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Actualités - ANALYSE

Enrichissement illicite : un véritable casse-tête pour les parlementaires Une accélération qui pourrait n'être pas suivie d'effets

On savait que le président Rafic Hariri était pressé. On constate que le président Nabih Berry ne l’est pas moins. Il a en effet brûlé gaiement une étape en expédiant le projet de loi Tabbarah sur l’enrichissement illicite directement aux commissions parlementaires conjointes. Sans passer par le premier sas ordinaire, la commission de l’Administration et de la Justice. Cela sous le prétexte que le texte comporte des éléments intéressant d’autres commissions, dont celles des Finances… En pratique, l’administration et la justice se retrouve un peu Gros Jean comme devant : elle attendait le chef-d’œuvre de M. Tabbarah pour le comparer au code déjà existant, dit d’où-tiens-tu-cela, qui remonte à 1954, ainsi qu’à la proposition de loi de M. Boutros Harb dont elle est saisie. Pour en faire éventuellement la synthèse, en tenant compte en outre des différentes dispositions concernant la corruption disséminées dans le Code pénal ou dans le Code de procédure civile. C’est peut-être bien pour éviter que la commission de l’Administration et de la Justice ne sorte finalement un texte composite très éloigné de celui de M. Tabbarah qu’on a passé directement aux commissions conjointes, dont elle fait forcément partie, sans… y faire la loi ! Mais l’initiative de M. Berry peut, selon certains professionnels, «produire un contre-effet. Les commissions conjointes, c’est un trop large cénacle pour un débat serein. Plus il y a de fous plus on rit, dit l’adage. Et plus il y a de parlementaires penchés sur le berceau d’une loi, plus cela jacasse. Les députés vont probablement pinailler à perte de vue et multiplier les propositions d’amendements au point que le nouveau code pourrait bien se trouver renvoyé aux calendes grecques. D’autant que lutter contre la corruption serait de la part de certains un geste quasi masochiste…». Une méfiance peu justifiée «dans la mesure, note un juriste, où pas plus que celui de M. Harb le dispositif de M. Tabbarah ne semble voué à l’efficience. Sauf évidemment pour empêcher les députés de parler, de dénoncer, puisqu’ils deviendraient passibles de poursuites en diffamation après levée automatique de leur immunité parlementaire». Toujours est-il qu’un député relève pour sa part qu’il n’y a aucune raison «pour que les commissions réunies fassent à M. Hariri la fleur d’aller vite en besogne. Nous avons en effet en chantier, depuis des mois, d’autres dossiers importants sous étude comme celui des biens domaniaux maritimes, de l’exemption fiscale des wakfs communautaires ou du code de la propriété intellectuelle plus connu sous le nom des droits d’auteur…». Ce parlementaire faussement ingénu se demande ensuite «sur quoi au juste on veut nous faire statuer… Nous n’arrivons pas à comprendre les complexités du texte Tabbarah. Nous ne savons pas si le crime d’enrichissement illicite que la loi est supposée sanctionner relève du pénal ou du civil. Nous ne voyons pas comment on peut l’isoler de toute la batterie de crimes afférents que les lois ordinaires sanctionnent. Et puis qui peut avoir le droit d’ester, de porter plainte devant telle instance plutôt que devant telle autre ? Pour nous c’est un tel casse-tête chinois que nous avons l’impression qu’il s’agit là d’une simple manœuvre de diversion médiatique, dans une période de transition. Nous ne sommes pas loin de penser que le pouvoir ne nous en voudra pas trop si nous prenions notre temps…». Techniquement, le président de la commission parlementaire de l’Administration et de la Justice, M. Chaker Abousleiman, pense que le texte, complexe, doit être allégé pour devenir utilisable en pratique.
On savait que le président Rafic Hariri était pressé. On constate que le président Nabih Berry ne l’est pas moins. Il a en effet brûlé gaiement une étape en expédiant le projet de loi Tabbarah sur l’enrichissement illicite directement aux commissions parlementaires conjointes. Sans passer par le premier sas ordinaire, la commission de l’Administration et de la Justice....