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Actualités - CHRONOLOGIE

Le dernier adieu au poète de l'amour Dérogeant à la coutume, des femmes participent aux obsèques de Nizar Kabbani (photo)

«Qui voulez-vous qui accompagne Nizar Kabbani jusqu’à sa dernière demeure, sinon les femmes?», lance l’une d’elles alors que la dépouille du grand poète arabe arrivait hier devant la mosquée Badr à Damas. Près de dix mille Syriens, vieux et jeunes, des centaines de femmes et des hommes de tous âges, ont escorté la dépouille de Nizar Kabbani, l’un des plus grands poètes arabes, décédé jeudi à Londres à l’âge de 75 ans des suites d’une grave maladie. Les parentes de Kabbani, «poète de la femme et de l’amour», adversaire résolu du conservatisme de la société arabe, rompaient ainsi avec la coutume musulmane, qui interdit aux femmes de participer aux funérailles en accompagnant la dépouille mortelle à la mosquée. Dans un style dépouillé et limpide, mettant la poésie à la portée de tout un chacun, Nizar Kabbani, qui a longtemps vécu en Occident et à Beyrouth, fut le chantre de la ville de Damas, de la libération sociale et de celle de la femme. «J’écris sur la femme pour la sauver des griffes de la tribu et de l’épée», disait-il en «liant la cause de la femme à la guerre de libération sociale que livre aujourd’hui le monde arabe». En apercevant le cercueil devant la mosquée, des femmes émues laissent couler leurs larmes et crient leur douleur: «Il n’y a de Dieu que Dieu, Nizar est le bien-aimé de Dieu», proclame l’une d’elles dans une référence à la profession de foi musulmane (La Ilah Illa Allah»). Rania Souccar, 54 ans, affirme, les yeux rougis: «Nous avons été élevées au rythme de ses poèmes. Il m’a appris que la femme est digne d’estime et que la liberté est une revendication essentielle». Un jeune homme prénommé Majed, 18 ans, indique avoir perdu «un des grands de cette nation, le fils de Damas, et nous sommes les enfants de Damas». Une Damascène blonde de 30 ans s’écrie: «Le peuple s’est rassemblé spontanément, regardez-le, il hurle de douleur». Un cortège de voitures transportant la dépouille de Nizar Kabbani, noyé sous les bouquets de fleurs et suivi par les parents et amis du poète disparu, s’était ébranlé de devant la maison de l’un de ses frères vers la Mosquée Badr, où la prière musulmane des morts a été récitée. Le cortège avait fait auparavant un détour par la rue qui porte le nom du poète, l’une des plus belles du quartier d’Abou Roummané, avant de se rendre à la mosquée où une foule recueillie l’attendait sous un soleil de plomb. Des milliers de Syriens ont ensuite fait à pied le trajet de cinq kilomètres qui sépare la mosquée du cimetière familial à Bab al-Saghir, dans la vieille ville, où reposent les parents de Kabbani et son fils Toufic, décédé à 24 ans. Un avion spécial transportant la dépouille du poète syrien était arrivé dimanche à Damas venant de Londres. Ses trois enfants, Hadba, Omar et Zeinab, ont accompagné la dépouille de leur père à bord de cet appareil spécialement affrété par le président Hafez el-Assad. «Ainsi, l’oiseau retourne dans sa maison et l’enfant au sein de sa mère», a-t-il écrit dans son testament rédigé après sa dernière crise cardiaque, la plus sérieuse, en octobre 1977, et dans lequel il demandait à être enterré à Damas dans le cimetière familial. «Je demande à tous mes frères et parents d’exécuter mes dernières volontés (...), car Damas est la matrice qui m’a appris la poésie et la création et qui m’a offert l’alphabet du jasmin», a-t-il encore écrit. Il n’était plus retourné depuis 1988 à Damas, pour laquelle il a composé ses plus beaux poèmes. Nizar Kabbani s’était marié deux fois. Il avait eu deux enfants de son premier mariage: Toufic et Hadba, et deux autres de son second mariage. (AFP)
«Qui voulez-vous qui accompagne Nizar Kabbani jusqu’à sa dernière demeure, sinon les femmes?», lance l’une d’elles alors que la dépouille du grand poète arabe arrivait hier devant la mosquée Badr à Damas. Près de dix mille Syriens, vieux et jeunes, des centaines de femmes et des hommes de tous âges, ont escorté la dépouille de Nizar Kabbani, l’un des plus grands...