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Actualités - REPORTAGE

Jounieh : ambiance calme dans les bureaux de vote, mais tension entre les députés (photos)

La bataille électorale de Jounieh promettait d’être des plus chaudes, vu la rivalité qui oppose les deux parties ayant parrainé des listes, le député Rochaid el Khazen et le ministre Farès Boueiz d’une part, les députés Mansour el Bone, Elias el Khazen et Camille Ziadé d’autre part. Mais, bien que la bataille ait été serrée au niveau du vote et que les déclarations des deux députés n’aient rien perdu de leur acuité, l’atmosphère qui régnait hier dans les différents bureaux de vote était plutôt calme, voir conviviale pour les électeurs. Les représentants des trois listes (les deux précédentes et celle de l’opposition) se traitaient le plus souvent avec respect, et l’affluence aux bureaux de vote était relativement importante, dès les premières heures. Les rues de Jounieh étaient donc tranquilles hier, à l’ombre d’un important dispositif de sécurité. Mais des tracts jonchant le sol et des convois de voitures klaxonnant sans retenue trahissaient l’ambiance agitée des derniers jours. Les délégués des différentes listes arboraient des T-shirts et des casquettes à l’effigie de l’un ou l’autre des candidats. Dans les cinq lieux de vote — la municipalité de Jounieh, les écoles officielles de Sarba, Ghadir, Haret Sakhr et Sahel Alma — les gens se rencontraient et se saluaient cordialement, étant tous parents, amis ou connaissances. Contrairement aux élections législatives, très peu d’erreurs ont été relevées dans les listes d’électeurs, et par conséquent, peu de plaintes ont été déposées à ce sujet. Quelques incidents qui sont demeurés isolés ou mineurs ont eu lieu. A titre d’exemple, dans un bureau de vote, les délégués de deux listes différentes (celle de l’opposition et celle présidée par Haïkal el Khazen) ont constaté que nombre de noms figurant sur les listes d’électeurs appartenaient à des personnes mortes depuis peu ou émigrées. Comment ont-ils su l’affaire? «Nous les connaissons tout simplement», ont-ils répondu. Ce qui explique bien pourquoi les fraudes sont difficiles lors des élections municipales. «Espérons que les défunts ne vont pas venir voter», nous ont-ils dit. «Mais nous serons vigilants», ont-ils ajouté. De toute évidence, les morts n’ont pas quitté leur tombe. Il devait donc s’agir d’une erreur. D’autres incidents mineurs ont ponctué la journée, dus pour l’essentiel à l’ignorance des gens, 35 ans après les dernières élections. Ainsi, beaucoup de personnes plaçaient le bulletin de vote des municipales dans l’urne consacrée aux moukhtars et vice versa. «Cela va nous créer beaucoup de problèmes lors des dépouillements des voix», a dit un chef de bureau de vote à Haret Sakhr. Même si les électeurs ne dévoilent pas volontiers l’identité du candidat pour lequel ils ont opté, une grande partie ont avoué avoir recours au panachage. Une dame de Ghadir a donné son point de vue sur la question: «Je crois que peu de gens ont opté pour une liste entière. Après tout, chacun a son avis, et on ne peut plus mener les gens par le bout du nez. Bien que les considérations politiques soient primordiales, les relations familiales et les connaissances influent beaucoup». Déclarations intempestives Si l’atmosphère était relativement décontractée dans les bureaux de vote, la tension n’a pas baissé entre les députés du Kesrouan et leurs frères-têtes de liste. Ainsi, MM Mansour el Bone et Rochaid el Khazen ont adopté un ton acerbe l’un envers l’autre hier. Cependant, ni les candidats des listes proches des députés ni ceux de l’opposition ne se sont plaints du déroulement des élections qu’ils ont trouvé démocratique. Interrogé sur ses prévisions quant aux résultats, M.Mansour el Bone, particulierement confiant, a lancé: «19 de nos candidats sur 18 seront élus». Sur la déclaration du ministre Farès Boueiz, qui a annoncé hier que 60% des municipalités lui sont déjà acquises, M.Bone a répondu: «Il en a déjà perdu 60% pour sûr». Un autre sujet brûlant divise les deux listes: le camp des Khazen a souvent accusé les Bone de favoriser les ingérences du chef du gouvernement, M.Rafic Hariri, au Kesrouan (M.Bone étant par ailleurs un proche de M.Hariri). A la question de savoir ce qu’il pensait de ces critiques, M.Joe el Bone a déclaré à l’Orient-Le Jour que «tout ce qu’ils ont fait a été de salir les routes (de tracts), et Haïkal (el Khazen) s’est d’ailleurs excusé personnellement de ces propos». Le député Elias el Khazen, allié de M.Bone, a renchéri: «Chacun parle selon ce que sa conscience lui dicte. Les gens savent que nous sommes à leur service et que nous ne possédons rien, alors que d’autres ont des châteaux et des propriétés. Il n’y a pas eu d’ingérences du premier ministre. Peut-être que ceux qui nous accusent de cela ont eux-mêmes exigé cette intervention». Egalement interrogé par l’Orient-Le Jour, M.Rochaid el