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Actualités - REPORTAGE

Exposé à la Cathédrale de Turin Le Saint Suaire, l'une des plus précieuses reliques de l'Eglise (photo)

Voir le linceul du Christ, remonter le temps jusqu’à ce précieux drap de lin sur lequel s’est inexplicablement imprimée l’image d’un homme crucifié correspondant étonnamment à ce que les Evangiles nous rapportent de la mort du Christ, voilà l’émouvant privilège que rend possible l’exposition du Saint Suaire, jusqu’au 14 juin, dans la cathédrale de Turin. L’exposition publique a été organisée à la demande de Jean-Paul II, pour le centenaire de la première exposition du suaire, en 1898. Pour le pape, qui croit à l’authenticité du linceul, ce drap est la plus précieuse relique de la chrétienté, un signe providentiel adressé à l’ Eglise, à l’aube du Troisième millénaire. Pourtant, jugeant qu’il ne s’agit pas d’une matière touchant à la foi, il a quand même déclaré que l’Eglise n’a pas compétence spécifique pour donner des réponses adéquates aux questions que l’on ne pose au sujet du linceul. Aussi, templiers des temps modernes à la recherche du Graal, c’est désormais parmi les écueils de la science qu’il faut chevaucher, à la recherche de la certitude de l’authenticité de ce signe, de ce legs que le Christ a laissé à l’ Eglise. La décision a déjà drainé des foules innombrables à Turin. Du matin au soir, le défilé est incessant, les écoliers se mêlant aux moines, et les groupes de laïcs aux religieuses. Il faut normalement réserver son tour un jour à l’avance. La précédente exposition du Saint Suaire avait attiré quelque 1,6 million de visiteurs. Un nombre égal, sinon supérieur de visiteurs, est attendu en ce moment. Mais tout à été fait pour faciliter les choses. Aux abords immédiats, une armée de bénévoles relevant du comité organisateur, vous prend en charge, et vous canalise vers le linceul, exposé à la verticale dans une châsse illuminée, en verre blindé, à l’intérieur de la cathédrale. Avant de pénétrer dans la nef, la foule des visiteurs passe par une salle où une projection cinématographique sur grand écran vous aide à «lire» le linceul. L’on passe à quelques mètres de ce dernier, où un arrêt de trois minutes est observé, le temps d’une courte méditation. Puis la foule est canalisée de nouveau vers la sortie. Des pollens de Palestine La grande surprise, toutefois, c’est de découvrir qu’une fois à l’extérieur de la cathédrale, on peut choisir d’y pénétrer à nouveau, tout simplement cette fois, par la porte principale. Là, on se retrouve, dans une pénombre bienheureuse, à dix ou quinze mètres du linceul, libre de prier, de réfléchir, de méditer, pendant que les groupes défilent devant le maître-autel. En présence du linceul, l’émotion est absente. On croirait presque s’être déplacé pour rien. Ce sentiment n’est pas inhabituel: beaucoup de visiteurs restent parfaitement impassibles devant l’objet. Nous ne sommes pas en présence d’une preuve de l’existence de Dieu qui nous dispenserait de choisir de croire; ce n’est pas le suaire qui donne du sens à notre foi, mais notre foi qui donne un sens au suaire. Au fond, on voit mieux le suaire les yeux fermés qu’ouverts. Pièce à conviction de la mort et de la résurrection du Christ, le Saint Suaire reste ce qu’il est: un objet, mystérieux certes, mais un objet. Son intérêt est dans les questions qu’il pose. Comment l’image du Christ s’y est-elle imprimée? Comment l’homme du suaire s’en est-il dégagé, sans laisser de traces d’arrachement? Quelle genre de lumière venue du dedans a-t-elle imprimé, sur ce tissu agissant comme un négatif, cette image de face et de dos d’un homme étendu, mort, les mains croisées sur la région du pubis, ce visage de boxeur vaincu encore tuméfié de coups, cette paupière entaillée, cette calotte ensanglantée par une couronne d’épines, ce dos labouré de coups de fouets, ces épaules excoriées par le poids et le frottement d’une traverse en bois, ces mains et ces pieds troués, ce côté transpercé? C’est en répondant à ces questions que la surprise puis l’émotion naissent. A ce jour, la science n’est toujours pas parvenue à expliquer comment l’image du suaire a été obtenue, ni entre autres comment de nombreux pollens d’espèces végétales typiques de la Palestine y ont été trouvés? Des hypothèses, plus invraisemblables les unes que les autres, ont été avancées. La datation au carbone 14, effectuée en 1988, qui fait remonter le drap au Moyen Age, entre en contradiction avec tant d’autres preuves convergentes en faveur de l’authenticité, que ses conclusions deviennent insuffisantes, insatisfaisantes. De sorte que petit à petit, l’évidence s’impose. Ce linceul pourrait bien être un souvenir laissé par le Christ à son Eglise, un témoin muet de la résurrection. Le linceul, en fait, aide à humaniser le Christ. Il lui donne chair. Oui, le Christ était un homme, pleinement. Le suaire nous rapproche terriblement, dangereusement, de cette certitude. Mais cet homme était-il le Verbe préexistant de Dieu? Voilà une question à laquelle le suaire ne répond pas. L’énigme du «saut» entre l’homme et Dieu reste totale. Que l’homme du suaire ait ressuscité est concevable. On peut aussi choisir de dire que l’homme s’est «dématérialisé», et pénétrer dans le monde de la science-fiction. Mais savoir que cet homme est Dieu né de Dieu, Lumière née de la Lumière, que par Lui tout a été fait, voilà qui exige l’Esprit Saint et l’Eglise. Pour un croyant, méditer sur le suaire, c’est méditer sur l’humanité du Christ: l’Immortel a revêtu notre chair, l’Impassible est entré dans le Temps. C’est méditer sur la préexistence de Jésus, son incarnation, sa mort ignominieuse et volontairement acceptée. C’est une chose aussi vertigineuse que de sonder l’espace, le temps, de venir à bout des étoiles. Voir le linceul, c’est, en un sens, devenir le contemporain du Christ. Mais pour voir son amour l’invisible restera nécessaire.
Voir le linceul du Christ, remonter le temps jusqu’à ce précieux drap de lin sur lequel s’est inexplicablement imprimée l’image d’un homme crucifié correspondant étonnamment à ce que les Evangiles nous rapportent de la mort du Christ, voilà l’émouvant privilège que rend possible l’exposition du Saint Suaire, jusqu’au 14 juin, dans la cathédrale de Turin. ...