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Actualités - OPINION

Les bons comptes

C’est sous le signe de la célérité et de l’efficacité qu’a vu le jour ce premier gouvernement du nouveau mandat, ce qui constitue en soi une première rupture avec le passé. Formé pour moitié d’hommes politiques et pour l’autre moitié de techniciens, dont des représentants de la société civile, l’équipe Hoss décline, d’emblée, une vocation réformatrice qui répond largement aux attentes de l’opinion. Au plan purement politique, plusieurs membres de blocs parlementaires, généralement peu marqués au demeurant, font leur entrée dans l’Exécutif. Il est réconfortant de constater à ce propos que le temps n’est plus où il fallait incontournablement faire appel aux seigneurs de la guerre reconvertis dans les grosses affaires ou le mécénat politique. Pour la première fois depuis que s’est tu le canon, la prime à la violence n’a plus cours : grâce dont il faut tout de même reconnaître qu’elle ne fut jamais accordée à Rafic Hariri qui, malgré ses efforts, n’obtint jamais qu’il fut débarrassé de ses ministres frondeurs. Plus évident et convaincant cependant eut été le changement, si l’inamovibilité absolue ne s’était pas imposée, cette fois encore, en faveur notamment du ministre de l’Intérieur. Qui a, à son palmarès, deux élections législatives entachées de nombreuses et graves irrégularités. Dans l’ensemble néanmoins, ce sont les hommes qu’il faut que l’on trouve à la place qu’il faut, et c’est là – comme dans le groupage, entre les mains d’un même titulaire, de ministères cousins – que réside la caractéristique la plus notable de ce Cabinet resserré. Des économistes de renom auront pour délicate tâche de redéfinir les priorités, de combler le déficit du budget, d’enrayer le surendettement et de relancer les circuits vitaux. Un médecin prend en charge la Santé, et c’est un vétéran de la Fonction publique qui devra engager cette même réforme administrative sur laquelle tous les gouvernements de l’après-guerre se sont cassés les dents. Aux (bien nommées) Ressources comme à ces Pétroles, qui sentaient un peu trop fort, est assigné un procureur auprès de la Cour des comptes. Au Travail et aux Affaires sociales, officiera un parlementaire animé du souci des droits de l’homme; et last but not least, c’est rien moins que le président du Conseil d’État qui coiffera la Justice. Davantage sans doute que pour ses collègues, c’est une écrasante responsabilité qui va être celle de ce magistrat à l’intégrité et au courage connus et reconnus. La conjoncture veut, en effet, que l’on s’arme d’un bon balai, mais aussi qu’on en use avec équité : cela afin que les citoyens reprennent véritablement confiance et qu’ils cessent de percevoir l’État au mieux comme un machin inconsistant, au pire comme l’ennemi qui en veut à vos droits et à votre argent. Bien sûr, ce sont surtout le gaspillage et le pillage, fléaux de l’ancien régime, qui sont dans le collimateur du tandem Lahoud-Hoss. Il ne faut pas cependant que l’indispensable assainissement des comptes tourne au règlement de comptes: ce qui serait non seulement abusif mais extrêmement préjudiciable à l’image de l’État nouveau : le glaive de la justice ne doit pas se transformer en machette, sous prétexte de sanctionner les républiques bananières. On ne peut que déplorer à ce propos l’impression de zèle intempestif (et bien tardif, après une longue inaction face aux scandales de toutes sortes), d’opportunisme et pour finir de légèreté que laisse la manière dont a été gérée l’affaire des documents officiels escamotés ou détruits. Avant même, en effet, qu’ait été formé le nouveau gouvernement, on a vu l’autorité judiciaire faire mine de s’attaquer à des grosses têtes pour se rétracter quelques heures plus tard, avant de se rabattre... sur les propagateurs de fausses rumeurs. Ce n’est pas à propos des grosses têtes cependant que les citoyens ont besoin d’être rassurés. Les violations répétées des libertés publiques, les débordements des polices, les rafles opérées de nuit et sans mandats légaux, les détentions préventives assorties de coups et sévices, les dénis de droit, tout cela doit désormais appartenir au passé. Oui, et le Parlement étant ce qu’il est, c’est à la Justice qu’il incombe de réagir unilatéralement – et souverainement – à toutes les dérives : surtout quand certains sceptiques s’inquiètent déjà du règne des services qu’annonce, selon eux, l’accession d’un militaire à la magistrature suprême. Surtout encore quand le chef de l’État s’engage de si ferme et catégorique manière qu’il l’a fait dans son discours-programme d’investiture, à ce que nul ne soit au-dessus de la loi. Surtout enfin quand le chef de l’État et le Premier ministre, lui-même un défenseur des libertés, commencent par s’entourer d’une équipe où les démocrates, fort heureusement, ne manquent pas.
C’est sous le signe de la célérité et de l’efficacité qu’a vu le jour ce premier gouvernement du nouveau mandat, ce qui constitue en soi une première rupture avec le passé. Formé pour moitié d’hommes politiques et pour l’autre moitié de techniciens, dont des représentants de la société civile, l’équipe Hoss décline, d’emblée, une vocation réformatrice qui...