el-Assad. Il l’a déclaré voici trois jours et seuls ceux qui n’ont pas suivi les relations entre les deux hommes ou qui n’ont pas idée de la personnalité de l’un et de l’autre s’en seront étonnés. Il y a ainsi, même en politique, des affinités sentimentales, qui ne font pas...