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Actualités - ANALYSE

Portrait psycho-politique Hoss, un homme posé, un style réfléchi ..

Cela ne nous rajeunit pas : le 8 décembre 1976 au soir Élias Sarkis avait chargé un inconnu en politique, Sélim Hoss, de former le premier gouvernement de son mandat. Et dès le lendemain soir, c’était chose faite et les décrets publiés. Vingt-deux ans plus tard, le 3 décembre 1998 Émile Lahoud a confié la même mission au professeur d’économie devenu entre-temps l’une des figures de proue de la scène politique locale. Il s’est également rendu célèbre par son obstination tout comme par sa propension à la réflexion. C’est-à-dire qu’il est connu pour prendre largement son temps avant d’adopter une position déterminée ; mais une fois qu’il l’a faite il n’en démord plus. Et ces positions peuvent être en flèche… Ceux qui le connaissent disent donc qu’on se trompe en estimant qu’il lui arrive d’hésiter car en réalité il ne tergiverse pas, mais réfléchit. C’est-à-dire, ajoutent-ils que ce n’est pas du tout un homme qui alterne les réponses, oui et non sans savoir se fixer, mais quelqu’un qui a horreur de  l’improvisation et des décisions prises dans un mouvement d’humeur ou sur une intuition de moment. Quand il avait quitté le pouvoir sous Sarkis, il avait eu quelques problèmes de santé et avait dû subir une opération à cœur ouvert. Fouad Boutros lui rendant visite, lui avait amicalement reproché de n’avoir pas continué aux côtés de Sarkis. Usant à peu près de ces termes  : «Quand le chef de l’État m’a annoncé son intention de vous désigner pour former le gouvernement, je ne vous connaissais pas assez pour porter un jugement à votre égard. Le président m’a dit à votre propos : c’est un homme de principe, ferme dans ses positions. Je ne pensais pas que cette fermeté irait jusqu’à vous porter à vous séparer du président…» En tout cas comme Hoss n’a pratiquement régné jusque-là qu’en temps de guerre, de crises aiguës et de bouleversements, il  a vite acquis une rare expérience de la responsabilité. À son avis un dirigeant tire sa vraie puissance de son abnégation. Il dit ainsi : «Un responsable reste fort jusqu’au jour où il demande quelque chose pour lui-même. Quand il se met à avoir des appétences — comme de vouloir le pouvoir pour le pouvoir ou de s’y accrocher —, il s’afflige d’autant de points de faiblesse. S’il obtient ce qu’il demande, il doit alors donner quelque chose en échange. Et le prix à payer, en termes de véritable assumation des responsabilités, peut être très lourd. Un responsable doit donc être désintéressé, car gouverner c’est prévoir». Dans tous les cercles professionnels où il a évolué, Hoss a été vite reconnu comme un homme à principes. Ainsi avant d’entrer en politique il avait été nommé un jour président de la Banque nationale pour le développement industriel et touristique. On l’avait alors prié de coopter comme avocat de l’établissement un juriste apparenté à un dirigeant de haut rang. Il avait refusé. Ce dirigeant l’avait convoqué pour faire pression sur lui. Il avait répondu qu’il avait déjà promis le poste à Youssef Takla car ce dernier avait accompagné la naissance de la banque dans toutes ses étapes et se trouvait le plus qualifié pour en assurer le contentieux. Son interlocuteur lui disant qu’on pouvait prendre un deuxième avocat, il avait répliqué qu’un seul suffisait, d’autant que l’établissement en était encore à ses débuts et n’avait pas trop de dossiers juridiques à traiter. Liberté de presse Dans son ouvrage Le temps de l’espoir et de la déception, Hoss confirme que c’est Sarkis qui avait pratiquement formé son premier gouvernement. D’une part parce que lui-même ne connaissait pas les politiciens. D’autre part parce que Sarkis avait alors un blanc-seing international et régional. À peine une semaine plus tard poursuit Hoss dans son ouvrage, premier choc pour le gouvernement : des éléments armés avaient investi les locaux de plusieurs journaux, les obligeant à fermer boutique. Sarkis n’avait pas voulu réagir, car il n’aimait pas la presse, et lui avait du reste interdit l’enceinte de Baabda, obligeant les journalistes à camper pour recueillir les déclarations des visiteurs, à hauteur du premier barrage de l’armée. Lors du premier Conseil des ministres, Sarkis a tout de suite fait passer — malgré les tentatives de temporisation de Hoss — le décret soumettant les journaux à la censure de la Sûreté générale. Hoss a cherché ensuite à atténuer les choses, en affirmant dans une déclaration que le gouvernement restait soucieux de conforter les libertés publiques et que la mesure prise visait à promouvoir une liberté de presse responsable… Hoss raconte encore qu’il y a eu par la suite affrontement avec Sarkis au sujet de l’éviction d’officiers convaincus d’avoir contribué à fissurer l’armée. Il avait estimé pour sa part que dans cette affaire, il y avait discrimination confessionnelle…Différents conflits ont d’ailleurs porté par la suite sur des questions concernant la défense ou l’institution militaire, comme le contrat de 50 millions de LL pour la remise en état des Mirage de l’armée de l’air, opération que Hoss jugeait aussi inutile que dispendieuse… Il a donc fini par démissionner le 22 octobre 1980. Au bout de quatre ans et de deux gouvernements, car le 16 juillet 1979 il avait formé un nouveau Cabinet. Il devait de nouveau diriger le gouvernement pendant trois ans et demi après l’assassinat de Rachid Karamé.
Cela ne nous rajeunit pas : le 8 décembre 1976 au soir Élias Sarkis avait chargé un inconnu en politique, Sélim Hoss, de former le premier gouvernement de son mandat. Et dès le lendemain soir, c’était chose faite et les décrets publiés. Vingt-deux ans plus tard, le 3 décembre 1998 Émile Lahoud a confié la même mission au professeur d’économie devenu entre-temps...