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Actualités - REPORTAGE

Consommation - Pour quelques infractions réprimées, combien d'autres passent inaperçues Les services de contrôle manquent cruellement de moyens (photo)

Avec le laxisme, le laisser-aller et le manque de rigueur qui caractérisent l’organisation et le fonctionnement de l’économie au Liban, il n’est pas facile de contrôler les produits écoulés sur le marché, surtout au niveau des prix. Le contrôle exercé se limite essentiellement à la vérification de la qualité des denrées alimentaires. Encore, est-il loin d’être efficace. Les abus peuvent se manifester à tous les niveaux, de la chaîne de consommation, de la fabrication jusqu’à la vente, et les déceler n’est pas toujours aisé, surtout dans un pays comme le Liban où la santé de la population ne constitue pas réellement une priorité. Les services de contrôle rattachés aux différents départements étatiques existent mais manquent tous de moyens et d’effectifs : une aubaine pour nombre d’importateurs et de commerçants qui peuvent ainsi introduire dans le pays des animaux malades destinés à l’abattage ou des produits dont on ne veut pas ailleurs . Le plus souvent, ces produits sont interceptés au niveau des douanes. Dans certains cas, on parvient à les écouler sur le marché, sous de nouveaux labels et emballages et, parfois, ils sont immédiatement saisis. On se souvient des affaires de poulets atteints de salmonelle, des conserves périmées et conditionnées dans de nouveaux emballages ou, pire encore, des produits toxiques introduits au Liban après la guerre. Si ces graves infractions ont été découvertes, combien d’autres ont-elles échappé au contrôle ? Le problème est d’autant plus inquiétant que les moyens dont disposent les services chargés de protéger le consommateur sont nettement insuffisants. Prenons l’exemple du service rattaché au ministère de l’Economie : le SPC. Le nombre de ses agents est tombé au cours des trois dernières années de 202 à 105, tout simplement parce que les fonctionnaires qui ont pris leur retraite n’ont pas été remplacés. Ils sont donc 105 seulement à effectuer des tournées d’inspection à Beyrouth et au Mont-Liban, traquant la triche dans les poids et dans la qualité . 105 personnes pour vérifier régulièrement la marchandise de centaines de milliers d’établissements de commerce, de restaurants, de boulangeries, de stations-service, d’hôtels…Ce n’est pas beaucoup. Le SPC fait certes ce qu’il peut, mais est-ce suffisant ? Bien sûr que non, mais c’est toujours mieux que rien, surtout lorsqu’on prend connaissance du nombre de cas de fraudes qu’il découvre : 82 au mois de septembre. Après une démonstration de force — télévisée de surcroît— en 1996 (des dizaines de procès-verbaux avaient été dressés à des contrevenants), le Service de protection du consommateur s’est remis à faire dans la discrétion. Le concours de la population En vue de plus d’efficacité, une Chambre d’opérations a été créée par le ministre Yassine Jaber. Elle organise les activités des différents services du SPC. Son président, le brigadier Dib Kamal, également conseiller du ministre, reconnaît l’insuffisance des moyens de son service. «Mais, dans tous les cas, nous ne pouvons pas être aux côtés de 4 millions de personnes. Nous avons besoin du citoyen pour nous indiquer les cas de fraude», explique-t-il. Les plaintes qui parviennent au SPC sont assez nombreuses. Elles font toutes l’objet d’une enquête, précise le brigadier Kamal, interrompu par ses assistants qui le relancent au sujet d’une affaire de shampoing européen conditionné au Liban. L’officier est catégorique : le label d’origine doit figurer sur le flacon. Le SPC tente, dans la mesure du possible, de penser à tous les détails. En moyenne, 19 patrouilles traquent par jour les infractions à Beyrouth et dans tout le Mont-Liban. Elles choisissent au hasard leurs cibles parmi les différents établissements de commerce. Le brigadier Kamal note que c’est par crainte de démêlés avec la justice que nombre de commerçants préfèrent être en règle. Une fraude coûte au propriétaire d’un établissement une peine allant jusqu’à 20 jours de prison ainsi qu’une amende se situant dans une fourchette de 3 à 10 millions de livres. Elle peut parfois entraîner la fermeture de son établissement. Selon les explications du brigadier, les cas de fraude repérés cette année par le SPC ont diminué par rapport aux trois dernières années. Ce service s’assure que tous les magasins et les parkings affichent leurs prix, que les établissements de commerce ne vendent pas de produits périmés, que le nombre de pains dans une «rabta» correspond à celui fixé par le ministère de l’Économie, que les propriétaires de stations-service ne trichent pas dans la quantité et la qualité de l’essence fournie aux automobilistes…. La triche peut parfois être réglée à la libanaise, c’est-à-dire moyennant quelques billets verts. On sait tous que la corruption est le principal vice de notre Administration. Visiblement, le brigadier Kamal n’aime pas s’étendre sur cette question, «d’autant que rien n’est jamais sûr». «La corruption existe, reconnaît-il, mais elle est difficilement repérable. Un fonctionnaire corrompu est immédiatement déféré en conseil de discipline». Pour repérer les fonctionnaires qui acceptent les pots-de-vin, le concours de la population, ajoute le brigadier, est aussi primordial. Reste à savoir qui ira dénoncer un agent qu’il a lui-même soudoyé.
Avec le laxisme, le laisser-aller et le manque de rigueur qui caractérisent l’organisation et le fonctionnement de l’économie au Liban, il n’est pas facile de contrôler les produits écoulés sur le marché, surtout au niveau des prix. Le contrôle exercé se limite essentiellement à la vérification de la qualité des denrées alimentaires. Encore, est-il loin d’être...