Kirienko échoue à la Douma, Elstine s'obstine (photo)

Les députés russes ont rejeté vendredi la candidature du jeune technocrate Sergueï Kirienko au poste de premier ministre, mais Boris Eltsine a ignoré cet affront en maintenant son «poulain» en piste pour un second tour d’ici une semaine (VOIR AUSSI P. 8). L’échec de Sergueï Kirienko était attendu, mais son score a finalement été meilleur que prévu: 143 députés ont voté pour lui, 186 contre et 5 se sont abstenus. Une majorité de 226 voix est nécessaire pour que la candidature du premier ministre soit acceptée. Le président russe a le droit de présenter trois fois un candidat au poste de premier ministre et la Douma (chambre basse du Parlement) est dissoute en cas de troisième rejet, selon la Constitution. Dès l’annonce du résultat du vote, le Kremlin a annoncé qu’il maintenait la candidature de Kirienko, 35 ans, un quasi-inconnu choisi par Boris Eltsine pour succéder à l’ex-premier ministre Viktor Tchernomyrdine, brutalement limogé avec l’ensemble du gouvernement le 23 mars dernier. «Le président Boris Eltsine a envoyé au président de la Douma Guennadi Seleznev une lettre pour lui demander d’examiner une nouvelle fois la candidature de M. Kirienko, et de l’accepter», a déclaré le porte-parole du Kremlin M. Iastrjembski. Le prochain vote doit avoir lieu dans un délai d’une semaine. Un vote positif permettrait à M. Eltsine d’effectuer comme prévu une visite au Japon à partir du 18 avril. Dans le cas contraire, son porte-parole a assuré que le président «pouvait» maintenir son déplacement et laisser son pays sans gouvernement. Les communistes ont annoncé de leur côté qu’ils allaient saisir la Cour constitutionnelle, contestant au président le droit de présenter à nouveau le même candidat qui vient d’être repoussé, sans qu’on sache encore si leur initiative a des chances d’aboutir. L’hostilité des communistes Dans l’espoir d’amadouer la Douma, le Kremlin avait accepté de dialoguer cette semaine avec l’opposition après avoir dans un premier temps brandi l’arme de la dissolution. Mais les communistes, qui constituent la première force à la Douma, sont demeurés hostiles à la candidature de Kirienko. Les députés reprochent à Boris Eltsine d’avoir choisi un premier ministre qui n’a qu’un an d’expérience gouvernementale. Le résultat de ce vote est «une gifle pour Boris Eltsine, Kirienko n’a rien à voir là-dedans», a estimé le numéro deux de la fraction Iabloko (opposition réformatrice), Sergueï Ivanenko. Le Kremlin a cependant accueilli sans émotion le rejet de son candidat. «Nous nous attendions approximativement à ces résultats et nous les estimons assez acceptables pour le premier tour», a dit le porte-parole de Boris Eltsine. La majorité des analystes pensent que le Kremlin et l’opposition vont maintenant entrer dans une période intense de marchandage. «Ni le Kremlin ni la Douma ne veulent une dissolution. Les deux parties vont négocier jusqu’au dernier moment pour obtenir le maximum de concessions», estime Evguéni Volk de la fondation Heritage. Devant les députés, M. Kirienko a bien entendu assuré du contraire. «Je ne serai pas conciliant sur la question de la composition du gouvernement (...) Accepter un marchandage ne donnerait pas un bon gouvernement», a-t-il déclaré.