Le maître du Kremlin en passe de réussir son pari d'imposer Kirienko La Douma cède progressivement aux pressions de Eltsine

Le président russe Boris Eltsine a marqué un point important hier dans son combat pour imposer le jeune libéral Sergueï Kirienko au poste de premier ministre, en obtenant le ralliement soudain du président communiste de la Douma. Le président de la Chambre basse du Parlement, Guennadi Seleznev, a ouvertement rompu avec ses camarades communistes, en appelant à voter pour M. Kirienko à l’issue d’un entretien avec Boris Eltsine au Kremlin. Si M. Seleznev représente de notoriété publique l’aile la plus modérée de l’opposition communiste, son appel indique néanmoins que les députés sont en train de craquer sous la pression de Boris Eltsine, estiment les analystes. «Il est mille fois plus important pour moi de préserver la Douma et de la laisser travailler jusqu’au terme constitutionnel de son mandat», a expliqué à la presse Guennadi Seleznev, en référence aux menaces du président russe de dissoudre l’assemblée. La Douma a rejeté une première fois vendredi la candidature de M. Kirienko, 35 ans, et les députés doivent à nouveau se prononcer vendredi sur ce technocrate au visage poupin, inconnu du grand public. La Constitution stipule que le président dissout la Douma si celle-ci rejette trois fois les propositions du président. M. Seleznev, 50 ans, a appelé ses collègues à ne pas prendre un tel risque, et il a pronostiqué que la candidature de Sergueï Kirienko serait entérinée dès le second tour avec un minimum de 235 voix. M. Kirienko avait obtenu 143 voix au premier tour, alors qu’une majorité de 226 des 450 députés est requise. Guennadi Seleznev a fait rapport de son entretien avec Boris Eltsine devant le groupe communiste, le plus important de la Douma avec 149 élus. M. Seleznev «n’a pas pu convaincre les députés de soutenir Kirienko, car nous sommes liés par la décision du plénum de notre comité central, qui s’est prononcé contre cette candidature», a déclaré le représentant de l’aile dure du groupe, le numéro deux du parti Valentin Kouptsov. Mais cette intransigeance n’est certainement pas partagée par l’ensemble de la Douma. «Il y a maintenant une très grande probabilité que les députés entérineront la candidature de Kirienko au second tour», estime Nikolaï Petrov, analyste à la fondation Carnegie. Les communistes et leurs alliés du groupe agraire et du groupe pouvoir au peuple disposent au total de 221 sièges. Boris Eltsine doit à tout prix obtenir certaines défections dans les rangs de cette coalition pour réunir une majorité de voix autour de son candidat au poste de premier ministre. Pour éviter le risque de débauchage individuel de députés de la part du Kremlin, les députés doivent se prononcer mercredi sur un changement de règlement, visant à rendre le vote d’investiture sur M. Kirienko public et non à bulletin secret.(AFP-Reuters)