Khazen donne son propre point de vue: «Il est certain qu’on a demandé à M.Hariri d’intervenir dans les élections. Mais il m’a lui-même assuré, lors d’un entretien, qu’il n’est pas responsable des actes de ses alliés, surtout qu’il était lui-même favorable à une coalition». Il a par ailleurs révélé que «certains se livrent à l’achat de voix, et les forces de l’ordre ont arrêté des personnes prises sur le fait», (un responsable des forces de l’ordre interrogé n’a pas confirmé cette nouvelle). Et d’ajouter: «Nous sommes contre la manière dont nos adversaires comptent gérer la municipalité si elle leur échoit. Ils se placent en fait dans la continuité de l’ancienne municipalité dont le long mandat a été marqué par de nombreux scandales. Nous voulons arrêter le gaspillage: il faut savoir que la municipalité de Jounieh a vendu la plupart de ses terres, et loué d’autres pour une bouchée de pain. Nous avons un programme de développement que nous voulons appliquer si nous sommes élus. Mais dans le cas contraire, nous serons quand même aux côtés du nouveau Conseil». Quelques heures plus tard, M.Khazen déclarait à la télévision: «J’entretiens moi-même des relations avec M.Hariri, ce qui est normal, mais je suis contre le fait de lui être entièrement acquis comme certains au Kesrouan» Loin de toute cette controverse, les candidats de la troisième liste, celle de l’opposition, ont évalué à leur façon cette journée d’élections. M.Naji Audi a reconnu que «le processus démocratique a prévalu au cours de cette journée». M.Joseph Béchara a cependant déploré le fait que «les médias, notamment audiovisuels, ont fait le «black out» sur nos activités». «Mais je crois que les hommes politiques qui se sont livrés à cette lutte sans merci ont beaucoup perdu de leur crédibilité à long terme», a-t-il constaté. «Leurs listes étaient complètement fermées, ne laissant pas le choix aux électeurs. Il y a cependant des personnes compétentes dans toutes les listes, et si les votants ont eu recours au panachage, cela est une bonne chose». 1221 Arméniens boycottent Par ailleurs, le parti Tachnag a appelé les citoyens d’origine arménienne à Jounieh à boycotter les élections municipales. M.Hagop Pakradouni, du parti, nous explique pourquoi: «Nous avions un candidat à Jounieh, et nous voulions l’intégrer à l’une des deux listes du pouvoir afin que les Arméniens soient représentés. Mais on nous a répondu que les listes étaient complètes, que chaque candidat a sa propre base populaire, et ne peut par conséquent pas être écarté. Voilà pourquoi nous avons décidé de demander à nos sympathisants de boycotter les élections». Résultat: 50 arméniens à peine sur 1221 ont voté à Jounieh. Dure bataille à Ghazir Non loin de Jounieh, trois listes se sont affrontées hier à Ghazir: l’une «chéhabiste» présidée par Charles Haddad, l’autre proche du ministre Farès Boueiz présidée par Ibrahim Haddad. Cependant, les membres de la première liste dénoncent les «pratiques frauduleuses» de la seconde. «La vente de voix se fait ouvertement», a dit M.Charles Haddad. «De plus, les forces de l’ordre ont de toute évidence un parti pris pour la liste adverse. Ils laissent entrer certaines personnes au bureau de vote, même si elles ne sont pas tout à fait en règle. Sans compter la présence de «bodyguards» étrangers à la ville qui essaient de provoquer nos jeunes gens. Mais ceux-ci s’efforcent de ne pas répondre». Pour sa part, Joe Toutoungi, ancien président du régional Kataëb au Kesrouan (qui appuie la liste de Charles Haddad), a déclaré que «l’ambiance est calme et l’affluence importante malgré la tension qui a caractérisé ces dernières semaines». «Les gens n’ont pas une position politique claire, et je crois qu’ils vont donner libre cours au panachage parce que les familles sont divisées entre les listes», a-t-il poursuivi. Zouk: encore de nouveaux projets Loin des dissensions politiques des autres régions, Zouk Mikhaël vit des élections paisibles. Son chef de municipalité, M.Nohad Naufal, interrogé par l’Orient-Le Jour sur la liste qu’il préside, révèle qu’ «un seul membre faisait partie de l’ancienne équipe, alors que tous les autres sont nouveaux». Sur ses nouveaux projets, M.Naufal précise: «Nous voulons améliorer encore davantage la région en instaurant un dialogue avec la société civile. Nous projetons par ailleurs de créer une école de formation à l’artisanat, un amphithéâtre en plein air, un théatre municipal, un palais des sports et des loisirs. D’autre part, un nouveau plan général de la ville a été mis au point, et des comités de quartiers seront créés».
La bataille électorale de Jounieh promettait d’être des plus chaudes, vu la rivalité qui oppose les deux parties ayant parrainé des listes, le député Rochaid el Khazen et le ministre Farès Boueiz d’une part, les députés Mansour el Bone, Elias el Khazen et Camille Ziadé d’autre part. Mais, bien que la bataille ait été serrée au niveau du vote et que les déclarations...