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Actualités - REPORTAGE

Présidentielle - Une élection Place de l'Etoile, pour la première fois depuis 1970 Cent dix-huit députés, autant de bulletins Lahoud (photos)

Un président de la République élu dans l’enceinte du Parlement, Place de l’Étoile, on n’avait plus vu cela depuis Sleimane Frangié en 1970. Après cette date, tous les candidats avaient été portés à la magistrature suprême soit dans une caserne, soit dans un aérodrome, soit dans une résidence privée transformée par les contraintes de l’heure en siège provisoire de la Chambre. C’est vrai que l’idée d’un Émile Lahoud siégeant à Baabda a d’abord germé dans la tête des décideurs locaux et régionaux avant d’être accueillie par la population avec soulagement, voire avec enthousiasme, pour être confirmée à Damas. Mais c’est sous la coupole du Parlement que le commandant en chef de l’armée a été proclamé onzième «Président de la République libanaise», à l’issue d’une séance électorale qui s’est déroulée sous les yeux de centaines de diplomates et de journalistes installés dans l’hémicycle et de dizaines de milliers de Libanais plantés devant leurs téléviseurs. Émile Lahoud, Émile Lahoud…cent dix-huit fois, le vice-président de la Chambre Elie Ferzli lira le nom du commandant en chef de l’armée. Autant de fois qu’il y a de députés dans la salle. Par contre, dix parlementaires ont boycotté la séance : le ministre Walid Joumblatt et les huit membres de son bloc, ainsi que Omar Karamé, ancien chef du gouvernement, qui a par ailleurs annoncé un appui «sans limites» au général. Le Parlement a rarement été aussi bondé. Dès 10h30, députés, diplomates et journalistes se bousculent dans les couloirs et sur les marches des escaliers. Les fonctionnaires chargés d’installer les invités sont visiblement débordés. Les sièges du deuxième niveau de l’hémicycle sont en nombre insuffisant et des journalistes finiront par se serrer sur les marches pour suivre le déroulement de l’élection. Deux cents personnes étaient invitées à la séance, dont tous les ambassadeurs arabes et étrangers accrédités au Liban, les présidents de la CGTL et de tous les ordres professionnels, ainsi que les responsables des organismes économiques. 11h. : M. Berry annonce l’ouverture de la séance. Lecture des articles de la Constitution relatifs à la réunion, décompte des députés et distribution des bulletins de vote. Le silence est troublé par le crépitement des flashes des caméras et une certaine tension est perceptible. Une voix s’élève dans l’hémicycle. «J’annonce la candidature du général Émile Lahoud à la présidence de la République», lance timidement Estéphan Doueihy. M. Berry reprend d’une voix plus sûre la phrase du député de Zghorta, ajoutant que le bulletin doit comporter uniquement le nom complet du candidat. «Le bulletin qui comporte le mot général sera annulé», dit-il. 11h10 : début de l’opération de vote par bulletin secret. Un fonctionnaire portant une urne en verre fait le tour des députés qui y déposent la petite feuille blanche. Si la plupart des parlementaires affichent une mine sereine en accomplissant leur devoir, certains arborent quand même un sourire forcé, notamment les ex-candidats potentiels dont le rêve a été brisé et les ambitions freinées par l’élection de Lahoud. Le dépouillement commence à 11h20. M. Berry demande à MM. Camille Ziadé et Abdel-Rahmane Abdel-Rahmane, tous deux membres du bureau de la Chambre, de seconder M. Ferzli dans cette tâche. Même si le résultat est connu d’avance, tout le monde retient son souffle. Les yeux des journalistes sont braqués sur Najah Wakim, le seul député dont l’intention de vote n’est pas bien déterminée. Certaines sources avaient affirmé qu’il comptait déposer un bulletin blanc. Le suspense ne dure pas longtemps. «Émile Lahoud a obtenu cent dix-huit voix», déclare M. Ferzli d’une voix satisfaite. Cette unanimité est accueillie par un tonnerre d’applaudissements qui redouble d’intensité lorsque M. Berry proclame officiellement l’élection du commandant en chef de l’armée à la Première magistrature de l’État. L’instant est solennel. Que les députés aient ou non reçu un mot d’ordre, ils n’en assument pas moins une grande responsabilité devant le peuple qu’ils sont censés représenter et devant l’histoire. «Émile Lahoud a réussi là où son père a échoué, il y a vingt-huit ans. Espérons qu’il réussira là où Fouad Chéhab a échoué», commente un député en quittant les lieux. Dans l’hémicycle qui se vide aussi rapidement qu’il s’est rempli, l’espoir est presque palpable. En cet instant, les députés et le peuple sont peut-être sur la même longueur d’onde.
Un président de la République élu dans l’enceinte du Parlement, Place de l’Étoile, on n’avait plus vu cela depuis Sleimane Frangié en 1970. Après cette date, tous les candidats avaient été portés à la magistrature suprême soit dans une caserne, soit dans un aérodrome, soit dans une résidence privée transformée par les contraintes de l’heure en siège provisoire...